Spiritualité

Édito juin 2024 > Sport et religion

Avec l’arrivé de la flamme olympique à Marseille et l’ouverture prochaine des J.O. de Paris, nous entrons dans une période durant laquelle le sport et la rencontre des autres auront une grande place. Dans un contexte international traumatisé par les conflits, la violence, les guerres et les inégalités, oser la rencontre et prôner la fraternité a du sens et peut nous aider à comprendre que nous sommes dans l’obligation de vivre ensemble et d’être solidaires si nous voulons trouver des solutions durables pour offrir un avenir viable aux générations futures.

École de la vie
Le sport est aussi l’occasion de redécouvrir de beaux principes de vie, qui ne sont pas sans rapport avec les messages de fraternité, de solidarité et d’engagement que nous transmettent les religions. D’ailleurs, il ne manque pas de références sportives dans les écrits religieux et dans les grands textes fondateurs. Le dépassement de soi, l’effort, le courage, la concentration, l’entrainement, la joie de la réussite et du partage, le sens du collectif… tout cela peut nous aider à vivre et à comprendre le véritable sens de l’existence. S’il y a de la compétition, nous savons d’expérience qu’elle trouve son sens non dans la haine de l’autre – même si nous sommes hélas parfois témoins du dévoiement de ce beau principe et par des violences qui dénaturent l’esprit sportif à sa racine – mais dans l’émulation, pour donner le meilleur de soi-même.

Goût de l’effort
Avec le sport, nous découvrons que la facilité n’est pas bonne conseillère et que savoir se donner de la peine pour atteindre un objectif est source de joie et d’accomplissement. Nous vivons aussi cela dans la vie collective à l’Œuvre, en particulier pendant les camps, et tout spécialement lors des activités sportives ou des randonnées. S’il y a de la peine à faire des effort, il y a un grand bonheur à parvenir à un sommet ou un point d’étape qui nous semblait impossible à atteindre. Ce que nous expérimentons physiquement s’enracine profondément dans notre être et peut nous aider à vivre les grandes étapes et épreuves de notre vie. Quand l’impossible devient possible, alors on comprend ce que veut dire espérance et confiance.

Force du collectif
Avec le sport nous sommes aussi invités à découvrir la force du collectif. Même pour les épreuves individuelles, nous savons bien que c’est en équipe que l’on s’entraine, que l’on progresse, que l’on se stimule. Et pour les sports d’équipe c’est encore plus flagrant. Les qualités d’une équipe reposent sur les capacités individuelles, mais aussi et surtout sur la manière de collaborer, de se soutenir, de s’entraider et de trouver sa juste place en laissant l’autre trouver la sienne. C’est aussi ce que tout groupe et communauté découvre et met en place. Pour les chrétiens, nous parlons de « vivre en Église », dans le sens où nous comprenons que nous faisons partie d’un corps plus grand que la somme de nos individualités et que nous sommes chacune et chacun membres de ce corps, différents, complémentaires, unis sans être identiques.

Joie du partage
Cette force du collectif porte des fruits dans l’entrainement et l’émulation, mais aussi dans la grande joie de vivre ensemble. En cas de victoire c’est évident, mais même en cas d’échec ou de difficulté, le fait d’avoir vécu une expérience extrême avec d’autres, d’avoir traversé les étapes qui mènent à une rencontre décisive, nous fait rentrer dans une dimension particulière du sens de l’existence. C’est aussi ce que vivent les jeunes lors de leur passage à l’Œuvre et en camp. L’expérience de la vie collective, du partage, du service, de l’entraide et de la solidarité, peut fonder une vie tournée vers les autres et en capacité d’engagement.

Honnêteté
Le sport est aussi une école d’honnêteté. S’il faut toujours combattre la triche, l’anti-jeu ou le dopage, les authentiques sportifs savent bien que ce n’est pas par peur du gendarme et de la sanction que l’on résiste à ces facilités, mais parce que si l’on ne vit pas honnêtement sa démarche sportive, alors on passe à côté de ce qu’elle peut nous apporter. Une victoire en trichant n’a pas le même goût qu’une victoire honnête, ni même qu’une défaite en ayant la fierté de s’être donné à fond. Nous sommes souvent tentés par la facilité de la triche, mais nous savons qu’elle ne porte pas de fruit ; tout comme l’argent volé reste souvent de l’argent « sale », que l’on ne dépense pas de la même manière que celui qui a été gagné à la sueur de son front et dont on peut être fier.

