Olivier

À propos de Olivier

Cet auteur n'a pas encore renseigné de détails.
Jusqu'à présent Olivier a créé 356 entrées de blog.

Édito Avril 2022 > Plus fort que la haine

La période que nous traversons est marquée par un climat international et social très violent. La guerre est à nos portes et nous fait prendre conscience que les divers conflits qui ont marqué ces dernières années, s’ils étaient géographiquement plus éloignés et que nous nous identifiions moins à ces populations qu’à celle d’Ukraine, sont le signe que l’ère de paix et de justice que nous pensions atteinte reste fragile. La violence sociale est aussi un marqueur inquiétant : il suffit d’un prétexte pour que les gens laissent exploser une brutalité qui semble disproportionnée, on l’a vu à la marge des manifestations des gilets jaunes ou lors des mouvements contre les mesures sanitaires, on le voit en Corse en ce moment. La violence reste prégnante et trop souvent une solution instinctive de gestion des conflits.

L’attitude de Jésus
La fête de Pâques que nous allons célébrer nous donne à voir une autre manière de résoudre les conflits, solution apparemment infructueuse mais qui pourtant s’attaque à la racine du mal et refuse d’utiliser les mêmes armes que celles qui sont au service de la violence. Le Christ, en souffrance sur la croix, torturé et condamné à mort alors qu’il est innocent, invoque l’amour et le pardon. Il ne prend pas les armes, n’oppose aucune haine face à ceux qui le font souffrir ou qui le trahissent. Solution qui semble inefficace à première vue, et cependant porte un fruit plus durable que la violence, qui, elle, stoppe le conflit par sidération de l’ennemi sans éteindre le feu de la violence qui couve et qui peut reprendre son inexorable office dès qu’on arrête de l’étouffer.

La force de l’amour
Les personnes qui travaillent dans les milieux violents savent bien que le meilleur moyen de lutter contre le mal à long terme, c’est de le combattre à sa source et de refuser d’utiliser toute manœuvre violente pour le maitriser. Les sociétés qui sont les plus répressives ne sont pas à l’abri de la récidive et de l’escalade de la violence, au contraire. Le régime de la peur et du punitif porte des fruits à court terme, mais en instituant l’usage de la force et de la violence dans les structures de l’État on banalise le mal et on lui donne une légitimité qui engendre son escalade. Ce que le Christ a mis en œuvre n’est pas seulement une attitude de non-violence spirituelle et idéaliste réservée aux personnes qui aspirent à la sainteté : son attitude trouve un écho dans une réflexion humaine sur la gestion des conflits et des relations humaines. En cela la foi et la raison se rencontrent et aboutissent à la même conclusion : pour combattre la haine, la seule solution, c’est l’amour. Cela semble utopique et naïf, mais ce n’est pas une raison pour ne pas y réfléchir à deux fois avant de réagir trop vite face à la violence.

L’autre doit rester 
un prochain
Nous savons d’expérience que la réaction naturelle et instinctive face à la violence est la fuite ou l’affrontement, qui l’une et l’autre entérinent la rupture de la relation. Le Christ nous invite à mettre en œuvre une troisième voie, qu’il illustre avec un exemple choquant qui nous pousse à réfléchir : « Si quelqu’un te frappe sur une joue, présente-lui aussi l’autre ». En fait, il propose de continuer à faire face à l’adversaire, c’est-à-dire de ne pas fuir, mais sans entrer dans le cycle infernal de l’escalade de la violence. Il nous dit qu’il y a plus de courage et de force à ne pas répondre à la violence par la violence tout en maintenant la relation. L’autre doit rester un prochain.

Suivre le Christ
Jésus Christ a parfaitement mis en œuvre cette attitude, et nous sommes invités à mettre nos pas dans les siens. Nous sommes conscients que l’idéal qu’il a su si bien vivre est hors de notre portée, du moins si nous ne nous appuyons que sur nos propres forces. La foi nous invite à accepter humblement de recevoir de Dieu la force qui nous permettra de dépasser nos résistances, non pas pour devenir des humains supérieurs, mais pour accomplir notre humanité. Chercher à avancer sur le chemin de la sainteté, ce n’est pas autre chose que de devenir de plus en plus humain. Pour les chrétiens, l’humanité atteint sa parfaite consécration en Jésus Christ. Nous savons que nous ne serons jamais parfaits en ce monde, mais nous sommes invités à tendre vers cet accomplissement, avec l’espérance que, pas à pas, notre marche prend sens et que nous cheminons vers la mise en œuvre de notre humanité, en fidélité au projet de Dieu.

Olivier

2022-03-26T08:58:18+01:00

L’Évangile du mois d’avril 2022

Lisons ensemble un extrait de l’Évangile de la Passion que nous entendrons le dimanche des Rameaux.

Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc

C’était déjà environ la sixième heure ; l’obscurité se fit sur toute la terre jusqu’à la neuvième heure, car le soleil s’était caché. Le rideau du Sanctuaire se déchira par le milieu. Alors, Jésus poussa un grand cri : « Père, entre tes mains je remets mon esprit. » Et après avoir dit cela, il expira. À la vue de ce qui s’était passé, le centurion rendit gloire à Dieu : « Celui-ci était réellement un homme juste. » Et toute la foule des gens qui s’étaient rassemblés pour ce spectacle, observant ce qui se passait, s’en retournaient en se frappant la poitrine. Tous ses amis, ainsi que les femmes qui le suivaient depuis la Galilée, se tenaient plus loin pour regarder.
Alors arriva un membre du Conseil, nommé Joseph ; c’était un homme bon et juste, qui n’avait donné son accord ni à leur délibération, ni à leurs actes. Il était d’Arimathie, ville de Judée, et il attendait le règne de Dieu. Il alla trouver Pilate et demanda le corps de Jésus. Puis il le descendit de la croix, l’enveloppa dans un linceul et le mit dans un tombeau taillé dans le roc, où personne encore n’avait été déposé. C’était le jour de la Préparation de la fête, et déjà brillaient les lumières du sabbat. Les femmes qui avaient accompagné Jésus depuis la Galilée suivirent Joseph. Elles regardèrent le tombeau pour voir comment le corps avait été placé. Puis elles s’en retournèrent et préparèrent aromates et parfums. Et, durant le sabbat, elles observèrent le repos prescrit.

Le contexte

Nous sommes à la fin du récit de la Passion. Le bon larron vient de demander à Jésus de se souvenir de lui quand il sera dans son Royaume. Jésus l’accueille et le bon larron sera au fond le premier sauvé.

Les signes qui accompagnent la mort de Jésus
Le signe des ténèbres rappelle ce que Jésus avait dit : c’est l’heure des Ténèbres en plein midi. De plus, le rideau du temple est déchiré. La séparation entre l’humain et le divin est à jamais abolie.

La mort de Jésus
Dans la bouche de Jésus un grand cri mais c’est un cri de confiance : « Père, entre tes mains, je remets mon esprit » Remarquons que deux paroles de Jésus encadrent le récit de son exécution : une parole de pardon au moment du crucifiement et une parole de remise de soi entre les mains du Père au moment de la mort. Père ? Jésus l’avait appelé ainsi lorsqu’à douze ans, il était venu au Temple et avait dialogué avec les docteurs de la Loi. La boucle est bouclée…

La réaction du centurion
Le centurion romain dit de Jésus que c’est un homme juste, et cela correspond exactement à l’un des traits majeurs du Christ de Luc dans le récit de la Passion, ce qui, en plus, le rapproche des croyants qui ont à vivre ce même itinéraire.

La conversion du peuple
Dans un premier temps, Luc mentionne « le peuple » qui s’était joint aux membres du tribunal religieux pour réclamer la mort de Jésus devant Pilate. Ensuite, il fait remarquer que le « peuple » observait durant la crucifixion mais sans se moquer comme les chefs. À la fin, Luc parle des « foules » qui repartent en se frappant la poitrine. Ainsi, par petites touches est soulignée les premiers fruits de la crucifixion de Jésus au profit du peuple présent lors de sa Passion.

Joseph d’Arimathie
Le récit de la mise au tombeau permet à Luc de caractériser Joseph d’Arimathie comme un homme droit et juste. Son courage le compromet en demandant à Pilate de descendre le corps de Jésus pour l’ensevelir. Après les ténèbres de midi, brillent déjà les lumières du sabbat. « Or, Marie de Magdala et Marie, mère de Joset, regardaient où on l’avait mis ». L’histoire est finie ou plutôt elle ne fait que commencer. Ces lumières nous préparent à recevoir la nouvelle incroyable de la Résurrection.

Récit d’un juste persécuté
En parlant de Juste persécuté, Luc veut faire de Jésus un exemple et un modèle à suivre. C’est ainsi que Jésus le Juste exhorte à la conversion ou que le bon larron nous apprend à prier à l’heure de notre mort. Simon de Cyrène est le type du disciple qui apprend à « porter la croix derrière Jésus ». Le récit de l’Agonie propre à Luc s’ouvre et se clôt par l’exhortation à prier…
Tout dans le récit de Luc indique que la Passion de Jésus n’est pas seulement un événement du passé. Comme lecteurs ou auditeurs, nous sommes invités à suivre et vivre ce « chemin de croix ».

Didier Rocca

Le mot du jour : Heure

Attention à l’époque, les montres, les minutes et encore moins les secondes n’avaient pas été définies. Il faudra attendre pour cela le xvie siècle. À l’époque de Jésus, la journée était divisée en douze heures de jour. La durée de ces heures variait selon les saisons et la latitude. Ainsi, l’été, les heures en journée étaient plus longues. Autour de la fête de Pâques, la 6e heure correspond à peu près à midi et la 9e heure un peu avant 15 h.

2022-03-26T09:01:05+01:00

Édito Mars 2022 > Le péché

Le temps du carême est souvent associé à la conversion et à la notion de péché. Il ne peut se réduire à cela car il est aussi un temps de joie et de retour sur soi pour que nous ne passions pas à côté de l’essentiel dans notre vie. Mais je voudrais en profiter pour insister sur l’attitude que les chrétiens peuvent avoir vis-à-vis du péché.

