Avec Pâques, fête fondamentale pour les chrétiens, nous célébrons la résurrection du Christ, et cela démarre par la découverte du tombeau vide. Ensuite c’est sur les dires des uns et des autres qui témoignent du retour du Christ que la résurrection devient une Bonne Nouvelle, mais ce sont des croyants qui en parlent, il n’y a pas de preuve historique de la résurrection, ni de la divinité de Jésus. C’est donc sur une absence que repose la foi des chrétiens, ce qui définit l’acte même de croire : il n’y pas de preuve tangible irréfutable et matérielle, cela implique une adhésion personnelle et libre. On ne nous demande pas de croire en l’existence du papier sur lequel est imprimé ce texte, mais pour les sentiments, comme pour la foi, il y a un mouvement intérieur qui permet d’affirmer ou non si l’on croit. Si la foi était démontrable et irréfutable, alors nous n’aurions pas le choix, nous serions obligés de croire, et l’on ne parlerait pas de croyance mais de certitude.
L’invisible
Dans le cadre d’une relation d’amitié ou d’amour, on peut donner des preuves du sérieux de cette relation, on peut poser des gestes et des actes, mais le doute subsiste, c’est ce qui fait la force et la fragilité de ces relations humaines tellement belles mais parfois douloureuses. On peut découvrir que l’on a été manipulé, ou au contraire se rendre compte que l’on a négligé une belle relation par aveuglement, par négligence ou pour un tas d’autres raisons liées à notre histoire et à nos expériences antérieures. Les sentiments ne sont pas visibles en dehors des geste qu’ils font poser.
Le doute
Pour la croyance, comme pour les sentiments, le doute fait donc partie du chemin de la foi. Il est normal que nous posions des questions sur ce qui fonde notre espérance, sur le sérieux de notre expérience spirituelle. Les miracles relatés dans les Évangiles ne sont pas des actes magiques qui obligent les spectateurs à croire, ils sont des signes de la bienveillance de Dieu qui est sensible à la détresse humaine et qui vient lutter contre le mal. D’ailleurs, à plusieurs reprises, la Bible relate que Jésus ne pouvait pas accomplir de guérison là où les gens n’avaient pas la foi. Et même lorsque les miracles paraissent extraordinaires, ils peuvent rester objets de contradiction et d’incrédulité. Cela me fait penser à une rencontre avec le responsable du sanctuaire de Lourdes lorsqu’étant jeune j’avais participé au pèlerinage diocésain avec les personnes malades et handicapées de Marseille. Il nous expliquait que les miracles reconnus officiellement par l’Église ne relevaient pas de la magie mais étaient en fait des guérisons inexpliquées et jamais contre-nature. Et qu’il fallait que le doute puisse exister entre intervention divine et action de forces qui permettaient aux personnes malades de trouver des ressources insoupçonnées et inconnues au moment de la guérison. Il nous précisait qu’avec les années et les progrès de la science, certains miracles pouvaient trouver des explications médicales et psychologiques, mais que le terme de miracle restait justifié car à l’époque où la guérison avait eu lieu, on ne pouvait pas comprendre ou provoquer ce rétablissement. Il y avait quelque chose qui nous dépassait. Que certains parlent de miracle et d’autres de force intérieure ou de « niaque » fait partie de ce doute possible. Il nous disait même que, pour lui, le véritable miracle de Lourdes, comme de beaucoup de lieux de guérisons, c’était que la plupart des malades ne revenaient pas guéris après un pèlerinage mais qu’ils avaient gardé la foi et trouvé des ressources intérieures pour traverse les épreuves.
La liberté
Il est donc naturel et même peut-être bénéfique, que nous puissions avoir des périodes de doute et de remise en cause de notre foi. Cela fait partie du processus. Entre ce que l’on a appris étant un enfant crédule et notre expérience d’adulte libre et responsable avec une certaine expérience de la vie, il est normal que nous ayons besoin de remettre en cause les choses imposées pour qu’elles prennent du sens, qu’elles soient remises en perspective et répondent à une certaine logique. Ce n’est pas un péché de douter ou de se poser des questions, au contraire. L’Église précise même aux croyants que pour prendre une décision qui soit juste et bonne, ils doivent suivre leur conscience. Ils ont le devoir d’éclairer cette conscience pour ne pas être motivés par des pulsions ou des instincts, ils ont sans doute besoin de prendre conseil et de prendre du recul – et la spiritualité et la foi chrétienne donnent des repères qui permettent de faire ce travail de discernement – mais au bout du compte, ce que l’Église nous dit, c’est qu’elle respecte la décision d’une personne même si cette décision ne rentre pas totalement dans les clous de la doctrine officielle. La liberté de l’homme est première. On pourrait même dire que le désir de Dieu pour l’humanité, si l’on peut prétendre savoir ce que Dieu veut – ce qui est révélé tout au long de la vie de Jésus dans ses rencontres et ses relations – c’est que l’homme soit libre. Libre au sens fort du terme : libéré des tous les esclavages, intérieurs, extérieurs, politiques et mêmes religieux, afin qu’il accède à sa plénitude et à son accomplissement.
Olivier