Le pape Paul VI disait en 1974 lors d’une audience générale : « L’homme contemporain écoute plus volontiers les témoins que les maîtres, ou s’il écoute les maîtres, c’est parce qu’ils sont des témoins. Il éprouve en effet une répulsion instinctive pour tout ce qui peut apparaître mystification, façade, compromis. Dans un tel contexte, on comprend l’importance d’une vie qui résonne vraiment de l’Évangile ! » Cette réflexion reste d’actualité et concerne l’Église mais aussi toute l’humanité. On le voit bien avec la méfiance de nos contemporains vis-à-vis des politiciens, des syndicalistes, des journalistes et de toute personne en charge de responsabilité. Si les actes ne sont pas en conformité avec les paroles, alors le message est rejeté en bloc. C’est une invitation à l’exigence personnelle pour tous ceux qui ont des responsabilités.
Appel à l’exigence
Il est bien normal que les gens attendent de la part de ceux qui transmettent des messages qu’ils soient à la hauteur de ce qu’ils annoncent. Sinon ils sont considérés comme des hypocrites ou des menteurs. Nous savons que les messagers sont humains, donc imparfaits et perfectibles, mais ils se doivent de tout faire pour avancer vers l’idéal qu’ils annoncent et pour travailler intérieurement à se conformer à ce qu’ils proposent comme chemin positif et de bonheur. Sinon ils sont des donneurs de leçons qui n’appliquent pas ce qu’ils proposent comme chemin de vie. Cela doit nous engager à essayer de vivre du message, et à tendre vers l’idéal que nous annonçons. Le Christ est le seul qui incarne parfaitement la parole de Dieu, au point que de lui seul nous pouvons dire qu’il n’est pas un messager mais qu’il est lui-même le message. Bien que nous soyons incapables d’incarner parfaitement l’Évangile dans nos vies, nous devons nous rappeler que c’est vers ce but que nous devons tendre, c’est tout le sens de l’appel à la sainteté qui nous est adressé lors de notre baptême.
Appel à l’humilité
Les messagers, pour être dignes du message qu’ils portent, doivent se rappeler qu’ils ne sont pas exempts de défauts et que le message lui-même les dépasse, nécessitant leur propre transformation. Les gens acceptent que les responsables aient des limites et ne soient pas parfaits, mais ils peuvent être profondément blessés si les messagers prétendent incarner parfaitement le message et jugent et condamnent alors qu’ils sont eux-mêmes imparfaits. Le message évangélique n’est pas un critère de condamnation mais une Bonne Nouvelle qui soutient les hommes et les femmes dans leur cheminement, les aide à se relever après une chute et à retrouver courage face aux obstacles. Pour les chrétiens, seul le Christ, le seul homme parfait, pourrait être autorisé à condamner. Pourtant, il n’a jamais condamné, mais a toujours accueilli, accompagné, pardonné et invité à la conversion.
Appel à la sainteté
Nous célébrons en ce mois de novembre la fête de la Toussaint. Les saints sont des femmes et des hommes qui se savaient aimés quoi qu’il arrive, qui savaient que Dieu avait déposé en eux sa force d’amour, son Esprit Saint, et qu’ils pouvaient le faire germer et porter du fruit en aimant les autres et en s’engageant afin de faire grandir la solidarité et la fraternité dans le monde. Les saints ne sont pas des gens parfaits, mais ils ont su se laisser travailler par l’énergie d’amour de Dieu. Ils nous sont donnés comme des signes de ce que nous sommes tous appelés à devenir : d’authentiques témoins de la Bonne Nouvelle. Il y a les saints officiels, reconnus par l’Église, qui ont des statues dans les lieux de cultes et leurs noms dans les calendriers, mais il y aussi tous les saints plus discrets, anonymes, que nous honorons en cette fête de la Toussaint, qui n’ont pas fait l’objet d’un procès de canonisation mais qui sont pour nous des repères. Nous en connaissons certainement dans notre entourage, dans nos familles. Ils sont importants pour nous car ils sont abordables ; nous pouvons nous identifier à eux. Nous savons qu’ils ne sont pas parfaits, ce ne sont pas des anges ni des êtres hors-sol, mais ils ont été capables de faire grandir en eux le cadeau de l’amour de Dieu et de le partager avec nous, même de manière très discrète et banale, dans le quotidien d’une vie normale, sans faire des choses exceptionnelles mais en vivant leur vie de manière extraordinaire. Nous sommes invités à mettre nos pas dans les leurs, à avancer vers une vie toujours plus habitée par la foi, l’espérance et la charité, sans prétention mais sans appréhension non plus devant cet idéal qui nous dépasse et peut nous impressionner. Il est normal – et même plutôt salutaire – que nous soyons pris de vertige devant la Bonne Nouvelle que les chrétiens annoncent, car elle nous propose une perfection de vie qui est au-delà de nos forces humaines. Mais dans la foi nous ne sommes pas livrés à nos propres forces, nous croyons que nous sommes habités par l’esprit d’amour de Dieu qui travaille en nous. La conversion consiste a laisser cette énergie grandir et s’épanouir dans nos vies et dans celle des autres. Pour cela il faut la reconnaître, l’accepter et consentir à la faire fructifier.
Olivier