Foi, espérance, charité
Le Christ, tout au long de son existence, a fait preuve d’une grande endurance, d’une honnêteté sans faille, d’un esprit collectif incomparable. Il a su passer le relais à d’autres, en leur faisant confiance, même au-delà de leurs échecs ou de leurs failles. En cela il nous ouvre un chemin de vie et nous donne à voir un visage de l’humanité qui peut nous inspirer… Dans les principes fondamentaux du sport on peut retrouver les vertus théologales que sont la foi, l’espérance et la charité.

Olivier

2024-05-21T22:42:54+02:00

L’Évangile du mois de juin 2024

Nous lirons ce passage le dimanche 9 juin, le 10e dimanche du temps ordinaire.
À l’Œuvre, ce sera le dimanche des premières communions…

Évangile de Jésus-Christ selon saint Marc

En ces temps-là, Jésus revint à la maison, où de nouveau la foule se rassembla, si bien qu’il n’était même pas possible de manger. Les gens de chez lui, l’apprenant, vinrent pour se saisir de lui, car ils affirmaient : « Il a perdu la tête. » Alors arrivent sa mère et ses frères. (…) Restant au-dehors, ils le font appeler. Une foule était assise autour de lui ; et on lui dit : « Voici que ta mère et tes frères sont là dehors : ils te cherchent. » Mais il leur répond : « Qui est ma mère ? Qui sont mes frères ? » Et parcourant du regard ceux qui étaient assis en cercle autour de lui, il dit : « Voici ma mère et mes frères. Celui qui fait la volonté de Dieu, celui-là est pour moi un frère, une sœur, une mère. »

Le contexte
Jésus revient à la maison. Elle se trouve à Nazareth, là où il a vécu une trentaine d’années avec sa famille. Il retrouve les siens après une première série de miracles effectués hors de sa ville natale et qui ont marqué les esprits. L’Évangile de ce jour est composé de deux épisodes qui évoquent les liens que Jésus entretenait avec sa famille.

Jésus étouffe
La première scène est particulièrement étonnante. Jésus est là et on ne peut même pas manger. C’est quand même incroyable, la plénitude du Royaume de Dieu, le Christ en personne est là et on ne peut pas manger ! Celui que Jean appellera le « pain de vie » empêche par sa présence à ses proches de pouvoir manger. Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond. De plus, sa famille ne reconnait pas en lui le Messie, mais le petit charpentier qu’il a toujours été à la suite de Joseph. La foule l’oppresse et le considère comme un faiseur de miracles, comme une bête de foire. Bref, le début de la vie publique de Jésus est ici mal perçu.
Cela devrait nous rassurer chacun dans nos missions respectives : parents, personnes consacrées ou en recherche, nous aimerions parfois que notre chemin soit plus facile, que nos familles soient plus conciliantes avec nous.

Tel maitre, tels fils…
Ne prétendons pas vivre autrement que notre Seigneur Jésus-Christ. Accueillons les embûches de nos vies pour ce qu’elles sont, sans leur donner trop d’importance. Si nous regardions plus souvent les plus petits que nous devons servir, nous relativiserions davantage nos contrariétés, nos difficultés dans la mission ou dans nos vies. Et avec nos familles, acceptons de parfois être incompris, une occasion de plus de grandir en humilité.

Il a perdu la tête
Sa famille se fait du souci, « il a perdu la tête » dit l’un de ses proches. Le raisonnement est simple : Jésus est de chez nous, il est donc à nous, il est donc pour nous. C’est un phénomène classique d’appropriation que nous vivons quand nous profitons d’un membre de notre famille pour obtenir un piston ou de l’argent. Or, les miracles les plus impressionnants n’ont pas été exécutés à Nazareth mais ailleurs. Une forme de déception atteint sa famille puisqu’à leurs yeux, il est de chez eux mais il les ignore.

