Il est difficile de parler d’engagement de nos jours. L’incertitude quant à l’avenir, les diverses crises que nous traversons et qui se juxtaposent, qu’elles soient sanitaires, sociales, politiques, géopolitiques, spirituelles, familiales ou religieuses, nous plongent dans une ambiance morose et pessimiste qui peut être source de démission et d’inquiétude. Le premier réflexe quand on est en pleine chute est souvent de se replier sur soi-même. Pourtant l’oiseau apprend dès son premier saut dans le vide à se faire confiance et à faire confiance aux éléments : il lui faut prendre le risque d’ouvrir ses ailes pour ne pas s’écraser au sol comme un caillou. Pour nous aussi, la réaction première face aux difficultés est le repliement, mais cette solution ne nous permet pas de traverser les crises et les difficultés de notre temps. Le repli nous rassure mais il nous enferme et ajoute une crise existentielle aux différentes crises auxquelles nous sommes déjà confrontés, car l’homme n’est pas fait pour vivre seul ni centré sur lui-même, il est un être de relation et de partage. Ainsi nous pourrions concevoir qu’une manière de lutter contre les crises de notre temps serait de prôner l’engagement, car s’engager c’est s’ouvrir aux autres, avoir confiance en ses propres capacités, se projeter vers l’avenir, même si cela représente un risque et ne va pas dans le sens de la facilité.
L’engagement de Dieu
Les religions nous donnent à découvrir et à comprendre que Dieu lui-même s’engage dans une relation risquée avec l’humanité : il se révèle, dans la Bible et en particulier dans les Évangiles, comme le Dieu de la relation. Il fait alliance avec un peuple qui n’est pas moins humain, faillible et pécheur que les autres. Il ne choisit pas le peuple hébreu pour ses vertus morales, spirituelles ou politiques, mais parce qu’il est touché par sa misère et par l’injustice dont il est victime. Dieu ne fait pas un placement avec assurance de retour sur investissement, mais il s’engage à accompagner le peuple juif quoi qu’il arrive, malgré ses faiblesses et dans ses pires épreuves.
L’Église signe de l’engagement de Dieu
Nous pouvons découvrir cet engagement de Dieu envers le monde dans ce que vit l’Église, qui est aussi faillible, et qui renvoie un reflet de ce qu’est le monde : appelée à la sainteté, elle reste pourtant marquée par ce qu’il peut y avoir de plus médiocre dans l’humanité. Mais elle ne baisse pas les bras et ne se replie pas sur elle-même, au contraire elle fait le choix de l’ouverture au monde, elle donne la priorité aux pauvres et aux petits, elle se remet en cause et cherche à se convertir elle-même la première avant de se permettre de juger et de condamner les autres. Ce n’est pas gagné et loin d’être accompli, mais c’est le chemin sur lequel elle est engagée à la suite du Christ, chemin qui a été particulièrement promu lors du concile Vatican II dans les années 1965, chemin que les papes ont poursuivi depuis et que le pape François à la charge prophétique de nous rappeler. Ce chemin ne concerne pas seulement Église, car elle se veut un signe de ce vers quoi doit tendre toute l’humanité. Elle préfigure l’avenir offert à notre monde et elle est le moyen de transformation de ce monde qui est appelé à devenir l’accomplissement du Royaume de Dieu.
L’engagement source de joie
À l’Œuvre, nous avons la chance d’être témoins que l’engagement est source de joie et de sens. C’est un émerveillement de voir des adolescents capables de s’engager au service des plus jeunes, de donner de leur temps et de leur énergie pour accompagner les enfants sur leur chemin de croissance. Le choix n’est pas toujours simple et les épreuves en cours de route restent présentes, car l’engagement n’est pas facile à assumer et il induit des renoncements, mais quelle merveille de voir des jeunes qui découvrent la joie du don de soi et qui comprennent que c’est la source d’un authentique bonheur. Quand certains désespèrent de notre société et ont le sentiment que rien ne va plus, nous pouvons témoigner de la grande espérance qui nous habite lorsque nous voyons de quoi sont capables les jeunes de notre temps. Oui, l’Esprit d’amour de ce Dieu qui s’engage, tel que nous le révèle Jésus Christ, habite notre monde et reste bien présent et actif. Nous sommes invités à accompagner joyeusement l’engagement de Dieu envers le monde par nos propres engagements.
Olivier