Spiritualité

Édito janvier 2026 > Où sont les prophètes ?

Lors des baptêmes, les chrétiens sont appelés à devenir prêtres, prophètes et rois. C’est une manière de dire qu’ils ont pour vocation de se laisser configurer au Christ, qui lui seul réalise pleinement cette vocation dans tout son être. La prière, l’annonce et le service, sont les fonctions des prêtres, des prophètes et des rois, et nous sommes invités à les mettre en œuvre dans nos vies.

Entendre les prophètes
Parmi nous il y a des personnes qui ont pour mission d’incarner plus particulièrement l’une ou l’autre des ces fonction de manière très radicale. C’est évident pour les prêtres ordonnés par l’Église, et qui ont leur équivalent dans toutes les religions. C’est aussi le cas pour les rois, ceux qui servent, qui gouvernent, que ce soit dans les structures civiles, professionnelles, religieuses ou associatives. Mais il me semble que notre monde manque cruellement de personnes qui incarnent la fonction prophétique. Il y a bien des lanceurs d’alerte et des personnes engagées qui essayent de faire entendre leur voix face aux rouleaux compresseurs idéologiques, commerciaux ou médiatiques, mais ils ne sont pas audibles ou entendus. Nous sommes tellement submergés d’informations et de discours de tous ordres qu’il est difficile d’avoir de véritables critères de jugement pour discerner le vrai du faux. Tout est mis sur le même plan : les paroles justes, équilibrées et prophétiques sont noyés dans le flots des idées toutes faites et des fausses informations.

Écouter les prophètes
Pourtant notre monde à grand besoin de ces voix qui nous permettent de mettre en perspective nos actions et nos choix. Nous avons trop souvent tendance à suivre la pensée unique et à nous laisser porter par des idéologies qui cachent leurs intentions mais portent des fruits de destruction et de déshumanisation. Comment se fait-il que nous soyons aussi indifférents aux injustices de notre monde et aux enjeux pour l’avenir, alors même que nous avons la prétention de faire partie d’une civilisation qui a grandi en liberté et en maturité ? Nous avons des moyens techniques et technologiques extraordinaires, nous accomplissons des merveilles scientifiques et nous sommes riches d’une pensée philosophique élaborée, mais nous sommes encore trop souvent aveugles au sujet de ce qui ne tourne par rond dans le monde. Nous sommes encore moins capables de prendre les décisions qui s’imposent et qui ne nous coûteraient pas énormément pour des résultats qui pourraient changer la face de la terre. Pourquoi sommes-nous sensibles aux invitations matérialistes et mercantiles des influenceurs de toute sorte, et cependant incapables d’entendre les cris de celles et ceux qui réclament plus de justice, de solidarité et de fraternité ?

Devenir des prophètes
De tout temps les prophètes ont été combattus et persécutés, car leur parole libre et vraie dérangeait. De nos jours, il n’est plus besoin d’attaquer les prophètes car ils ne sont tout simplement pas audibles. Comme Jean le baptiste, ils sont une voix qui crie dans le désert… Mais pour reprendre cette grande figure prophétique, nous pouvons avoir l’espérance de voir des fruits émerger de cette apparente stérilité. La mission prophétique nous concerne tous. Si les prophètes ne sont pas entendus de nos jours, peut-être qu’il faut simplement laisser émerger le prophète qui est en chacun de nous. Nous avons la capacité de discerner ce qu’il faudrait faire pour que notre vie ait plus de sens et pour que l’existence des autres soit meilleure. Pour cela il suffit de nous rendre attentif à notre intériorité – avec des mots chrétiens nous dirions à l’écoute de l’Esprit Saint qui habite en nous – et alors nous saurons prendre les bonnes décisions et trouver les bonnes attitudes pour changer le monde de l’intérieur. C’est une manière de concevoir la conversion : comprendre et croire que nous sommes véritablement habités par l’Esprit de Dieu qui nous éclaire. Ce ne sont pas nos ventres, nos peurs ou nos pulsions qui doivent nous diriger, mais cette capacité d’amour de Dieu présente en chacune de nos vies qui peut nous aider à bien discerner… Il faut bien sûr que cette capacité à prendre les bonnes décisions soit régulée par une conscience éclairée, et pour cela nous ne devons pas rester seuls pour discerner, car il y aurait un risque : nous pourrions prendre nos désirs pour la volonté de Dieu. L’insistance du pape François sur la synodalité était une sauvegarde contre ce risque : c’est en communion avec ceux qui nous entourent, en relisant l’histoire de notre monde et en prenant en compte les connaissances et les expériences des autres que nous avancerons dans la vérité. Nous sommes invités, dans la dynamique de la fête de la nativité, à incarner personnellement et collectivement la Bonne Nouvelle. Une sacrée mission…

Olivier

2025-12-16T16:14:47+01:00

L’Évangile du mois de janvier 2026

L’Évangile du mois raconte le Baptême de Jésus. Ce jour-là, à l’Œuvre, nous fêterons l’Épiphanie.

Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc

Le lendemain du baptême de Jésus, Jean le voit qui vient à lui et il dit :« Voici l’agneau de Dieu, celui qui enlève le péché du monde. Je parlais de lui lorsque j’ai dit : “Après moi vient un homme qui déjà me dépasse, car bien avant moi il était.” Je ne le connaissais pas, mais je suis venu avec le baptême d’eau pour qu’il puisse se manifester à Israël. »
Jean fit cette déclaration : « J’ai vu l’Esprit qui descendait du ciel sur lui comme fait la colombe, et il est resté sur lui. Je ne le connaissais pas, mais celui qui m’a envoyé pour baptiser avec de l’eau m’a dit : “Celui sur qui tu verras que l’Esprit descend et reste, c’est lui qui baptise dans l’Esprit Saint.” Cela, je l’ai vu, et je peux déclarer que c’est lui le Fils de Dieu. »

Le contexte
Jésus vient d’être baptisé la veille et Jean-Baptiste prend conscience peu à peu de l’impact de cette rencontre dans sa vie. C’est l’occasion d’une belle catéchèse sur l’identité de Jésus. Qui est-il vraiment ? Que dirions-nous de Jésus, nous qui le connaissons ? Comment parlons-nous de lui ?
Jean-Baptiste témoigne ici d’une relation intime avec Jésus et nous offre un portrait qu’il nous faut quelque peu décrypter.

