Depuis septembre 2000, Paul Bony, membre de la Compagnie des prêtres de Saint-Sulpice (société de vie apostolique dont la mission principale est la formation des futurs prêtres), grand spécialiste de la bible, a pris sa retraite et habite avec la communauté. Nous avons célébré ses 100 ans le 23 septembre dernier, et en ce mois d’octobre il rejoint d’autres prêtres, religieux et religieuses dans la maison de retraite des Petites Sœurs des Pauvres à la rue Jeanne Jugan. C’est l’occasion pour nous de lui adresser tous nos remerciements pour ces 24 années passées avec lui.
La curiosité
Paul, tu as toujours été curieux de ce qui se passe dans le monde, dans la société, dans l’Église, dans le diocèse, à l’Œuvre, dans notre communauté. Souvent, avec l’âge, les personnes se replient sur elles-mêmes et deviennent un peu indifférentes à ce qui se passe autour d’elles, mais ça n’a jamais été ton cas. Tu as toujours été sensible à ce que les gens vivaient, comment ils se sentaient, de quoi leur vie intérieure était nourrie. C’est toi qui étais le plus informé sur l’actualité, et tu lisais assidument le journal chaque jour, à la recherche d’analyses permettant de comprendre la vie de nos contemporains, afin de toujours mieux les accompagner.
L’attention aux autres
Tu as toujours été attentionné envers ceux qui partageaient ta vie. Dans la vie communautaire, nous avons été touchés par ta délicatesse, en particulier lorsque tu devinais que l’un de nous traversait une difficulté ou était diminué par la maladie et la vieillesse. Tu as accompagné tes amis ou les membres de ta famille avec fidélité, prenant le temps d’appeler presque quotidiennement certaines personnes isolées, seules ou en détresse, restant à l’écoute malgré ton audition difficile. Ton ministère de formateur ne t’avait pas toujours donné l’occasion d’être dans une activité pastorale directement engagée dans l’action, mais tu as toujours eu le souci d’allier la foi et l’amitié, la prière et l’engagement concret, en particulier dans ton souci des pauvres et dans ton implication dans le mouvement de la Mission ouvrière… Hier encore tu t’inquiétais de savoir comment tu allais pouvoir t’engager pastoralement au service des autres alors que tu t’apprêtais à entrer en maison de retraite ! En tout cela tu nous a stimulés.
La passion de la parole de Dieu
Tu as fréquenté toute ta vie la Bible et la Parole de Dieu. Ce n’était pas seulement une matière d’enseignement, de recherche ou de publication, c’est une passion. Tu y as puisé l’énergie du service et tu as voulu partager ce trésor pour que les femmes et les hommes de notre temps ne passent pas à côté de la rencontre avec le Seigneur. Nous ne t’avons pas vu une journée sans lire un ouvrage d’exégèse, sans recevoir un colis avec le dernier livre d’un spécialiste de la Bible, en anglais, en allemand ou en hébreu ! Érudit, tu l’es, mais avec l’humilité des authentiques spécialistes, qui n’écrasent pas les gens de leur connaissance, mais savent la mettre à leur service. En cela aussi tu nous a stimulés, et nous étions parfois désolés de ne pas arriver à en faire plus pour donner le goût de la Parole de Dieu aux jeunes de l’Œuvre. Durant ces 15 dernières années, tu ne pouvais plus enseigner à cause de tes difficultés auditives ou visuelles, mais tu as animé une équipe proposant des parcours de lecture biblique, nourrissant de nombreux groupes de partage, qui trouvent dans ces livrets de quoi nourrir leur foi et entrent ainsi dans une lecture vivante de la Parole de Dieu.
Le dialogue comme boussole
Tu as participé, en 1992, à la création de l’Institut de sciences et théologie des religions de Marseille avec Jean-Marc Aveline, qui n’était pas encore archevêque de Marseille, ni cardinal, mais que tu avais connu plus jeune lorsqu’il était entré au séminaire des Carmes à Paris, que tu dirigeais à l’époque. C’est toi qui avais eu l’intuition que la création d’un pôle de formation théologique à Marseille se devait d’honorer l’ouverture au dialogue interreligieux et interculturel. Car tu es un homme de dialogue, pétri de la Parole de Dieu et donc attentif à la rencontre. Tu es de la génération des prêtres qui ont connu la messe en latin puis ont contribué à mettre en œuvre le concile Vatican II avec son ouverture au monde. Tu es un homme libre, par l’action de l’Esprit de Dieu au cœur de ton expérience, ce qui t’a parfois été reproché et a eu des conséquences sur ta « carrière », car la liberté dérange, mais sans jamais que tu sois aigri ni déboussolé car tu as ce repère intérieur de la Parole de Dieu qui donne constance, liberté et joie, au cœur même des épreuves et des injustices.
Merci
Pour tout cela, et pour bien d’autres choses encore, dont la belle et authentique fraternité que tu as partagée avec la communauté des Messieurs de l’Œuvre durant 24 ans, nous voulons rendre grâces et te remercier. Nous savons que ton énergie va rayonner auprès de tes frères prêtres et de cette nouvelle communauté que tu vas découvrir chez les Petites Sœurs des Pauvres. Nous souhaitons qu’ils aient la chance de bénéficier encore longtemps de ta bienveillance et de ton regard malicieux et lumineux sur la vie.
Olivier