L’originalité de la foi chrétienne réside dans la compréhension que ce qui sauve le monde et l’humanité, c’est le pardon offert de manière absolue par Dieu. Il n’est pas besoin d’être chrétien, ni même croyant d’une autre religion, pour comprendre que la vie est plus belle lorsque l’on bon, juste, et vertueux. Même sans référence religieuse, l’idéal humain tend vers une vie bonne. Les sociétés sont fondées sur des principes de justice et de solidarité. Elles combattent le vol, le meurtre, le viol. Il est heureux que les religions prônent ces principes moraux indispensables et qu’elles invitent les croyants à les mettre en pratique dans une cohérence de vie en conformité avec le message de Dieu. En fait ces « valeurs » humanistes sont le socle commun de toute vie en collectivité et rassemblent les êtes humains. Pour le dire autrement, heureusement que les religions poussent les être humains à être des femmes et des hommes dignes de ce nom, les meilleurs possibles, bons et justes ! Mais ce n’est pas dans cette exigence qu’elles révèlent leur originalité.

La force de l’amour
L’apport des religions n’est pas, comme cela a trop souvent été le cas, de forcer les gens à mettre en pratique ces principes par peur d’une condamnation ou pour obtenir une récompense, avec les notions d’enfer et de paradis qui entrainent les croyants dans la dérive du mérite. Ce qui est original dans la dans la foi chrétienne notamment, c’est la notion de pardon et de conversion. Il n’est jamais trop tard pour bien faire et nous sommes tous appelés à mettre l’idéal en pratique, même si nous nous en sommes éloignés et que nous avons tourné le dos aux principes moraux des religions et des sociétés. C’est en cela que réside la puissance de Dieu. Ce n’est pas une puissance de force et de violence qui nous obligerait à faire des choses, qui déciderait des événements de notre vie sans respect de notre liberté ; c’est la puissance de l’amour qui n’a de cesse de donner confiance à celui qui se relève après être tombé, d’accueillir celui qui a fait fausse route mais qui revient dans le droit chemin. Dieu est tout puissant dans sa manière de ne jamais cesser de nous aimer et de nous ouvrir ses bras pour nous accueillir et nous rassembler. Bien des paroles, gestes et paraboles du Christ nous le font comprendre. C’est la Bonne Nouvelle chrétienne.

La mission de l’Église
L’Église, comme peuple de Dieu, a pour mission d’incarner cette Bonne Nouvelle ; par son ouverture, par son rappel des gestes et paroles du Christ, par sa manière de lutter contre les inégalités et les violences faites aux plus petits, par son souci de la justice sociale et écologique… Elle n’a pas pour mission de condamner ou de compliquer l’existence des gens par de pesants fardeaux rigoristes ou cultuels. Elle accompagne la marche des hommes vers l’idéal d’amour et de fraternité. Elle a aussi pour mission d’accompagner la marche de Dieu vers cette humanité qu’il aime de manière absolue et qu’il désire rassembler comme une grande famille. Ce qui doit permettre à l’Église de rester au service de cette Bonne Nouvelle, c’est qu’elle se rappelle qu’elle est constituée de femmes et d’hommes qui sont tous de la même pâte humaine, imparfaits, pêcheurs pardonnés. C’est lorsque les missionnaires et évangélisateurs savent se reconnaître bénéficiaires et sujets du pardon de Dieu qu’ils peuvent en parler le mieux et l’offrir à tous. Les apôtres ont vécu cette expérience, en particulier les deux piliers de l’Église que sont saint Pierre et saint Paul. Les grands saints n’ont pas eu une vie linéaire et parfaite. Tous ont expérimenté l’amour et le pardon de Dieu, et ils ont eu le désir de la partager et de lui faire porter du fruit.

La gratuité de l’amour
Si l’on devait réduire la religion à sa plus simple expression, il faudrait que ce soit autour de la notion d’amour et de pardon, ce pardon qui est la fine pointe de l’amour absolu offert par-delà le mal. Avec le pardon nous sommes dans la gratuité extrême, car il est toujours facile d’aimer ceux qui sont aimables, de soutenir ceux qui se comportent bien, d’accueillir ceux qui sont méritants. Mais aimer sans condition, de manière unilatérale, c’est au-delà des forces humaines, et c’est en cela que c’est le propre de Dieu et qu’il a voulu partager cette puissance d’amour avec nous pour que nous dépassions notre condition humaine pour sortir du cycle infernal de la condamnation, de la violence et de la vengeance. La foi chrétienne nous invite à recevoir de Dieu sa puissance d’amour et de pardon pour changer le visage du monde. Cela reste un combat, car nous sommes très rarement capables de mettre en œuvre cet amour de manière aussi radicale que Jésus-Christ qui invoque le pardon sur ceux qui le torturent et le tuent. Mais c’est un chemin qu’il nous est demandé d’emprunter. Chemin difficile et terriblement exigeant, mais qu’il ne faudrait pas abandonner par fatalisme et découragement. En cela nous pouvons comprendre que parler d’amour en évoquant Dieu n’a rien de niais ou de ridicule, car cela demande un courage et une force que nous ne pouvons que recevoir d’un autre, du tout Autre.

Olivier