L’agneau de Dieu
Un agneau est l’animal propre à être offert au Temple en holocauste. Jésus est donc celui qui, comme un agneau, va être sacrifié. En sa personne, il transforme les sacrifices sanglants d’animaux renouvelés en un sacrifice unique, définitif. La Messe est d’ailleurs le mémorial de ce sacrifice unique fait par amour. Plus de sang versé mais un amour offert.

Qui enlève le péché du monde
Le sens du sacrifice du Christ qui, au passage ne peut se résumer à la Croix mais englobe toute sa vie terrestre nous est révélé par cette expression. Jésus donne sa vie pour que le monde soit sauvé, pour révéler à l’humanité que ce n’est pas le péché, aussi grand soit-il, qui a le dernier mot. Jésus ne signifie-t-il pas « Dieu sauve ». Jésus est notre Sauveur. Il est venu nous sauver du péché, du mal sous toutes ses formes.
Bien avant moi, il était !
Nous apprenons ici de la bouche du Baptiste que le Verbe de Dieu, deuxième personne de la Trinité, existe depuis toujours même s’il n’est entré dans l’histoire des hommes qu’il y a un peu plus de deux mille ans. Ce que Jean-Baptiste nous dit ici peut à juste titre nous plonger dans un abîme de perplexité. Pourtant, Jésus n’est-il pas pleinement Dieu ? Il ne l’est pas devenu, il l’est depuis toujours. Il est aussi vieux que son Père, si on peut dire, pour autant que la notion de temps ait un sens en Dieu.

La colombe
Cet oiseau est un symbole évocateur. Il rappelle la paix, l’innocence, la douceur. Plus encore, la colombe est un oiseau d’une telle discrétion qu’elle peut se déposer sur notre épaule ou sur notre tête sans même que nous nous en rendions compte. Ainsi, l’Esprit Saint « comme » une colombe s’approche de nous avec une grande délicatesse.

C’est lui qui baptise dans l’Esprit Saint
Jésus est celui qui baptise dans l’Esprit Saint. Ne nous trompons pas, ce n’est pas tel prêtre ou tel diacre qui baptise, c’est le Christ qui baptise et ce baptême manifeste le don de l’Esprit Saint. Jésus transforme ce rite d’eau, rite de conversion opéré par Jean Baptiste en une « onction d’Esprit Saint » qui nous fait passer de la mort à la vie, au fond une nouvelle naissance.

Le Fils de Dieu !
Cette qualification est de grande importance. Jean-Baptiste anticipe une réalité qui ne sera saisie que progressivement à la lumière de la résurrection. Sa divinité est « révélée » lors de son baptême et à la transfiguration. L’usage du terme de Fils ne doit pas nous laisser croire que le Fils serait inférieur au Père. Il n’y a pas de hiérarchie en Dieu mais une communion entre le Père, le Fils et l’Esprit Saint.

Didier Rocca

2025-12-16T16:17:01+01:00

Édito décembre 2025 > La présence réelle

Dans les églises, les hosties consacrées durant la messe sont conservées dans un petit meuble qui s’appelle un tabernacle, éclairé par une lumière qui indique qu’il contient ce que l’on nomme « la présence réelle ». Pour les croyants, cette présence réelle, c’est celle de Dieu incarné, car pendant la célébration de l’eucharistie le pain sans levain devient, par la consécration et la reprises des gestes et des paroles de Jésus lors de son dernier repas avec les disciples, le corps du Christ. Les croyants ont donc un grand respect pour ces hosties consacrées et gardent précieusement celles qui n’ont pas été consommées lors de la célébration de la messe. C’est devant le tabernacle que les croyants s’inclinent lorsqu’ils rentrent dans une église, et ils sont invités à prier particulièrement devant cette présence réelle : c’est ce que l’on appelle l’adoration eucharistique. Il existe un objet liturgique spécial pour exposer une hostie consacrée et permettre aux croyants de prier, c’est l’ostensoir ; les jeunes de l’Œuvre le découvrent lors du temps d’adoration proposé entre la messe et le loto lors de la grande fête de l’Épiphanie célébrée début janvier.

Dieu en nous
Cette présence réelle et sacramentelle est une invitation à comprendre que si l’hostie consacrée est consommée par les croyants, c’est pour qu’ils deviennent eux-mêmes des tabernacles, c’est-à-dire que Dieu repose en eux, présence réelle et vivifiante. À la sortie de la messe nous devrions nous prosterner les uns devant les autres comme on salue le tabernacle… La présence réelle au cœur de nos existences est encore plus importante que celle qui repose dans le tabernacle, car Dieu agit en nous afin que la Bonne Nouvelle transforme le monde de l’intérieur par l’intermédiaire de nos actes et de notre manière de vivre. C’est pour cela qu’il faut vite sortir de l’église à la fin de la messe pour aller mettre en œuvre et en pratique la présence réelle de Dieu en aimant nos sœurs et frères en humanité.

Dieu en tous
Cette présence réelle dans nos vies déborde donc la communion eucharistique : « Chaque fois que vous êtes réunis en mon nom, je suis présent au milieu de vous » dit le Christ dans l’Évangile. Si la participation à la messe nous fait vivre physiquement cette présence par la consommation de l’hostie, il est bien évident que ce n’est pas de la magie et que ce symbole très fort nous renvoie à la présence de Dieu au cœur de chacune de nos vies, même en dehors de la communion sacramentelle. Il est bien évident que Dieu n’a pas besoin de notre participation à la messe pour être présent dans nos cœurs et pour agir par nos vies. Si la communion a une utilité et une efficacité, c’est parce qu’elle nous aide à comprendre avec notre corps, dans l’expérience physique de la consommation de l’hostie, que Dieu habite en nous. Pour les croyants pratiquants, la communion et la participation aux sacrements est un rappel et un signe de ce qu’ils vivent intérieurement sans toujours s’en rendre compte : par l’amour que nous mettons en œuvre dans nos relation avec les autres, nous laissons Dieu émerger de nos vies, nous le rendons présent. C’est aussi le sens du mot communion qui évoque la relation aux autres dans une qualité intérieure qui produit l’unité. Quand nous « faisons Église », que nous sommes ensemble et que nous mettons l’amour au centre de nos relation, nous communions à cette présence réelle de Dieu.