Un nouveau critère de choix
Dans le deuxième petit épisode, Jésus élargit considérablement la notion de famille. Elle n’est plus liée à l’appartenance à un même arbre généalogique mais au partage de la même foi. Font partie de la famille de Jésus « ceux qui font la volonté du Père ». On peut comprendre la circonspection de son entourage et nous, la joie de faire partie de sa famille.

Didier Rocca

Le nom du mois : Nazareth
Que reste-t-il aujourd’hui de ce Nazareth du temps de Jésus ? S’il n’existe plus aucune maison datant de l’époque du Christ, les nombreuses grottes creusées à même la roche sont encore visibles de nos jours. Parmi elles, la « maison de la Vierge » et la grotte de l’Annonciation, des lieux bénis que la tradition célèbre depuis des siècles comme ceux des évènements rapportés dans les Évangiles.

2024-05-20T21:31:27+02:00

Édito mai 2024 > Dieu, Esprit saint

Durant le temps pascal qui s’étend sur cinquante jours après la solennité de Pâques que nous avons célébrée en grande pompe à l’Œuvre, nous avons l’occasion d’approfondir ce qu’implique cette fête de la victoire de la vie contre la mort, de l’amour contre la haine, de la paix contre la violence. La Pentecôte clôt ce beau temps liturgique en célébrant le don de l’Esprit saint aux apôtres, et par là même à tous les baptisés par le sacrement de la confirmation. Ainsi nous comprenons que nous sommes baptisés pour participer à la mission de Dieu, à savoir annoncer la Bonne Nouvelle de l’Évangile.

Dieu en nous
L’Esprit saint est une des trois « personnes » de la trinité, avec le Père et le Fils. Dieu est présent par sa force créatrice et recréatrice, que nous attribuons à la figure du Père ; il se fait proche de nous comme un frère pour partager notre vie, nous accompagner, nous ouvrir un chemin par sa vie offerte, ouverte, donnée en Jésus Christ, que nous appelons le Fils ; et enfin, par l’Esprit saint, nous comprenons que Dieu est présent en chacun de nous. La force d’amour de Dieu est agissante au cœur de toute existence humaine et c’est sa manière d’être au monde aujourd’hui que d’agir par nous. À bien y réfléchir, cela devrait nous donner le vertige, car nous comprenons que Dieu – qui nous connait, qui sait notre fragilité et que nous sommes parfois capables du pire – nous fait confiance : il sait que nous sommes aussi capables du meilleur et il compte sur nous pour que nous agissions afin que le monde corresponde à son projet de paix, de fraternité, de justice et d’amour.

Dieu compte sur nous
Nous comprenons aussi que si le Royaume de Dieu est en marche et grandit, cela ne peut se faire qu’avec notre collaboration. Dieu n’agit que par nos mains, nos vies, nos cœurs. Cela nous donne une responsabilité, car nous sommes invités à nous engager à transformer nos vies pour changer le monde. Nous avons tous à prendre notre part de la mission de Dieu. Heureusement, tout ne repose sur nos petites épaules, nous sommes avec d’autres, en groupe, en Église pour agir, et chacun, comme membre d’un même corps, peut trouver sa place et sa fonction afin de faire croitre ce corps et de rendre l’Église agissante pour faire grandir la justice, la fraternité et la paix.