Pardon

Trop souvent, on parle de culpabilité judéo-chrétienne au sujet de cette notion, alors que réduire le message chrétien à du moralisme revient à le dévoyer. Il est évident que les croyants sont invités à avoir une vie bonne, et donc à lutter contre les compromis avec le mal, mais ce n’est pas l’apanage des religions que de prôner la morale et le bien-vivre ensemble. Tout système de vie collective, toute institution invite à la vie bonne, à la justice et à l’honnêteté. Donc si les religions parlent du mal, c’est avec une particularité : la notion du pardon et du relèvement après la chute. Nous découvrons cela tout au long de l’itinéraire du peuple juif accompagné par Dieu qui n’a de cesse de le remettre sur le droit chemin malgré ses égarements, ses erreurs et ses trahisons. Dans la Bible on découvre comment Dieu ne rompt jamais l’alliance alors que le peuple hébreu lui tourne le dos régulièrement et s’obstine à ne pas lui obéir. Le désir de Dieu n’est pas de punir mais de redresser, de remettre sur le droit chemin, et il passe par les prophètes pour mettre en œuvre cette relation avec le peuple élu. Le Christ aussi s’est fait proche des personnes qui étaient loin du droit chemin de la morale juive. Il a partagé leur vie, il a vécu à leur hauteur, il leur a montré que Dieu les aimait de manière inconditionnée et qu’il ne les rejetait pas. Si Jésus parle aux pécheurs et aborde souvent la question du mal, c’est pour mieux combattre le péché et libérer l’homme afin qu’il reprenne sa vie en main.

Liberté

Il peut sembler parfois que nous sommes obsédés par le mal, alors que si nous en parlons, c’est pour le combattre et parce que nous voulons que le bien, le bon et le beau l’emportent dans notre vie. Et pour cela nous devons regarder notre vie en vérité car le péché est ce qui nous défigure, ce qui empêche notre authentique visage d’apparaître au grand jour, et surtout à nos propres yeux. C’est l’écran qui nous sépare de ce que nous sommes appelés à devenir, chaque jour. Nous pouvons faire la comparaison avec le médecin qui s’intéresse aux maladies non par amour des virus, des microbes, des cancers ou des traumatismes, mais pour les combattre et parce que son objectif est de préserver ou faire recouvrer la santé. Ou encore la personne chargée du nettoyage d’un lieu : elle n’est pas passionnée par la saleté mais doit la prendre en compte pour s’en débarrasser. Il en est de même pour le péché. Si nous l’évoquons, si nous en parlons, ce n’est parce qu’il nous intéresse ou que nous en faisons une obsession, mais c’est pour le combattre et nous en libérer.

Accompagner

Sans doute devrions-nous être plus attentifs à notre manière d’évoquer ces questions sensibles. Les personnes que nous rencontrons sont parfois porteuses de fardeaux de culpabilité qui les empêchent d’avancer. Lorsque nous ajoutons du poids sur leurs épaules, nous ne les aidons pas et nous ne sommes pas fidèles au Christ. Si l’Église a un rôle à jouer pour accompagner les personnes qui traversent des périodes douloureuses, ce n’est pas en ajoutant de la culpabilité, mais en soulageant. Nous avons tous des exemples de personnes qui pensent qu’elles sont rejetées par Dieu parce qu’elle n’ont pas suivi la « bonne morale chrétienne ». Elles se sentent jugées et condamnées, alors que personne ne peut s’arroger le droit de condamner un autre individu. On peut juger des actes et des faits, mais la personne ne se réduit pas à ses actes ni à ses gestes. Jésus a critiqué des attitudes, mais il n’a jamais rejeté ou condamné quelqu’un. Si le Christ, Dieu incarné, ne l’a pas fait, comment l’Église, constituée d’hommes pécheurs, pourrait-elle se le permettre ? Elle commettrait un blasphème !

Humilité

C’est avec une immense humilité que nous devrions poser un regard sur l’existence des autres, car nous ne sommes pas meilleurs et surtout parce que nous ne sommes pas à leur place. Que savons-nous de l’itinéraire d’une personne, de son histoire, de l’enchaînement des événements qui l’ont amenée à prendre telle ou telle décision ? Dans la même situation, aurions-nous fait d’autres choix, aurions-nous évité de commettre les mêmes erreurs ? Nous ne pouvons pas le savoir, nous ne sommes pas à leur place. Et si nous regardons notre vie avec objectivité, pouvons-nous dire que nous sommes meilleurs ? Que nous avons plus de mérite que les autres ? Notre mission n’est pas de nous mettre à la place de Dieu, mais de nous mettre au service de son projet : accueillir toute personne comme une sœur ou un frère, fille et fils de Dieu comme nous, aimée de manière inconditionnée, rendue capable du meilleur parce que consciente de cet amour absolu et gracieux qui ne veut que notre bien. Puissions-nous, au long de ce carême, nous convertir à cette manière de vivre selon le désir de Dieu.