Dieu dans les plus petits
Dans notre manière de mettre l’amour au cœur de notre vie et de toutes nos relations, nous rendons la présence de Dieu réelle dans le monde. En cherchant à incarner l’amour dans toute notre existence, nous trouvons Dieu enfoui dans la profondeur de notre être. En allant à la rencontre de l’autre, en particulier le plus petit, le plus pauvre, le plus méprisé, le plus défiguré, nous rencontrons Dieu et nous découvrons qu’il est présent dans chaque personne que nous croisons. Cette présence réelle est tellement déroutante et improbable qu’elle semble en contradiction avec une conception mondaine de Dieu et de son rapport à l’humanité, au point que bien souvent nous avons du mal à la comprendre et à l’accepter. Que Dieu soit présent dans ce qui brille et qui est grand, c’est humainement logique, car nous projetons sur Dieu nos rêves de grandeur et de réussite, mais qu’il se révèle dans ce qui est petit et fragile nous demande un déplacement énorme… C’est pourtant bien ce que Jésus nous donne à comprendre par son incarnation. À Noël, Dieu nous fait découvrir sa manière d’être au monde, et elle nous déstabilise. Nous sommes invités à nous laisser déplacer par l’originalité du message chrétien : Dieu n’est pas présent dans la force, dans la violence, dans la puissance mais dans la fragilité, dans l’amour, dans la paix et dans la fraternité.

Olivier

2025-11-18T09:37:32+01:00

L’Évangile du mois de décembre 2025

Cet Évangile est lu le jour de Noël à l’aube durant la messe de l’aurore, on l’appelle « l’Évangile des bergers ».

Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc

Lorsque les anges eurent quitté les bergers pour le ciel, ceux-ci se disaient entre eux :
« Allons jusqu’à Bethléem pour voir ce qui est arrivé, l’événement que le Seigneur nous a fait connaître. »
Ils se hâtèrent d’y aller, et ils découvrirent Marie et Joseph, avec le nouveau-né couché dans la mangeoire. Après avoir vu, ils racontèrent ce qui leur avait été annoncé au sujet de cet enfant. Et tous ceux qui entendirent s’étonnaient de ce que leur racontaient les bergers. Marie, cependant, retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur. Les bergers repartirent ; ils glorifiaient et louaient Dieu pour tout ce qu’ils avaient entendu et vu, selon ce qui leur avait été annoncé.

Le contexte
Nous sommes à Bethléem, Marie vient d’accoucher en dehors du village. Seul Joseph est présent. Luc précise qu’elle dépose son enfant nouveau-né dans une mangeoire. Et aussitôt un ange dit à des bergers : « Ne craignez pas, car voici que je vous annonce une bonne nouvelle, qui sera une grande joie pour tout le peuple : Aujourd’hui, dans la ville de David, vous est né un Sauveur qui est le Christ, le Seigneur. » Les bergers sont donc les premiers témoins de cette naissance. Ils représentent pour Luc les gens du dehors, dormant à la belle étoile, vivant de façon précaire et souvent pauvres. Or ce sont eux qui bénéficient de cette nouvelle inouïe : Dieu vient dresser sa tente parmi nous !En chair et en os !

Un nouveau-né couché dans une mangeoire.
Luc ne nous parle pas de la mangeoire pour assouvir notre curiosité. A quoi renvoie la mangeoire ? Ce détail nous permet de deviner ce que sera la mission de Jésus, être pain pour ses disciples et pour le monde. Jésus est déposé là où est mise la nourriture pour les animaux. Vous l’avez compris, l’Évangile des bergers nous indique ce que sera l’apport de Jésus durant sa vie, être le Pain Vivant pour l’humanité afin que nous ayons la vie éternelle.

Après avoir vu
Si Marie et Joseph étaient dans l’obligation de se rendre à Bethléem pour répondre à la demande de recensement faite par l’empereur romain, les bergers y viennent, eux, de façon libre et volontaire. Ainsi, dans le contexte de la naissance du Sauveur, la marche des bergers préfigure la délivrance à venir. Symboliquement, on peut dire que de leur nuit, les bergers se dirigent vers la lumière, vers le jour du Seigneur. Témoins d’un tel événement, les bergers voient et racontent et ce ne seront pas les seuls. Souviens-toi ? Plus tard, les femmes à la vue des anges au tombeau vide, puis les disciples d’Emmaüs après un partage et un repas deviendront témoins du Ressuscité. La contemplation et la parole des bergers anticipent l’annonce de la résurrection.

Une parole qui étonne et détonne
Ceux qui en sont les porteurs, ces pauvres bergers, n’ont pas la science des intellectuels, ils n’ont pas la pureté des religieux, ils ne sont que des petits aux yeux du monde qui deviennent alors porte-parole de Dieu. Les bergers sont déjà disciples. Ils ne sont plus seulement responsables de leur troupeau mais aussi de la parole de Dieu.

Marie et la parole des bergers
Marie retenait tous ces événements et les méditait en son cœur. De quels événements s’agit-il ? Certainement, celui de la naissance de Jésus mais aussi dans ce contexte, des paroles des bergers. Celle qui a mis au monde le divin enfant annoncé par l’ange, vient de saisir la portée de la parole des bergers et, ainsi, le réel destin de l’enfant. Le témoignage des bergers donne à la naissance du Sauveur une autre signification. Le messie tant attendu par Israël apporte donc la Paix sur la terre aux hommes, qu’Il aime. C’est ainsi que l’enfant apportera une délivrance et la joie au peuple, en commençant par les plus petits, assumant ainsi sa mission dès sa naissance

Didier Rocca

Les bergers dans le Nouveau Testament
Dès sa naissance Jésus se trouve placé sous le signe des bergers. On peut aussi parler des pasteurs. Comme nous venons de le dire ci-dessus, ce sont eux qui les premiers viendront reconnaître et adorer Celui qui sera amené à les conduire : « Les bergers repartirent ; ils glorifiaient et louaient Dieu pour tout ce qu’ils avaient entendu et vu, selon ce qui leur avait été annoncé. » D’ailleurs, Jésus n’aura de cesse durant sa vie d’avoir recours à l’image du pasteur dans ses paraboles. Jésus affirme dans l’une d’elles : « Moi, je suis le bon pasteur, le vrai berger, qui donne sa vie pour ses brebis. » La suite de la parabole précise les qualités du bon berger, celui qui connaît ses brebis, celles-ci reconnaissant sa voix. Mais Jésus rappelle aussi que le pasteur a pour mission de réunir les brebis égarées, celles « qui ne sont pas de cet enclos. »