Amour de Dieu
Cette manière de voir les choses nous permet d’appréhender la notion de « puissance de Dieu ». Elle n’est pas une puissance de magie, qui agirait sur les événements. Sinon tout se passerait parfaitement dans le monde, il n’y aurait pas de catastrophes naturelles, d’accidents, d’handicaps ou de maladies ; sinon Dieu serait un tyran ou un sadique qui déciderait que certaines personnes souffrent et que d’autres vivent dans la facilité. Et dans ce cas-là toute personne intelligente avec un esprit critique et une liberté de conscience arrêterait de l’adorer, et au contraire le détesterait, s’en méfierait et le combattrait. Ce n’est pas non plus une force qui nous obligerait à faire des choses contre notre volonté, sinon il n’y aurait plus d’injustice, ni de crime, ni d’inégalités, mais il n’y aurait plus non plus de liberté, nous serions réduits à êtres des marionnettes ou des animaux dans un troupeau ; ce qui fait notre dignité serait réduit à néant et nous tomberions dans la fatalité avec une vision du destin qui serait un chemin imposé. Ce n’est pas non plus une puissance judiciaire qui nous obligerait à faire des choses pour éviter une punition ou pour gagner une récompense, ce qui nous entrainerait dans le registre du mérite et du marchandage ; nos actions seraient alors calculées pour avoir une contrepartie, et l’amour de Dieu ne serait pas gratuit. Dans cette conception, Dieu ne serait pas tout puissant puisqu’il ne pourrait pas aimer ou sauver une personne qui ferait les mauvais choix ou poserait des actes mauvais. Non, la puissance de Dieu est une puissance d’amour et de pardon inépuisable et gracieuse. Rien ne peut l’empêcher de nous aimer et de vouloir le meilleur pour chacun de nous. Dieu ne cherche pas à nous punir mais plutôt à nous accompagner afin que nous ayons une vie qui soit belle et fructueuse.

Mettre l’amour au centre de nos vies
Cela transforme totalement la vision de nous pouvons avoir de la religion, de Dieu et de la relation que nous avons avec lui. Dieu est source de vie et d’amour. Il n’est pas un juge ou un père fouettard dont nous devrions avoir peur ou qui nous tendrait des pièges. Il n’est pas non plus un marionnettiste qui jouerait avec nous et qui déciderait de ce qui se passe dans nos vies. De ce fait, accepter Dieu dans sa vie, lui laisser de la place, le célébrer, décider de répondre à ce que nous comprenons de ce qu’est une vie de croyant et de pratiquant, c’est mettre l’amour au centre de sa vie et décider de vivre en cohérence avec cet amour que nous concevons comme reçu gratuitement et sans contre-partie. Quand on se sait aimé sans condition et que l’on a compris que cet amour nous accompagne pour traverser les événements de toute notre vie, alors on a envie de lui laisser toute la place, et on comprend que la seule manière de manifester cette acceptation, c’est d’aimer les autres, sans condition et gracieusement. C’est à cela que nous sommes appelés : laisser l’Esprit saint travailler en nous.

Olivier

2024-04-16T15:26:10+02:00

L’Évangile du mois de mai 2024

Lecture des Actes des Apôtres

Quand arriva le jour de la Pentecôte, au terme des cinquante jours après Pâques, ils se trouvaient réunis tous ensemble. Soudain un bruit survint du ciel comme un violent coup de vent : la maison où ils étaient assis en fut remplie tout entière. Alors leur apparurent des langues qu’on aurait dites de feu, qui se partageaient, et il s’en posa une sur chacun d’eux. Tous furent remplis d’Esprit Saint : ils se mirent à parler en d’autres langues, et chacun s’exprimait selon le don de l’Esprit.
Or, il y avait, résidant à Jérusalem, des Juifs religieux, venant de toutes les nations sous le ciel. Lorsque ceux-ci entendirent la voix qui retentissait, ils se rassemblèrent en foule. Ils étaient en pleine confusion parce que chacun d’eux entendait dans son propre dialecte ceux qui parlaient. Dans la stupéfaction et l’émerveillement, ils disaient : « Ces gens qui parlent ne sont-ils pas tous galiléens ? Comment se fait-il que chacun de nous les entende dans son propre dialecte, sa langue maternelle ? Parthes, Mèdes et Élamites, habitants de la Mésopotamie, de la Judée et de la Cappadoce, de la province du Pont et de celle d’Asie, de la Phrygie et de la Pamphylie, de l’Égypte et des contrées de Libye proches de Cyrène, Romains de passage, Juifs de naissance et convertis, Crétois et Arabes, tous nous les entendons parler dans nos langues des merveilles de Dieu. »

Le contexte
Nous ne lisons pas ce mois-ci une page d’Évangile mais un passage des Actes des Apôtres, deuxième tome des écrits de Luc, l’évangéliste qui raconte ce jour si particulier au cours duquel est née l’Église…