Olivier

2022-02-22T08:42:37+01:00

Lettre du Villard – février 2022

Lettre du Villard

Le Villard, le 15 février 2022

Mon cher,
Je n’ai pu m’empêcher hier de lire de larges extraits de votre lettre à nos amis du Villard que nous avions retrouvés chez Me Beraud pour marquer avec un peu de retard la Chandeleur et avec un peu d’avance Mardi Gras. Chacun avait apporté quelques pâtisseries, si bien que nous nous sommes retrouvés devant une table chargée de crêpes, de bugnes, de merveilles, d’oreillettes, de navettes et de beignets. Votre lettre a heureusement permis d’élargir notre horizon au-delà des recettes de cuisine.
Vous nous faites découvrir l’étrange cours qu’a pris le fil de vos idées à partir du moment où votre imagination a donné un sens inattendu à l’affichette « Attention Angles morts » que vous veniez de lire sur le flanc d’un poids lourd que vous dépassiez. « On peut, bien sûr », notez-vous, « en rester au sens littéral et considérer que l’angle mort est une zone du champ de vision qui échappe au conducteur dont un écart de conduite peut vous causer un dommage. Sans que je comprenne pourquoi, cependant, un autre sens s’est révélé, un peu comme lorsque, par le passé, l’image des négatifs photos naissait dans le bain du révélateur. L’angle mort m’est apparu comme ce que, dans notre vie, nous ne voyons pas, non par l’effet de notre volonté mais par insouciance, par insensibilité ou par culture. Les angles morts de notre caractère, notre manque d’attention, font que nous pouvons, sans malice, blesser telle ou telle personne. Il y a également les angles morts de notre intelligence ; certains ont été dotés par la nature d’angles morts… disons assez larges. Comment, après cela, s’étonner s’ils ne voient pas le mal qu’ils peuvent causer ? Je pense ici aux enfants dont l’avenir est gâché par des parents frustes, dont de multiples angles morts restreignent le champ de l’intelligence. Et comment expliquer sinon par l’étendue des angles morts du jugement la crédulité des citoyens aux approches des élections ? Voyez, en d’autres domaines, les effets qu’ont pu avoir les angles morts culturels. Certains de nos colonisateurs du xixe siècle ne se doutaient pas des angles morts que comportait leur politique. Souvenez-vous des propos de Jules Ferry1. Et encore, il était franc-maçon ! »
Me Beraud a approuvé et a poursuivi en faisant remarquer que certains angles morts, qui ne sont pas innocents, ne constituaient pas une gêne pour ceux qui en étaient affectés. « Sans vouloir tomber dans le sensationnalisme, voyez les informations qu’on nous déverse actuellement au sujet des EHPAD. Tout le monde sait depuis longtemps que certains établissements ne fonctionnent pas correctement ; mais cela arrange la société de ne pas savoir, de se comporter comme si quelque chose lui avait été caché, comme si elle ne voyait pas ». « Oh ! fit Gastinel, il n’est pas nécessaire d’accabler la société ; nous sommes assez forts pour rétrécir notre champ visuel quand ça nous arrange. Nous nous fabriquons des angles morts pour éviter ce que nous ne voulons pas voir, ce que nous ne voulons pas entendre, ni comprendre ». Poulenc remarqua, après avoir tourné longuement sa cuillère dans sa tasse de thé, qu’il serait prudent, avant de prendre des décisions importantes ou d’arrêter des positions de principe, d’avoir la curiosité d’examiner les angles morts qu’ils peuvent comporter. Ne serait-ce que pour s’assurer de leur incidence ultérieure sur nos jugements, nos comportements, ou nos affections.
Gastinel revint sur votre observation relative aux angles morts en période électorale. « Je ne peux pas croire, poursuivit-il, que ceux qui aspirent à la magistrature suprême et qui, quoi qu’en disent certains, sont tous intelligents, pensent que, sous leur impulsion, le pays parviendra à réaliser ce qu’ils promettent. Les angles morts ne manquent donc pas dans leurs propositions. Pour essayer de voter de façon à peu près raisonnable, je tente donc d’imaginer les conséquences inattendues, involontaires ou délibérément cachées, de ce qu’ils proposent… » « Et alors ? » fit Béraud. « Pour rester dans le domaine automobile, je vous répondrai que j’aimerais bien garder mes distances… Mais nous sommes dans un flot de véhicules qui vont trop vite, où la moindre embardée peut provoquer un accident ». « Je ne sais, dit Poulenc, si c’est ce que vous aviez en tête, mais la primaire populaire, qui vient de donner, sinon une légitimité, du moins une tribune à une personne dont les partis politiques de gauche se seraient bien passé, me paraît ressortir de la catégorie des embardées qui peuvent générer de graves accidents. Ce genre d’initiative est une machine de guerre contre la démocratie représentative qui est certes imparfaite mais qui évite que celui qui crie le plus fort ou qui a les plus gros bras l’emporte sur les autres ». « Je vous suis parfaitement, dit Béraud, mais je crains que ceux qui n’ont pas vu les travers de cette désintermédiation2 aient ouvert une nouvelle boîte de Pandore ». Mimiquet qui, jusque-là s’était contenté de comparer les bugnes de Savoie aux merveilles de Gascogne, s’invita dans la conversation en demandant si un mouvement comme la primaire populaire ne pouvait pas également être considéré comme une réaction à la façon dont les partis dits de gouvernement baissent les bras devant la technocratie. « Et pourtant ! fit Beraud. Nous avons besoin de politique dépassionnée ! Cedant arma togae !3 » « Ce qui veut dire ? » « Cela veut dire pour moi, à peu près, que la technocratie doit aider la raison à l’emporter sur la passion ». « Si vous voulez, mais qui comprend le langage des technocrates ? » reprit Mimiquet. « C’est un truc pour faire croire à ceux qui ne jargonnent pas comme eux qu’ils n’y connaissent rien ! Souvenez-vous des pédagos qui désignaient un ballon comme un « référentiel bondissant » et le crayon comme un « outil scripteur » ! « En cette année Molière, fit remarquer Beraud, cela ne nous fait-il pas souvenir du langage des médecins du xviie siècle dont il s’est moqué dans le Malade imaginaire, et qui n’avait d’autre objet que de masquer leur ignorance. Je n’irai pas jusqu’à dire que le langage technocratique ne vise pas à autre chose, mais on peut parfois penser que… »
Comme vous pouvez le constater, cher ami, vos considérations à partir d’une affichette collée sur un camion ont nourri les débats du Villard. !
Cordialement.