2025-11-18T09:31:29+01:00

Édito novembre 2025 > Témoins plus que maîtres

Le pape Paul VI disait en 1974 lors d’une audience générale : « L’homme contemporain écoute plus volontiers les témoins que les maîtres, ou s’il écoute les maîtres, c’est parce qu’ils sont des témoins. Il éprouve en effet une répulsion instinctive pour tout ce qui peut apparaître mystification, façade, compromis. Dans un tel contexte, on comprend l’importance d’une vie qui résonne vraiment de l’Évangile ! » Cette réflexion reste d’actualité et concerne l’Église mais aussi toute l’humanité. On le voit bien avec la méfiance de nos contemporains vis-à-vis des politiciens, des syndicalistes, des journalistes et de toute personne en charge de responsabilité. Si les actes ne sont pas en conformité avec les paroles, alors le message est rejeté en bloc. C’est une invitation à l’exigence personnelle pour tous ceux qui ont des responsabilités.

Appel à l’exigence
Il est bien normal que les gens attendent de la part de ceux qui transmettent des messages qu’ils soient à la hauteur de ce qu’ils annoncent. Sinon ils sont considérés comme des hypocrites ou des menteurs. Nous savons que les messagers sont humains, donc imparfaits et perfectibles, mais ils se doivent de tout faire pour avancer vers l’idéal qu’ils annoncent et pour travailler intérieurement à se conformer à ce qu’ils proposent comme chemin positif et de bonheur. Sinon ils sont des donneurs de leçons qui n’appliquent pas ce qu’ils proposent comme chemin de vie. Cela doit nous engager à essayer de vivre du message, et à tendre vers l’idéal que nous annonçons. Le Christ est le seul qui incarne parfaitement la parole de Dieu, au point que de lui seul nous pouvons dire qu’il n’est pas un messager mais qu’il est lui-même le message. Bien que nous soyons incapables d’incarner parfaitement l’Évangile dans nos vies, nous devons nous rappeler que c’est vers ce but que nous devons tendre, c’est tout le sens de l’appel à la sainteté qui nous est adressé lors de notre baptême.

Appel à l’humilité
Les messagers, pour être dignes du message qu’ils portent, doivent se rappeler qu’ils ne sont pas exempts de défauts et que le message lui-même les dépasse, nécessitant leur propre transformation. Les gens acceptent que les responsables aient des limites et ne soient pas parfaits, mais ils peuvent être profondément blessés si les messagers prétendent incarner parfaitement le message et jugent et condamnent alors qu’ils sont eux-mêmes imparfaits. Le message évangélique n’est pas un critère de condamnation mais une Bonne Nouvelle qui soutient les hommes et les femmes dans leur cheminement, les aide à se relever après une chute et à retrouver courage face aux obstacles. Pour les chrétiens, seul le Christ, le seul homme parfait, pourrait être autorisé à condamner. Pourtant, il n’a jamais condamné, mais a toujours accueilli, accompagné, pardonné et invité à la conversion.

Appel à la sainteté
Nous célébrons en ce mois de novembre la fête de la Toussaint. Les saints sont des femmes et des hommes qui se savaient aimés quoi qu’il arrive, qui savaient que Dieu avait déposé en eux sa force d’amour, son Esprit Saint, et qu’ils pouvaient le faire germer et porter du fruit en aimant les autres et en s’engageant afin de faire grandir la solidarité et la fraternité dans le monde. Les saints ne sont pas des gens parfaits, mais ils ont su se laisser travailler par l’énergie d’amour de Dieu. Ils nous sont donnés comme des signes de ce que nous sommes tous appelés à devenir : d’authentiques témoins de la Bonne Nouvelle. Il y a les saints officiels, reconnus par l’Église, qui ont des statues dans les lieux de cultes et leurs noms dans les calendriers, mais il y aussi tous les saints plus discrets, anonymes, que nous honorons en cette fête de la Toussaint, qui n’ont pas fait l’objet d’un procès de canonisation mais qui sont pour nous des repères. Nous en connaissons certainement dans notre entourage, dans nos familles. Ils sont importants pour nous car ils sont abordables ; nous pouvons nous identifier à eux. Nous savons qu’ils ne sont pas parfaits, ce ne sont pas des anges ni des êtres hors-sol, mais ils ont été capables de faire grandir en eux le cadeau de l’amour de Dieu et de le partager avec nous, même de manière très discrète et banale, dans le quotidien d’une vie normale, sans faire des choses exceptionnelles mais en vivant leur vie de manière extraordinaire. Nous sommes invités à mettre nos pas dans les leurs, à avancer vers une vie toujours plus habitée par la foi, l’espérance et la charité, sans prétention mais sans appréhension non plus devant cet idéal qui nous dépasse et peut nous impressionner. Il est normal – et même plutôt salutaire – que nous soyons pris de vertige devant la Bonne Nouvelle que les chrétiens annoncent, car elle nous propose une perfection de vie qui est au-delà de nos forces humaines. Mais dans la foi nous ne sommes pas livrés à nos propres forces, nous croyons que nous sommes habités par l’esprit d’amour de Dieu qui travaille en nous. La conversion consiste a laisser cette énergie grandir et s’épanouir dans nos vies et dans celle des autres. Pour cela il faut la reconnaître, l’accepter et consentir à la faire fructifier.

Olivier

2025-10-13T18:59:05+02:00

L’Évangile du mois de novembre 2025

Lisons ensemble un court extrait de l’Évangile de la Passion que nous lirons en cette fin d’année liturgique.

Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc

En ce temps-là, on venait de crucifier Jésus, et le peuple restait là à observer. Les chefs tournaient Jésus en dérision et disaient : 
« Il en a sauvé d’autres, qu’il se sauve lui-même, s’il est le Messie de Dieu, l’Élu ! »
Les soldats aussi se moquaient de lui ; s’approchant, ils lui présentaient de la boisson vinaigrée, en disant : « Si tu es le roi des Juifs, sauve-toi toi-même ! »
Il y avait aussi une inscription au-dessus de lui : « Celui-ci est le roi des Juifs. »
L’un des malfaiteurs suspendus en croix l’injuriait : « N’es-tu pas le Christ ? Sauve-toi toi-même, et nous aussi ! »
Mais l’autre lui fit de vifs reproches : « Tu ne crains donc pas Dieu ! Tu es pourtant un condamné, toi aussi ! Et puis, pour nous, c’est juste : après ce que nous avons fait, nous avons ce que nous méritons. Mais lui, il n’a rien fait de mal. »
Et il disait : « Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras dans ton Royaume. »
Jésus lui déclara : « Amen, je te le dis : aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis.»

