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LA SEMAINE SAINTE :
SEMAINE DE CONTEMPLATION

1. La Semaine Sainte commence le dimanche des Rameaux.
Jésus entre à Jérusalem, acclamé par une foule de disciples et d’amis comme le Messie : Celui qui vient au nom du Seigneur. Ils étendaient des branches de rameaux sous ses pas en son honneur C’est après coup que les disciples ont compris : Jésus n’a pas l’habitude de se faire acclamer, mais ce jour-là il l’a fait exprès, et dans un comportement inattendu : le Messie monté sur un ânon – le contraire des rois puissants avec chars et chevaux ; il mettait en scène la prophétie de Zacharie : « Exulte de toutes tes forces, fille de Sion ! Pousse des cris de joie, fille de Jérusalem ! Voici ton roi qui vient à toi : il est juste et victorieux, pauvre et monté sur un âne, un ânon, le petit d’une ânesse ». L’entrée des Rameaux, c’est l’entrée dans notre histoire de « Jésus, doux et humble de cœur », qui substitue la douceur à la violence pour instituer la paix.
Nous écoutons ensuite le récit de la Passion, en saint Matthieu cette année. Comme le récit de Marc, il laisse voir en Jésus le modèle des justes, innocents, exposés, moqués, violentés, dont Dieu est le seul recours, comme dans la prière de s Psaumes qui est sur ses lèvres – et le modèle des prophètes rejetés avant d’être reconnus : ils le seront seulement après leur mort ; dans le récit de Matthieu, au moment où Jésus meurt, « les tombeaux s’ouvrent et de nombreux corps des trépassés ressuscitent » ; manière symbolique de dire le salut final inauguré par la mort de Jésus.

2. Le Jeudi saint célèbre l’engagement personnel de Jésus dans sa Pâque
Ce qui sera vécu à l’extérieur, en public, est d’abord anticipé dans l’intimité du cercle des disciples. C’est cet engagement personnel qui donne sens à la Passion. Avant d’être livré, c’est lui qui se livre. Le Jeudi saint, c’est la Passion dans le secret par les gestes de Jésus à portée hautement symbolique (ce qui ne veut pas dire irréels) : l’eucharistie et le lavement des pieds. À la manière des prophètes Jésus accomplit des actions symboliques, actions dans lesquelles il s’engage.
• Dans le pain partagé et la coupe, il se donne personnellement, il donne part à sa vie donnée par amour. Son geste accomplit le sens du rite de l’agneau pascal (1re lecture) : inaugurer la délivrance et le passage vers la liberté en entraînant dans sa Pâque ceux qui se laissent marquer par le don de sa vie.
• Le lavement des pieds, avant d’être un exemple et pour être un exemple, est d’abord un symbole du service par lequel Jésus sur la croix va purifier l’humanité : « Si je ne te lave pas, tu n’auras pas de part avec moi ».
Après la Cène du jeudi soir, la communauté se rend au reposoir pour accompagner Jésus dans sa prière de Gethsemani. Prière de détresse mais aussi d’abandon confiant au dessein du Père.

3. Le Vendredi saint célèbre la croix
Cette liturgie est d’abord une grande liturgie de la Parole, suivie de la prière universelle, qui se veut la plus universelle possible en accord avec l’ouverture sans limite des bras étendus du Crucifié.
La première lecture évoque la quatrième Chant du Serviteur dans le livre d’Isaïe (Is 52, 13 – 53, 12). Est-ce Israël ? Est-ce un prophète singulier ? En tout cas, il est ce « serviteur de Dieu » dont les gens n’ont pas saisi, sur le moment, pourquoi il était à ce point affligé, humilié, meurtri, méprisé de la naissance à la mort. Après coup ils se rendent compte que son destin n’était pas une punition divine, mais un acte de solidarité spirituelle avec eux, pécheurs, qui leur valait le pardon en provoquant leur conversion. Celui qui n’avait plus d’apparence humaine était devenu l’homme-pour-tous. En sa passion Jésus « remplit » cette figure.
La deuxième lecture est empruntée à l’épître aux Hébreux avec cette phrase magnifique : « tout Fils qu’il était, il apprit par ce qu’il souffrit ce que c’est que d’obéir ». Dans les passages qui précèdent, l’auteur explique la raison d’être de cette souffrance : le Fils de Dieu voulait être le frère des hommes.
Puis le récit de la Passion selon saint Jean met en relief la liberté souveraine de Jésus ; c’est lui qui se livre quand on vient l’arrêter (« Je-Suis ») ; devant Pilate on ne sait plus qui est interrogé et qui interroge ; il porte lui-même sa croix ; il confie l’un à l’autre sa mère et le disciple bien-aimé pour constituer le noyau de la communauté des croyants avec le groupe des femmes qui sont là ; il meurt avec la conscience d’avoir tout accompli ; il ne rend pas le souffle, il livre l’Esprit.

4. Le saint Samedi : que se passe-t-il aujourd’hui ? Grand silence sur la terre !
Pas de célébration liturgique, mais la contemplation du Christ Jésus qui descend victorieux aux enfers. « C’est le premier homme qu’il va chercher comme la brebis perdue. Il veut aussi visiter ceux qui sont confinés dans les ténèbres et dans l’ombre de la mort. Oui c’est vers Adam captif, en même temps que vers Eve captive, elle aussi, que Dieu se dirige… Lorsqu’il le vit, Adam, le premier homme, se frappant la poitrine dans sa stupeur, s’écria vers tous les autres : Monseigneur avec nous tous ! Et le Christ répondit à Adam : et avec ton esprit ».
Dialogue stupéfiant qui inverse notre salutation liturgique, parce qu’il inverse les positions habituelles de Dieu et de ses créatures. Le confinement actuel est une invitation à vivre cette année le samedi saint comme un temps de silence, d’étonnement et d’accueil devant ce Dieu qui descend au plus bas de notre condition humaine pour nous rendre notre dignité.

5. La nuit pascale
Nuit pour célébrer la résurrection, celle de Jésus, mais aussi la nôtre par la célébration des baptêmes. « Si le grain de blé tombe en terre et meurt il porte beaucoup de fruits ». La veillée pascale, appelée à se prolonger jusqu’à l’aurore, relit toute l’histoire du salut depuis la première création jusqu’à la nouvelle création, parce que c’est le livre de notre vie. En cette nuit nous pourrons nous arrêter personnellement davantage à telle ou telle de ces lectures parce qu’elle dit davantage un moment de notre histoire : appel à la vie ; passage de la mer pour la liberté ; épreuve où comme Abraham j’ai été amené à tout donner et où j’ai tout reçu ; expérience de l’exil, de l’éloignement de Dieu, qui a été, par grâce, lieu de pauvreté pour accueillir l’Esprit de la résurrection. À vivre dans une immense action de grâces.

Paul Bony
2 avril 2020