P. Deladret

  1. Discours à la Chambre du 28 juillet 1885
  2. Désintermédiation : en ce sens, marginalisation des corps intermédiaires, partis, syndicats, etc.
  3. Cedant arma togae : « Que les armes cèdent devant la toge ! », Ciceron.
2022-04-25T15:03:11+02:00

L’Évangile du mois de mars 2022

 

Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc

Un jour, des gens rapportèrent à Jésus l’affaire des Galiléens que Pilate avait fait massacrer, mêlant leur sang à celui des sacrifices qu’ils offraient. Jésus leur répondit : « Pensez-vous que ces Galiléens étaient de plus grands pécheurs que tous les autres Galiléens, pour avoir subi un tel sort ? Eh bien, je vous dis : pas du tout ! Mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même. Et ces dix-huit personnes tuées par la chute de la tour de Siloé, pensez-vous qu’elles étaient plus coupables que tous les autres habitants de Jérusalem ? Eh bien, je vous dis : pas du tout ! Mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même. » Jésus disait encore cette parabole :
Quelqu’un avait un figuier planté dans sa vigne. Il vint chercher du fruit sur ce figuier, et n’en trouva pas. Il dit alors à son vigneron : « Voilà trois ans que je viens chercher du fruit sur ce figuier, et je n’en trouve pas. Coupe-le. À quoi bon le laisser épuiser le sol ? » Mais le vigneron lui répondit : « Maître, laisse-le encore cette année, le temps que je bêche autour pour y mettre du fumier. Peut-être donnera-t-il du fruit à l’avenir. Sinon, tu le couperas. »

Le contexte

Luc présente son Évangile comme une longue montée de Jésus vers Jérusalem jalonnée de rencontres, de gestes qui nous permettent, à nous lecteurs, de saisir peu à peu qui il est. Au début du chapitre 13, Jésus est en dialogue au sujet de l’actualité locale du moment…

L’affaire des Galiléens

Au-delà de sa violence, ce fait divers est marquant parce que cette répression a eu lieu dans l’enceinte du Temple et le sang des victimes a été mélangé avec celui des animaux. Or, dans la tradition du judaïsme, ce qui  touche au sang est sacré et ce mélange est une profanation.

La faute à qui ?

Dans ces moments si douloureux, des questions surgissent : « Ceux à qui il arrive malheur, sont-ils plus coupables que les autres ? » ou « cette épreuve est-elle une punition ? ». La question du mal est une question cruciale pour les croyants et Jésus s’empare de ce sujet avec clarté. La faute et la souffrance ne sont pas deux notions qui sont systématiquement reliées. Un bébé qui agonise, un innocent qui meurt nous empêchent de penser ce lien absurde.

Jésus refuse d’entrer avec ses interlocuteurs dans un débat sur Dieu et le mal. En revanche, il les renvoie à l’urgence de leur propre foi. Ils n’ont qu’une vie et s’ils ne lui donnent pas du sens, elle disparaitra.

La tour de Siloé

Par la mention de cet accident, Jésus radicalise son propos. Si les Galiléens pouvaient être soupçonnés d’être de mauvais croyants, ici ce n’est pas le cas. Si Pilate est responsable du massacre dans le temple, qui est responsable de l’effondrement de la tour, sinon Dieu ?

Jésus apporte la même réponse : Si vous ne sortez pas de cette compréhension d’un Dieu qui punit les victimes du mal, vous deviendrez les victimes de votre façon de penser !

Comment actualiser ? Demande-toi, si tu savais que la vie s’arrêtait aujourd’hui, que ferais-tu ? Ce que tu ferais alors, fais-le maintenant. N’attends pas !

La parabole du figuier stérile

La stérilité du figuier renvoie au manque de conversion, au fait de rester passif devant le mal. La réaction du propriétaire n’est pas étonnante. Devant la stérilité du figuier, l’attitude la plus raisonnable est de le couper. Il se passe alors quelque chose d’inattendu. Le vigneron intercède auprès du maitre en faveur du figuier. Si le propriétaire est Dieu, le vigneron est le Christ. Il n’a pas été envoyé pour détruire mais pour soigner.Le sens de cette parabole est clair. Si nous ne portons pas de fruit, nous occupons la terre inutilement. De quels fruits s’agit-il ? L’amour, la joie, la paix, la patience, la bonté, la bienveillance, la foi, la douceur et la maitrise de soi. Ce sont les fruits de l’Esprit Saint. La parabole reste inachevée car c’est au lecteur d’écrire la conclusion par sa propre vie. Il est toujours temps de se convertir, de changer radicalement de chemin pour s’ouvrir à la joie d’aimer et de partager. Dieu est patient, certainement. Pour autant, comme le dit saint Augustin :

Certes si tu te convertis demain,
Dieu t’a promis sa grâce.
Mais qui t’a promis demain ?

Didier Rocca

Le mot du jour : Figuier et vigne

Si la vigne symbolise Israël, le figuier est un arbre méditerranéen qui donne des fruits, procure de l’ombre et représente la Torah, la Loi de Dieu. Ainsi les interlocuteurs de Jésus peuvent s’identifier soit à l’un, soit à l’autre.