Le contexte
À l’occasion du dernier dimanche de l’année liturgique, nous lisons un extrait de la Passion. Les premiers chrétiens ont reconnu en Jésus dans ce récit les traits du vrai Roi.

Trois tentations
Au tout début de la vie publique de Jésus juste après son baptême, on se souvient que Jésus a été tenté trois fois par le diable :
– « Si tu es Fils de Dieu, ordonne à cette pierre de devenir du pain ».
– « Si tu te prosternes devant moi, tu auras pouvoir sur le monde entier ».
– « Si tu es Fils de Dieu, d’ici jette-toi en bas ».
Et le diable, nous dit saint Luc, « s’éloigna de Jésus jusqu’au moment fixé. » Remarquons que ces trois tentations sont ici redoublées non plus par Satan mais par trois autres personnes ou groupes de personnes :
– Les chefs des prêtres quand ils disent « Il en a sauvé d’autres, qu’il se sauve lui-même, s’il est l’Elu de Dieu ! »
– Les soldats romains quand ils s’écrient : « Si tu es le roi des Juifs, sauve-toi toi-même. »
– Enfin, celui que l’on appelle le mauvais larron qui s’adressant à Jésus lui dit : « N’es-tu pas le Christ ? Sauve-toi toi-même et sauve-nous ! »
À chaque fois, des injures et un appel à descendre de la croix ! Le pouvait-il ? Oui. Le fallait-il ? Non. Cela aurait signifié que Jésus renonce à sa mission de sauveur.

Le Sauveur et roi 
qui ne se sauve pas
C’est ici tout le paradoxe du mystère de la Croix qui s’exprime. Celui que les anges de la nativité annonçaient aux bergers est ici sur une croix, victime des moqueries des uns, impuissant face au jugement des autres.
De fait, si Jésus n’est pas capable de se sauver, de faire appel, en cette circonstance, à la puissance de Dieu, comment peut-on lui donner le titre de Messie ? Sa souffrance et sa passivité prouvent bien pour les personnes présentes au pied de la Croix qu’il ne peut pas se l’attribuer. Pourtant, c’est bien en cette apparente inaction que Jésus se révèle Fils et Christ, intercesseur auprès du Père.

Roi sans terre
Comme l’indique l’écriteau, Jésus est condamné sous le motif de « Roi des Juifs ». Un roi sans terre, sans épée, sans armée que même des soldats bafouent. Sa royauté est bien synonyme de l’injustice dont il est victime. Ni Pilate, ni Hérode ne l’ont reconnu comme roi des Juifs, pourtant, malgré son innocence avérée, Jésus est condamné pour ce motif. Sa royauté est tout autre.

Le « bon » larron
Pour beaucoup, pour les juifs, pour les païens comme pour nous, il est bien difficile d’articuler Jésus comme figure royale avec la Croix. La royauté du Christ est étonnante, non pas despote, capricieux, dictateur mais soumis à la liberté de l’homme.
Le bon larron est la figure du bon disciple. Il a la crainte de Dieu. Objectivement, pécheur, assumant sa responsabilité, honnête par rapport à son divin Maître comme par rapport à lui, il ne lui demande pas de le sauver mais de se souvenir de lui. Et Jésus lui répond : Aujourd’hui, tu seras avec moi en paradis. Deux façons de comprendre cela :
– Quand tu seras mort, tu seras avec moi dans le Royaume de Dieu.
– Se placer dans cette juste relation avec Jésus, c’est cela le paradis. Pas une question de lieu mais de relation. Par conséquent, le bon larron se met auprès de Dieu alors même qu’il est sur la croix.
Cette deuxième interprétation nous invite à considérer le Royaume non pas comme un objectif à atteindre pour après, mais comme un espace de relations accessible dès aujourd’hui.

Didier Rocca

2025-10-13T19:04:31+02:00

Édito octobre 2025 > Politique & religion

Le climat politique en France n’est pas paisible, et le rapport des religions avec le monde politique est une question complexe. La particularité de la laïcité française insiste sur la séparation des Églises et de l’État, mais elle tombe parfois dans une idéologie antireligieuse qui n’est pas respectueuse de la liberté de conscience ni de la liberté religieuse. Cependant, la question se doit d’être posée car les croyants sont avant tous des citoyens et sont donc partie prenante de la vie de la société. Leurs convictions et leurs conceptions de la vie ne peuvent rester cantonnées à la sphère privée. Les croyants votent, ils travaillent, ils ne sont pas déconnectés de la vie sociale, ils ne sont pas des citoyens au rabais…

Convictions et clivages
Si la laïcité impose la neutralité religieuse à ses représentants, elle ne le demande pas aux citoyens. Une religion qui ne s’incarnerait pas dans des convictions humaines, sociales et politiques n’aurait pas de sens. Nous savons bien que la pratique religieuse ne se réduit pas à la pratique rituelle, mais qu’elle implique aussi des engagements humains et sociaux. La difficulté réside dans le fait que le jeu politique est souvent facteur de clivages et de divisions. Les représentants politique ont des postures à tenir, faute de quoi ils seraient pointés du doigt comme étant sans convictions et inconstants. C’est compréhensible, mais c’est aussi souvent consternant, car du fait de ces postures ils s’interdisent des choix qui seraient bons et justes mais qui ne sont pas dans leur ligne politique, et ainsi, ils se tirent une balle dans le pied, ils se dévalorisent aux yeux des électeurs et ne travaillent plus au bien commun mais à leur survie politique ou à celle de leur parti. Il est souvent difficile de parler politique sans prendre parti et sans entrer dans les clivages idéologiques qui divisent et ne permettent pas des échanges constructifs et apaisés.

