On peut résumer la mission de l’Œuvre avec cette formule toute simple : « accompagner les jeunes ». Cette expression recouvre beaucoup de notions et nous pouvons l’expliciter.

Se faire proche
Accompagner, cela signifie marcher à côté, non pas devant comme un guide qui connait et fixe l’itinéraire, pas non plus derrière comme une voiture balai qui ramasse les morceaux et constate les dégâts après que la course est terminée, mais au même pas que l’autre, avec, et non en vis-à-vis. Dans la Bible, il y a une image agricole très significative : il s’agit du joug, une pièce de bois qui unit deux bêtes de somme qui tirent une même charrue. Elles se soutiennent l’une l’autre, et font à deux un meilleur travail que si elles étaient chacune avec leur propre charrue. Le Christ invite ses disciples à prendre sur eux son propre joug, donc à vivre en étant reliés à sa vie, et à comprendre qu’il marche avec eux, qu’il traverse leurs difficultés et leurs joies. C’est ce que l’on découvre tout au long des Évangiles : Dieu se fait homme et partage la vie ordinaire de toute personne, même si sa manière de vivre est extraordinaire. Nous sommes invités à vivre cette qualité de relation à notre tour, en particulier dans l’acte éducatif et dans la mission chrétienne.

Délicatesse et vigilance
Dans le cadre de l’Œuvre, nous avons le souci d’accompagner les jeunes dans leur croissance, en les aidant à être libres – nous avons déjà abordé la notion de liberté dans un précédent édito – tout en leur donnant les repères et les ressources qui leur permettront de traverser l’existence. C’est une attitude qui demande beaucoup de délicatesse, car entre le laisser-faire et le dirigisme, il y a une ligne de crête étroite. Cela demande une grande vigilance, car chaque personne est unique et parce qu’il n’y a pas une recette universelle en matière d’éducation. Pour une même personne, il faut s’adapter selon l’humeur, l’étape dans la croissance ou les événements de la vie.

Bienveillance et exigence
S’il n’y a pas de recette miracle, il y a des principes qui permettent de vivre cette mission. Le principale, c’est la bienveillance. Elle est difficile à quantifier, mais elle est un bon repère : si véritablement je veux du bien à l’autre, alors je saurai être attentif à le faire grandir en liberté, à ne pas le juger tout en lui disant ce que je crois important, à accepter qu’il puisse penser autrement que moi et faire d’authentiques choix. Un autre principe, qui peut paraître paradoxal quand on évoque la bienveillance, c’est l’exigence : la facilité n’est pas bonne conseillère, et il faut savoir donner le goût de l’effort. Cela ne peut se vivre que si l’autre nous voit marcher nous aussi dans cette voie de l’exigence. Il ne s’agit pas d’élitisme, de performance ou de masochisme. Une vie se fonde sur des choix et des engagements, qui sont parfois difficiles mais qui ont du sens car ils ont un objectif. L’accompagnateur se doit d’ouvrir un avenir et une route. C’est plus difficile que de rester dans son canapé ou de tourner en rond, mais c’est le seul moyen de prendre sa vie en main et de ne pas passer à côté de son existence.

Une dynamique commune
La merveille avec la notion d’accompagnement, c’est que tout le monde avance, l’éducateur tout autant que celui qu’il accompagne. Celui qui se fait proche pour accompagner avec délicatesse et vigilance, avec bienveillance et exigence, progresse tout autant que celui qu’il est supposé aider. Chemin faisant les deux se rendent comptent qu’ils sont en réalité dans la même dynamique : il n’y a pas un plus fort qui aide un faible, ils sont dans le partage et avancent ensemble. Ils ont été obligés de sortir de leur confort, de se mettre en marche et de se soutenir, parcourant de ce fait un nouveau chemin, inconnu pour l’un comme pour l’autre : l’un se trouve en capacité d’avancer et ose aller de l’avant, et l’autre parcours un nouveau sentier, qui n’aurait pas emprunté s’il était resté sur sa propre route.

Olivier