Pentecôtes
En ce jour de Pentecôte, il y avait du monde à Jérusalem… Normal, de nombreux juifs étaient venus en pèlerinage à Jérusalem pour célébrer cette fête (voir mot du mois). Les disciples étaient réunis tous ensemble. Pour décrire cette expérience unique, Luc convoque des images bibliques bien connues, le feu, le vent. Surtout, il nous dit que les apôtres se mirent à parler en d’autres langues. Arrêtons-nous sur cela : parler la langue de l’autre… Parfois, nous sommes de la même famille, de la même communauté et nous sommes incapables de nous comprendre. L’Esprit Saint nous donne de parler et d’entendre la langue de l’autre. Il nous délivre des incompréhensions liées au langage. Quelle Bonne Nouvelle !

Venus de si loin…
Le récit de Luc détaille l’origine géographique des pèlerins. Certaines régions sont des points chauds du globe : Soudan, Syrie, Ukraine, Libye et j’en passe. Comment ne pas être touché par l’actualité de ces contrées d’Europe et du Proche Orient ? Se pourrait-il que l’Esprit Saint permette à tous les habitants de ces régions de se parler et même de se comprendre ? Non pas avec une même langue comme à Babel. Mais que chacun puisse se faire comprendre dans la langue de l’autre. On imagine les conséquences dans la vie du monde : une paix durable, une fraternité retrouvée. Ce migrant trouvera-t-il un Crétois parler sa langue pour lui permettre d’envisager un avenir meilleur ? Ce réfugié ukrainien pourra-t-il dialoguer dans sa langue avec un Égyptien pour lui redonner courage ? De la même manière, dans tous les conflits, qu’ils soient entre personnes ou entre États, saurons-nous nous montrer dociles à l’Esprit Saint pour parler et entendre la langue de l’autre ?

Tous, nous les entendons parler dans nos langues les merveilles de Dieu
L’Esprit Saint n’agit pas individuellement. Il souffle sur tous. Effectivement. Mais il ne peut être reçu que par chacun. Si comme le note Luc, certains se moquent et prennent les apôtres pour des ivrognes, soyons, grâce à l’Esprit Saint, frères en humanité de ces pèlerins du monde entier. Si notre monde manque de quelque chose, c’est surtout de fraternité, de solidarité, d’amour vécu concrètement. Que l’Esprit Saint en ce jour de Pentecôte nous fasse devenir vraiment des frères à l’image du Fils de Dieu fait homme qui s’est fait frère !.

Didier Rocca

Le nom du mois : Pentecôte
Pour les juifs, Pentecôte renvoie au don de la Loi sur le mont Sinaï sur des tables de pierre grâce à Moïse.
Pour les chrétiens, Pentecôte rappelle le don de l’Esprit au Cénacle dans le cœur de chacun.

2024-04-16T15:28:39+02:00

Édito avril 2024 > Difficile équilibre

La période politique qui s’ouvre devant nous est importante, elle va être marquée par les prochaines élections européennes, et entre en résonance avec la situation socio-politique sur toute notre planète. Il est de plus en plus difficile de se repérer et d’avoir des informations ou des idées vraiment objectives et impartiales. Chacun de nous est en permanence confronté à des choix. Comment se positionner en tant que citoyen, parent, croyant ? On voit bien que les mouvements politiques extrémistes et populistes ont le vent en poupe et que certains responsables politiques surfent allègrement sur cette vague, sans prendre la mesure du danger qu’ils font courir à humanité en ces temps où la solidarité et la fraternité devraient nous permettre de traverser les crises sociales, humanitaires, écologistes et éducatives qui nous attendent. Nous pouvons nous désoler de cet état de fait, mais nous pouvons aussi lutter contre cette facilité à ne penser qu’à court terme et de manière idéologique. Cela demande des efforts pour faire la part des choses et éviter les amalgames et les clivages qui ne servent que les intérêts électoralistes de certains sans servir le bien commun.