2022-02-22T08:44:31+01:00

Camp Hiver 2022 > les Benjamins

Les Benjamins à Larche

Durant ce séjour au ski ⛷ les BJ’s ont pu, pour certains, faire leur première marche en raquettes ❄️, faire de la luge 🛷 et observer la faune et la flore à travers une longue-vue par la même occasion. Les Benjamins ont rencontré beaucoup de personnes qu’ils ont pu bien aider comme Baldur, un nain qui avait besoin d’aide pour reconstituer son village🏘, Bryan et Lætitia, un couple de danseurs 🕺qui était à la recherche de 2 autres binômes pour créer un groupe, et de nouveau Alfred Picou le grand dessinateur ✍️ qui avait besoin des Benjamins pour créer d’autres super-héros 🦸‍♂️. Ils ont également fait la rencontre d’un conteur qui leur a raconté des histoires 📖 comme s’il les avait vécues : les jeunes comme les animateurs ont adoré ce moment ! Les Benjamins se sont également retrouvés sur les pistes, répartis en groupe « détente », « plaisir » et « passion ». Pour les BJ’s qui n’avaient jamais skié, l’occasion d’apprendre s’est présentée grâce à une monitrice de ski. À la fin de la journée, ils ont reçu une étoile pour les féliciter de leurs progrès. Les autres groupes ont également profité des descentes sous un beau soleil ☀️ le premier jour et sous une belle neige 🌨 le second.
Durant ce séjour au ski les enfants se sont régalés! Et nous aussi !

Mayumi

2022-02-21T16:58:07+01:00

Camp Hiver 2022 > les Jeunes Cadets

Les Jeunes Cadets à Larche

C’est les vacances, c’est-à-dire camp pour les jeunes de l’Œuvre ! Les JKD’s sont les premiers à partir et vers 18 h le samedi 5 février ils arrivent enfin à Larche pour 5 jours de folie.
Le but de ce camp d’après les dieux de l’Olympe : représenter l’autre par la photo pour le décrire au mieux. Alors, toute la semaine les enfants ont travaillé plus en avant leur binôme. Rassurez-vous, ils ont quand même eu le temps de jouer avec des braqueurs et de recevoir la visite de Grizzy et d’un Lemming qui cherchaient à finir leur histoire. Deux Chinois leur ont aussi rendu visite afin que les enfants les aident à retrouver leur tigre pour le Nouvel an chinois ! Les photos leur ont occupé l’esprit mais ils se sont quand même bien amusés sur les pistes. Les enfants étaient séparés par type de piste qu’ils étaient supposés faire (blanc, vert, bleu, rouge, noir) mais au final tous les groupes sont passés par une piste rouge ! Ils sont forts ces jeunes cadets…
La journée défis photo a aussi permis aux enfants de se rajouter des contraintes sur leur manière de skier : ils skient aussi bien sans ski qu’avec un seul ou même tous en chenille. Les Jeunes Cadets ont tous bien progressé en ski cette semaine ! Il y a eu des rires, il y a eu des gamelles. Nous avons pu voir des chutes à foison dont une qui a conduit à une descente en barquette pour finalement remonter sur des skis le lendemain. Entre les mauvaises retombées après les bosses, les chutes phénoménales sur les téléskis et le fameux bouchon du pont, c’était un régal pour les yeux 😉 Heureusement qu’il y avait Bernard et Olivier, nos sauveurs skieurs professionnels.
Enfin, ces 33 garnements se sont bien fatigués sur les pistes et le dernier soir, Jean-Jacques Hanouna est venu présenter une vidéo souvenir de la semaine réalisée par la grande Véronique. Les JKD’s ont présenté les portraits qu’ils avaient réalisés pour représenter les autres. Une belle soirée à l’image de ce camp.
Bilan de la semaine : les Jeunes Cadets sont devenus des skieurs pro et un groupe soudé qui n’hésite pas à intégrer les nouveaux arrivants !
À bientôt pour de nouvelles aventures !

Maud

2022-02-21T16:52:21+01:00

Camp Hiver 2022 > les Cadets

Les Cadets à Larche

Bref,
Eux ce sont les Cadets, ils sont un groupe attachant toujours motivés, de bonne humeur, amusants et bienveillants.
Mardi nous sommes partis, nous sommes arrivés à Larche, nous avons déjeuné, fait les règles de vie puis loué les skis, bref c’était le premier jour.
Les autres jours, les Cadets étaient repartis par groupe de ski à savoir les verts, les bleus, les rouges et les noirs. Ils ont tous progressé et dépassé leurs limites pendant le ski.
Jeudi des vainqueurs des jeux olympiques sont venus leurs rendre visite pour les JO d’hiver du Sauze : OJJO AU SAUZ’OH ! Ils ont participé à ces jeux olympiques sous forme de défis et d’un relais, puis d’une cérémonie d’une remise des récompenses, bref c’était les JO.
Durant le camp les Cadets ont eu la visite de lugeurs qui étaient anti-skieurs ; des directrices de cinéma qui cherchaient des nouveaux acteurs ; et ils ont participé au lancement d’une nouvelle émission télévisée : le RISK à tout prix.
Les Cadets ont eu très beau temps durant cette semaine, avec une bonne neige au début qui a fondu de plus en plus chaque jour, bref c’était la météo du camp.
Le camp s’est résumé à des fous rires, de belles chutes, de très belles progression en ski, de la persévérance, un esprit d’équipe, de l’entraide et beaucoup de gaieté. Et des blessés… Bref, ce sont les risques du métier…
Dimanche, réveil matinal pour rentrer sur Marseille, tous fatigués mais la tête remplie de souvenirs.
Bref c’était les Cadets au ski.