Convictions et fraternité
Les croyants ont une vision de l’existence particulière, qui prend en considération la dimension transcendante et spirituelle de la vie ; cela les engage aussi à se positionner sur les grandes questions de société et sur le bien commun. Ils se doivent de veiller à la cohérence de leur vie, et peuvent exprimer leurs convictions ou leurs désaccords, comme tous les autres citoyens. La fraternité et le bien commun sont premiers dans le message chrétien, et cela implique de ne rejeter personne et de travailler à vivre la communion. Parfois cet impératif de fraternité universelle rentre en conflit avec des convictions qui peuvent sembler incompatibles voire intolérables. Les croyants se sentent alors déchirés : comment tenir bon dans l’ouverture aux autres, dans la fraternité, dans la solidarité, dans le souci des plus pauvres, dans l’accueil de l’étranger, et tout à la fois ne pas combattre ceux qui pensent autrement ? Comment arriver à ne pas se fâcher tout en abordant des questions qui fâchent ? Cela peut devenir douloureux et compliqué. Comment trouver la bonne manière de mettre en œuvre la Bonne Nouvelle chrétienne sans tourner le dos à ceux qui ne la comprennent pas ou qui la combattent ? Nous pouvons nous inspirer de l’attitude de Jésus Christ : il n’a rejeté personne, il s’est fait proche de tous, tout en acceptant de se voir rejeté, trahi, jugé, condamné, torturé, tué. Mais cela n’était pas sa volonté, puisque son choix était de montrer l’amour total et universel de Dieu pour tous. Jésus a rencontré les puissants et les hommes forts de son temps, même ceux qui lui étaient opposés, mais il n’a pas changé de cap dans son message de fraternité, de solidarité et d’amour. À l’image du Christ, le chrétien est invité à ne rejeter personne tout en continuant courageusement à se positionner, voire à se révolter contre ce qui est contraire au message évangélique. Cela lui demande un sérieux travail de discernement : il faut distinguer ce qui est relatif de ce qui est vital. Nous pouvons accepter de faire des compromis sur certains points tout en gardant le cap sur l’essentiel. Et surtout il nous faut veiller à ne jamais nous prendre pour Dieu : notre mission n’est pas de juger ou de condamner, mais d’annoncer et de nous engager pour mettre en œuvre dans nos vies ce que nous croyons. Si l’on peut combattre des idéologies, il nous est demandé de ne pas combattre les autres et de ne pas faire l’amalgame entre les idées et les personnes. Sinon comment parler d’amour universel ?

Convictions et liberté
La question se pose alors de savoir si l’on peut, comme chrétien, s’engager en politique ou exprimer des opinions et faire campagne pour un candidat ou un parti politique. Je connaissais un prêtre qui prônait ce qu’il appelait la « chasteté politique » : il avait des convictions, mais comme prêtre il ne voulait pas que ses convictions divisent la communauté qu’il avait pour mission de servir, et donc il n’exprimait pas ses idées politiques, tout en donnant des critères et des repères basés sur l’Évangile, et il votait « blanc », s’abstenant de prendre parti lors des scrutins. Il y en d’autres qui expriment plus ouvertement leurs convictions, prenant le risque de ne plus rassembler toutes les personnes de leur communauté, mais avec sincérité et dans la fidélité à ce que ferait le Christ s’il était à leur place, au risque d’être incompris ou combattus… Il n’y pas de règle, sauf celle de l’amour, du respect et du bien commun. Facile à dire, pas toujours facile à mettre en œuvre.

Olivier

2025-09-15T15:42:35+02:00

L’Évangile du mois d’octobre 2025

L’Évangile du mois est celui qui sera proclamé le 12 octobre. Il s’agit d’un récit de miracle étonnant…

Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc

Comme Jésus faisait route vers Jérusalem, il arriva aux frontières de la Samarie et de la Galilée. Il entrait dans un village quand dix lépreux vinrent à sa rencontre ; Se tenant à distance, ils lui crièrent : « Jésus, Maître, aie pitié de nous ! »
Voyant cela, il leur dit : « Allez-vous montrer aux prêtres. »
Et pendant qu’ils y allaient, ils furent guéris. Se voyant guéri, l’un d’eux revint, rendant gloire à Dieu à haute voix. Il tomba le visage contre terre aux pieds de Jésus et il le remercia. Or lui était un Samaritain.
Alors Jésus demanda : « Les dix n’ont-ils pas été guéris ? Où sont les neuf autres ? Il n’y a donc eu que cet étranger pour revenir et rendre gloire à Dieu ? » Jésus lui dit : « Relève-toi et va ton chemin, ta foi t’a sauvé.»

Le contexte
Dans ce passage, les données géographiques sont importantes. Jésus se dirige vers le Jérusalem, le lieu de sa Passion, vers la lèpre du monde. Il quitte définitivement sa région de Galilée et arrive dans un territoire très particulier, la Samarie, puisque leurs habitants sont des juifs qui ne reconnaissent pas le Temple de Jérusalem. Les samaritains représentent les « mauvais » croyants.

Dix lépreux…
Étonnant de rencontrer dix lépreux… Pas tant que cela. Les maladies de peau en général, et la lèpre en particulier, étaient signe de malédiction pour ceux qui en étaient victimes. C’est pourquoi, il était fréquent qu’ils se regroupent afin d’avoir un semblant de vie sociale.

Une pièce en deux actes…
Les lépreux ne demandent pas formellement la guérison, ni l’aumône. Jésus suivant la Loi les envoie vers les prêtres qui doivent constater la guérison pour les réintégrer dans la communauté des croyants. L’attitude des dix lépreux est donc pleine de foi puisqu’ils font confiance à Jésus avant même d’être guéris. La première partie de cet Évangile insiste donc sur la puissance de la Parole de Jésus et sur la foi des dix lépreux.
En outre, l’un d’eux semble avoir saisi que Jésus est l’unique prêtre et temple. C’est bien devant lui qu’il se prosterne et qu’il glorifie Dieu. Or c’était un Samaritain. Étonnant ! En règle générale, les Samaritains ne s’associent pas aux Juifs. Et inversement. Notons que la lèpre a réuni, à l’écart du monde, des hommes de ces deux clans. L’impureté unit plus les hommes que la pureté. Or le dessein de Dieu et de son Christ n’est-il pas de rassembler les fils perdus ? Hélas, malade ou guéri, un Samaritain ne pourra aller au Temple de Jérusalem : il en est exclu ! Qui aurait pu dès lors le déclarer pur ? C’est donc ici la pointe de notre récit. Le lieu du Temple ne permet ni la guérison, ni une pleine réconciliation. De la même manière, ce Samaritain ne se rendra pas au mont Garizim (là où se trouve le temple des Samaritains). Il est le seul à avoir reconnu en Jésus celui qui instaure ce nouveau règne de Dieu, unissant, dans la foi, juifs et non-juifs.