Violette

2022-02-21T16:48:33+01:00

Camp Hiver 2022 > les Grands Cadets

Les Grands Cadets à Larche

Ce camp de ski fut mon premier camp. Je suis heureux de vous le présenter. Tout d’abord nous sommes partis le 10 février à 8 h, ensuite nous avons pris le car jusqu’à 12 h 30. Nous sommes arrivés à la maison et nous avons pique-niqué devant la maison au soleil car les Jeunes Cadets occupaient déjà les tables pour manger à l’intérieur. Une fois que tout le monde a fini de manger, les animateurs nous ont demandé de nous répartir dans les chambres et nous ont dit le numéro de nos chambres. Ensuite on s’est dirigé vers notre chambre et on s’est installé. Une fois l’installation finie, on s’est donné rendez-vous à la salle d’en bas pour dire au revoir aux Jeunes Cadets car c’était le moment de leur départ. Ils nous ont chanté une merveilleuse chanson. Nous sommes tous montés dans le minibus pour aller louer nos skis pour être d’attaque le lendemain. Ensuite, arrivés à la maison, pause goûter et go aux douches ! D’abord les filles, ensuite les garçons, et pour les jours qui suivent on a tout simplement inversé. Une fois la douche prise c’est parti pour le 5/7 avec les BJ’s, nous nous sommes régalés ; et à 19h15 l’heure du repas on se mélange avec les BJ’s, et c’est très sympa ; fin du repas, le coordinateur prend la parole et demande des volontaires pour la table et pour la vaisselle. Une fois tous ces services terminés, c’est l’heure de la veillée pour les GKD’s. Le 1er jour, c’étaient Mathis et Octave qui s’en occupaient. La veillée était sur des débats : on a fait mayo/ketchup et plein d’autres. Deux équipes s’affrontaient dans un débat pour argumenter au mieux. Une fois la veillée terminée on s’allonge tous pour prier et une fois fini, on est appelé chambre par chambre et on va dormir. Voici pour le 1er jour. Vendredi, c’est l’heure du grand jour : 1er jour au ski. On se lève à 7 h, petit déjeuner, et hop on s’habille, on prend le minibus et go pour le Sauze. Le trajet dure 30 minutes, on skie de 9 h à 12 h pour la pause-déjeuner, on reprend aux alentours de 12 h 50 et on repart pour une après-midi de ski jusqu’à 16 h. Cela était vraiment cool car les animateurs nous ont autorisé à être autonomes sur les pistes à condition d’être 3 avec un téléphone pour rester joignables. Donc voici pour le 2e jour, après c’est comme d’habitude on a goûté, douche, 5/7, repas, veillée. Le 3e jour, samedi, c’est la même chose jusqu’à l’heure de la veillée où c’étaient Vassili et Enzo qui étaient les présentateurs. Leur jeu était top, on devait, comme pour une chaise musicale, marcher pendant que la musique tourne et quand elle s’arrêtait on devait avoir le pied sur les feuilles blanches sur le sol, le concept était original. Vassili et Enzo étaient 2 pianistes. Le 4e jour, dimanche, même routine jusqu’à l’heure de la messe vers 18h, car oui, c’est dimanche. On a tous passé un bon moment pour prier le Seigneur. Pour la veillée, c’était au tour de Cosima et Mathilde. Leur concept et le scénario étaient extrêmement cool ; il y avait différentes phases de jeu : donc la 1re était le même concept que la veillée précédente mais avec de la lumière, ensuite 2e phase du jeu on devait être sur la position demandée lorsque la lumière s’éteignait, et pour la 3e phase on était tous assis en rond et Cosima et Mathilde donc, les exorcistes, devaient nous faire réagir avec des bruits étranges et des mouvements ; si on perdait on devait les aider. Ce qui était assez cool c’était que si on perdait aussi, il y avais une file d’attente avec un jeu des signes où on jouait tous ensemble ; donc très bonne veillée de leur part : le bilan du lendemain a été très positif. Lundi, 5e jour, même programme. Pour la veillée c’était donc les animateurs qui l’ont préparée (Stan-Alexis-Maya). Le thème était le Nouvel an chinois, ils étaient déguisés en dragons chinois et ils désignaient au pif des personnes pour tourner la roue. Sur la roue il y avait différents animaux qui désignaient un jeu. On a passé un très bon moment dans la joie et la rigolade, on a eu droit à un oréo grâce à un jeu et à de la chantilly mais pour ça malheureusement on n’a pas réussi à en goûter ! Les animateurs nous mettaient de la chantilly sur le poignet et on devait se la mettre dans la bouche en l’envoyant en l’air, la galère ; cela a fait beaucoup de dégâts mais on a tous rigolé et tous profité, c’est l’essentiel. 6e jour, lundi, dernier jour de ski malheureusement, nous en avons profité un maximum. Pour le soir nous avons eu la chance de manger une très bonne raclette, on s’est régalé. Après ce fut la veillée commune avec les BJ et c’étaient Enzo, Clem, et Roxane les organisateurs. Le thème était sur des énigmes et quelques épreuves à réaliser pour trouver le secret du manoir. On a tous passé un bon moment, on était par groupe avec les BJ’s et c’était super. Le lendemain réveil à 8 h 30 pour préparer le départ. On a tous participé au grand ménage de la maison/chambre/toilettes/salle-à-manger/salle veillée/etc. pour accueillir l’arrivée des Cadets. Le midi nous avons mangé des cordons bleus avec des pâtes et hop, tous dans le car pour le retour à Marseille !