Relève-toi et va, ta foi t’a sauvé
C’est une phrase récurrente dans les récits de miracles de Jésus, qui associe foi et salut. Le salut ne réside pas seulement dans la guérison. Il est une renaissance : « Relève-toi », telle une résurrection, un retour à une vie sociale et religieuse qui trouve sa source dans le Christ. Mais il ne s’agit pas d’un retour à une vie passée ou rêvée. La parole de Jésus n’est pas un constat, un diagnostic, mais un envoi. Pour Luc, le véritable salut consiste en cette écoute de sa parole et cette marche à la suite du Christ, celui qui vient révéler la miséricorde de son Père, envers tous ses enfants.

Pour nous aujourd’hui…
Jésus agit partout dans le monde par son Esprit et il ne faut pas s’étonner qu’il le fasse au profit de toute personne quelle que soit sa culture ou sa religion. Les guérisons opérées par Jésus nous invitent à voir dans toute guérison un signe de son action dans le monde. Elles nous invitent aussi à une guérison de notre foi. Guérir notre foi, c’est faire ce passage de la confiance, de la foi en ses œuvres à l’abandon, à la conversion, à la foi en sa personne.

.

Didier Rocca

2025-09-15T17:56:48+02:00

Édito septembre 2025 > Une Œuvre chrétienne

L’Œuvre a été fondée par un prêtre de Marseille, Jean-Joseph Allemand, qui a créé une communauté pour les jeunes qui s’étaient investis depuis les débuts de cette aventure et qui étaient devenus ses proches collaborateurs. Il leur a proposé de se mettre au service des enfants en s’engageant dans la vie religieuse. Ceux que l’on appelle les Messieurs de l’Œuvre en sont les successeurs. Ce sont des chrétiens qui ont la charge et la responsabilité de mettre en œuvre les intuitions et la mission proposées par Monsieur Allemand et fondées sur l’Évangile.
La mission de l’Œuvre
Notre fondateur a défini la mission de l’Œuvre par une formule qui n’est pas très compréhensible de nos jours : « Aider les jeunes et les membres de la communauté à se sanctifier ». On pourrait dire avec des mots plus actuels : accompagner les jeunes dans leur rencontre avec Dieu, dans leur croissance humaine, afin qu’ils trouvent le sens de leur vie, qu’ils s’épanouissent, qu’ils grandissent en liberté, qu’ils se découvrent aimés et pardonnés, et qu’ils comprennent que le bonheur est dans l’engagement, le partage et le service. Ainsi ils avancent vers l’idéal que le Christ propose comme chemin vers la vie en plénitude. Monsieur Allemand et les responsables de l’Œuvre à sa suite ont ainsi veillé à accueillir le plus grand nombre de jeunes afin qu’ils trouvent leur chemin de sanctification, et pas seulement les jeunes déjà christianisés. Dans le contexte de la fondation de l’Œuvre en 1799, au sortir de la Révolution française, le christianisme avait perdu de son influence dans la société, et certains jeunes accueillis à l’Œuvre étaient issus de famille éloignées de l’Église. D’ailleurs, dans les anciens registres d’inscription qui sont dans nos archives, on trouve devant un grand nombre de noms de jeunes la mention : « tout à faire », pour dire que les enfants n’étaient ni baptisés ni catéchisés.

Pas seulement
 pour les chrétiens
L’histoire de l’Œuvre couvre les xixe et xxe siècle, et au cours de son histoire elle a connu des périodes où les jeunes inscrits étaient presque tous chrétiens. L’Œuvre pouvait être considérée comme une Œuvre pour les chrétiens. L’époque actuelle, pour ce qui concerne l’appartenance religieuse des jeunes inscrits à St-Sa, présente des similitudes par rapport à l’époque des débuts de l’Œuvre. Certains jeunes inscrits ne sont pas baptisé ni catéchisés, issus de familles aux références religieuses mixtes ou indifférentes à la dimension religieuse. Les parents ne sont pas contre le fait que nous proposions à leurs enfants de découvrir le message chrétien et que nous les accompagnions dans une compréhension de la vie ouverte à la spiritualité, mais cette question n’est pas leur première préoccupation. Il y a aussi au sein de l’Œuvre des animatrices et des animateurs qui cheminent et ne sont pas baptisés ; ils sont cependant conscients que la dimension religieuse est au cœur de la vie de l’Œuvre, et ils sont partie prenante de l’aspect spirituel de notre proposition éducative. Ils avancent eux aussi tout en accompagnant les jeunes qui leur sont confiés. On peut donc dire que l’Œuvre est chrétienne bien que n’étant pas seulement pour les chrétiens ni pour faire des chrétiens, car nous ne pouvons pas obliger une personne à être chrétienne, le respect de la liberté de chacun étant un point fondamental de l’acte éducatif.

Une Œuvre chrétienne
La question de ce qui définit une Œuvre chrétienne est donc légitime. Si le but de l’Œuvre n’est pas de s’occuper exclusivement des jeunes chrétiens ou de convertir au catholicisme ceux qui la fréquentent, qu’est ce qui la définit comme chrétienne ? En réalité, l’Œuvre est chrétienne dans ce qui fonde son action et sa conception de la vie et de l’éducation. Nos manières d’accueillir les jeunes, de les accompagner, de les respecter, d’espérer en eux, de pardonner et d’ouvrir un avenir au-delà de l’échec ou de l’erreur, définissent la catholicité de notre action. À la suite du Christ, nous essayons de recevoir chaque jeune comme une personne unique, aimée et dépositaire de potentialités à faire émerger. À la suite des premiers chrétiens, nous essayons de recevoir chaque jeune comme étant le Christ lui-même, considérant que toute personne humaine est habitée par l’esprit d’amour de Dieu. Ainsi, ce qui fait que l’Œuvre est chrétienne, c’est sa manière d’être plus que le public auquel elle s’adresse. Est-ce un renoncement par rapport à la mission que l’Église nous propose d’assumer ? Bien au contraire ; car le but de l’Église n’est pas de s’occuper d’elle-même ni de faire nombre, mais d’être au cœur du monde le signe et le moyen de la présence et de l’action de Dieu. Cette présence de Dieu dépasse l’appartenance religieuse ou la pratique rituelle. Nous accomplissons notre mission chrétienne lorsque nous témoignons de cette foi en la présence de l’esprit d’amour de Dieu dans toute existence humaine. Dans le cadre de l’Œuvre, nous avons la chance d’exprimer en toute liberté notre foi et notre espérance en cette action de l’Esprit Saint dans le cœur des jeunes, tout en respectant la liberté et le cheminement de chacun. Cette liberté et ce respect nous prémunissent de tout pessimisme et de tout prosélytisme. Nous croyons que chaque jeune est habité par l’esprit d’amour de Dieu qui s’incarne de manière mystérieuse en nous, et qui se révèle lorsque nous arrivons à mettre la fraternité et l’amour au cœur de nos relations. Nous sommes invités, à la suite du Christ, à respecter le cheminement de chacun, à nous émerveillés des fruits de cette présence en chacun, et ce faisant nous avançons nous aussi sur notre propre chemin.