Sergio

2022-03-19T16:17:30+01:00

Édito Février 2022 > Dieu se donne

Avant la multiplication des pains, Jésus répond à ses disciples inquiets de savoir comment nourrir la foule de plus de 5 000 hommes, sans compter les femmes et les enfants, par la phrase : « Donnez-leur vous-même à manger ». Si on l’interprète par « débrouillez-vous », on comprend que les amis de Jésus soient démunis. D’ailleurs Jésus prend la situation en main et accomplit le miracle que l’on sait. Mais on peut aussi interpréter la formule de Jésus d’une autre manière. Peut-être veut-il dire : « Donner-leur à manger ce que vous êtes, vos personnes »… Cela peut sembler tiré par les cheveux, sauf si l’on connaît la fin des Évangiles et comment le Christ institue le repas de l’Eucharistie en disant à ses apôtres de considérer le pain et le vin du dernier repas pascal comme son corps et son sang. Jésus se donne lui-même comme nourriture. Et d’ailleurs on peut être frappé par le fait qu’à sa naissance l’enfant Jésus est déposé dans une mangeoire, préfiguration de ce repas eucharistique que nous célébrons à chaque messe : « prenez et mangez, ceci est mon corps et mon sang donnés pour vous »… Et le nom du village où Marie donne naissance à Jésus est très suggestif : Bethléem signifie « Maison du pain »…

Sacrifice / Action de grâces
Dieu désire se donner à nous, et en Jésus il nous fait comprendre qu’il n’est pas dans le registre du mérite, mais du don gratuit. Son amour est premier et n’est pas relatif à nos efforts ou à nos bonnes actions, même s’il encourage une réponse de notre part. Les chrétiens sont appelés à se convertir à cette vision révolutionnaire et loin de nos conceptions humaines du marchandage et du mérite. Car Dieu est le tout-autre, il ne fonctionne pas comme nous, il est le seul parfait, le seul saint, celui qui aime totalement, sans limite, le tout puissant en amour. Une vie d’homme ne suffit pas pour comprendre cette relation de Dieu avec l’humanité, et tant que nous n’entrons pas dans cette logique, nous faisons fausse route et nous nous trompons dans nos relations interpersonnelles et dans notre vision de Dieu. Les saints sont des femmes et des hommes qui ont entraperçu cette merveille de la gratuité de l’amour et qui ont su y répondre par une vie de partage et non pas de marchandage. En Jésus, Dieu nous fait comprendre que la notion de sacrifice est totalement inversée : ce n’est pas l’homme qui peut faire des choses pour Dieu en échange d’une récompense ou pour éviter une punition, c’est Dieu qui nous donne tout, qui se donne lui-même. La mort et la résurrection du Christ signent la fin de l’ère des sacrifices et nous ouvre à celle de l’action de grâces. Face à Dieu, l’humanité n’a rien à offrir, elle n’a qu’à recevoir et à faire fructifier l’amour reçu.

Pratique religieuse
La démarche religieuse est transformée par cette compréhension. Nos pratiques, nos prières, nos liturgies, nos actions, n’ont pas pour but de nous attirer les bonnes grâces de Dieu, comme des sacrifices offerts à la divinité. Ce sont des réponses à la bonté de Dieu qui se donne à nous, qui se communique à l’humanité en se faisant homme, qui nous nourrit de son amour. Nos pratiques religieuse sont des célébrations de l’amour reçu et accepté. La fine pointe de la pratique religieuse, le résultat ultime de l’action de l’Esprit Saint en nous, c’est de nous aider à vivre ensemble et d’être unis, c’est que nous devenions capables à notre tour de donner sans compter. Ce qui est merveilleux, c’est que ce fruit de l’amour qui transforme nos relations peut être obtenu par d’autres voies que par la voie proprement chrétienne : nous connaissons tous des personnes qui vivent avec d’autres références religieuses, parfois même sans référence religieuse, mais avec une idéologie humaniste, sociale, philosophique ou politique, et qui mettent en pratique dans leur vie interpersonnelle l’amour, l’ouverture, la fraternité, la solidarité… Signe, pour les croyants, de l’action de l’Esprit qui travaille le monde de l’intérieur et porte du fruit partout, même dans les personnes qui ne connaissent pas les messages religieux tels que nous les concevons.

Jésus Christ
En Jésus, Dieu se donne et nous donne à voir comment nous pouvons être authentiquement humains dans la réception de ce don : nous sommes filles et fils de Dieu, aimés sans condition, appelés à nous aimer les uns les autres comme des sœurs et des frères. C’est toute la complexité du mystère de Jésus : il est à la fois Dieu qui se fait connaître et nous communique sa Bonne Nouvelle, et il est tout autant l’homme accompli qui nous ouvre le chemin du véritable sens de notre existence, à savoir la fraternité. Il est normal que nous ayons du mal à comprendre la nature du Christ : il a fallu plus de sept siècle de débats au début de l’histoire de l’Église pour que les chrétiens arrivent à exprimer de manière juste et équilibrée la double nature humaine et divine en Jésus, totalement homme et totalement Dieu, consubstantiel à Dieu et consubstantiel à l’humanité pour le dire avec les « gros mots » théologiques. Et ce qui reste le plus énorme et difficile à concevoir pour nous, c’est que nous sommes nous aussi de cette double nature, humaine et divine… Lorsque nous aurons véritablement intégré les conséquences de cette réalité, alors nous atteindrons notre accomplissement, nous réaliserons ce que nous sommes : filles et fils de Dieu.

Olivier

2022-01-25T19:43:56+01:00