Olivier

2025-08-24T14:46:57+02:00

L’Évangile du mois de septembre 2025

Nous lirons ce passage le 1er juin, en ce dimanche « coincé » entre la fête de l’Ascension et celle de Pentecôte….

Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc

En ce temps-là, Jésus disait aux pharisiens : « Il y avait un homme riche, vêtu de pourpre et de lin fin, qui faisait chaque jour des festins somptueux. Devant son portail gisait un pauvre nommé Lazare, qui était couvert d’ulcères. Il aurait bien voulu se rassasier de ce qui tombait de la table du riche ; mais les chiens, eux, venaient lécher ses ulcères. Or le pauvre mourut, et les anges l’emportèrent auprès d’Abraham. Le riche mourut aussi, et on l’enterra. Au séjour des morts, il était en proie à la torture ; levant les yeux, il vit Abraham de loin et Lazare tout près de lui. Alors il cria : “Père Abraham, prends pitié de moi et envoie Lazare tremper le bout de son doigt dans l’eau pour me rafraîchir la langue, car je souffre terriblement dans cette fournaise.”
– Mon enfant, répondit Abraham, rappelle-toi : tu as reçu le bonheur pendant ta vie, et Lazare, le malheur pendant la sienne. Maintenant, lui, il trouve ici la consolation, et toi, la souffrance. Et en plus de tout cela, un grand abîme a été établi entre vous et nous, pour que ceux qui voudraient passer vers vous ne le puissent pas, et que, de là-bas non plus, on ne traverse pas vers nous.
Le riche répliqua : “Eh bien ! père, je te prie d’envoyer Lazare dans la maison de mon père. En effet, j’ai cinq frères : qu’il leur porte son témoignage, de peur qu’eux aussi ne viennent dans ce lieu de torture !”
Abraham lui dit : “Ils ont Moïse et les Prophètes : qu’ils les écoutent !”
– Non, père Abraham, dit-il, mais si quelqu’un de chez les morts vient les trouver, ils se convertiront.
Abraham répondit : “S’ils n’écoutent pas Moïse ni les Prophètes, quelqu’un pourra bien ressusciter d’entre les morts : ils ne seront pas convaincus.” »

Le contexte
La parabole précédente invitait les disciples à être des gérants généreux en grâce et en miséricorde de Dieu. Le cadre de cet épisode est cette fois plus conflictuel car la suite des versets voit revenir des pharisiens sur le devant de la scène. Cette parabole vient dénoncer un rapport à l’argent, à la Loi et aux autres pervertis. Remarquons que si on peut être en règle dans notre comptabilité, on ne l’est jamais avec Dieu. N’oublions pas aussi le lien fort entre l’amour de Dieu et du prochain.

 

L’un riche, l’autre pauvre
Dans sa parabole, Jésus commence par présenter deux personnages que tout oppose : l’un est riche, l’autre pauvre ; l’un est vêtu de pourpre, l’autre couvert d’ulcères. La pourpre et le lin n’évoquent pas seulement que cet homme vit dans le luxe, mais cela révèle aussi son rang social élevé. Le riche mène grand train alors que le pauvre n’a accès à aucune miette, et n’a que des chiens pour compagnie. Tout oppose donc ces deux personnes. L’un semble comme béni de Dieu avec ses richesses, son statut social tandis que le pauvre semble maudit de Dieu, miséreux et même misérable.

Le riche anonyme 
et le pauvre Lazare
Méfions-nous des apparences entre ces deux hommes. Le prestige de l’homme vêtu richement le placerait du côté de la bénédiction divine à laquelle n’a pas accès celui qui est apparemment maudit aux yeux des hommes. Mais déjà la parabole introduit un point bénéfique non négligeable en faveur du pauvre : il est le seul ici dont nous connaissons le nom. Le riche est et restera anonyme. En prononçant son nom, Jésus introduit Lazare dans une bénédiction : il est un familier de Dieu. Ce riche anonyme peut, quant à lui, porter tous les noms : celui des pharisiens comme celui de l’auditeur, mais aussi le nôtre.

Un père et deux fils :
 une fraternité malade
Deux fils, Lazare et le riche. Un père, Abraham. Un fils qui se croit loin de Dieu parce qu’il a vécu dans la misère la plus totale et un autre, le riche qui se croit proche parce qu’il a vécu dans l’abondance. Cela ne te rappelle rien ? Cet épisode n’est pas sans liens avec la parabole des deux fils puisqu’il est question aussi de fraternité. À deux reprises, le riche s’adresse à Abraham en disant « Père Abraham » ou« Mon Père ». Certes, il implore son pardon mais il n’en tire pas toutes les conséquences. Le riche a une vision réduite de la fraternité. Jamais, il ne s’adresse directement à son frère. Il ne se rend pas compte que Lazare est son frère. Ses richesses l’ont empêché de communiquer et d’entrer en communion avec lui. Un abîme, un fossé, un monde sépare le riche de Lazare. À notre mort, nous serons sans richesses matérielles mais aurons-nous été fraternels grâce à elles de notre vivant ?

Pour actualiser
Jésus, par sa vie pauvre et sa mort sur la croix, nous rappelle que la bénédiction de Dieu n’est pas liée au statut social ou à la réussite mondaine. En avons-nous bien conscience ? De plus, la fraternité, véritable fil rouge de toute la révélation biblique, reste encore à consolider. À notre mesure, efforçons-nous de regarder toute personne comme un frère, une sœur !

.

Didier Rocca

2025-08-24T14:44:51+02:00