Manipulation
La grande difficulté pour nous qui ne sommes pas des spécialistes de la chose politique, c’est d’arriver à y voir clair alors que nous sommes souvent « enfumés » par des discours et des idéologies troubles, qui se targuent de nous faire entrer dans une pensée sans nuances qui a pour objectif de nous empêcher de réfléchir. Les plus flagrantes manipulations de ces derniers temps sont bien identifiées lorsqu’elles viennent du pouvoir autoritaire russe, mais il ne faudrait pas imaginer qu’il n’y en a pas d’autres tout aussi néfastes, bien que plus discrètes. Par exemple, on ne peut pas critiquer l’attitude du gouvernement de Benyamin Netanyahou qui attise la haine suite aux attentats perpétrés par des terroristes du Hamas sans être taxé d’antisionisme ou d’antisémitisme. Comme si l’État hébreu se réduisait à ce gouvernement entraîné dans une spirale de violence insensée, comme si le peuple israélien dans son ensemble cautionnait les exactions et les injustices infligées aux palestiniens de la Bande de Gaza. Critiquer cette escalade ne veut pas dire que l’on cautionne les actes terroristes et les prises d’otages ou que l’on prend parti pour la cause palestinienne. Mais si nous voulons préserver la paix et la fraternité, nous nous devons d’avoir une vision globale et libre qui nous permet de comprendre que la seule manière de lutter contre la violence est de savoir en déjouer les engrenages. Cela ne veut pas dire que les peuples n’ont pas le droit de se défendre, c’est légitime et hélas parfois nécessaire face à la barbarie et à l’injustice, mais la violence physique ne peut être qu’une solution à court terme qui doit céder le pas à d’autres étapes bien plus fructueuses, à savoir la négociation, la réparation, et au bout de chemin la réconciliation… voire idéalement le pardon. Nous en avons de magnifiques exemples dans notre histoire récente, en particulier avec ce qui a été mis en place suite à la Seconde Guerre mondiale. Qui aurait cru en 1940 que l’Allemagne et la France seraient les partenaires qu’elles sont devenues dans la construction de l’Europe ? Et les exemples ne manquent pas. En relisant notre histoire, nous pouvons trouver l’inspiration pour ne pas faire les mêmes erreurs et trouver des solutions qui évitent de voir souffrir des populations innocentes.

Enfumage
Il y a encore beaucoup d’autres situations où les clivages et les idéologies empêchent de bien réfléchir et d’avoir l’esprit libre et ouvert. Que l’on parle d’islam, de bioéthique, de migration, d’écologie, de précarité, d’éducation, d’économie, de justice… Sur tous ces sujets, les idées arrêtées et préconçues ont pour effet de suspendre les véritables débats, de brouiller les pistes et de nous inciter à rester figés dans des visions caricaturales aux conséquences dramatiques pour des personnes et des populations. De manière plus égoïste et même cynique, les conséquences sont importantes aussi pour nous, qui ne sommes apparement pas touchés directement par ces questions, car, à long terme, les choix – ou les non-choix – d’aujourd’hui auront un impact sur nos vies. Cela devrait nous inciter à promouvoir une authentique tradition du débat, de la réflexion et de l’information qui dépasse le sensationnel ou l’idéologie.

Ouverture
Parfois, à certains moments de l’Histoire, ou de notre histoire, les points de vue semblent irréconciliables. Ainsi, nous pouvons oser faire un parallèle avec les grands débats des débuts de l’histoire de l’Église chrétienne autour de la figure du Christ. Le cardinal archevêque de Marseille en a récemment éclairé les enjeux dans ses quatre catéchèses de carême à l’église Notre-Dame-du-Mont : avant d’en arriver à une expression claire et unanime, que nous affirmons de manière très apaisée tous les dimanches lorsque nous proclamons le Credo, les débats ont été passionnés, parfois même houleux et acharnés, clivants et violents, idéologiques et réducteurs. On s’est battu, verbalement et parfois physiquement, pour en arriver à comprendre qu’en Jésus il y a parfaite unité et liberté des deux natures humaine et divine. Au nom même du Christ qui est venu rassembler les femmes et les hommes en leur faisant comprendre qu’ils étaient tous enfants de Dieu, frères et sœurs, il y a eu des déchirures, des ruptures, des blessures. Il a fallu que des hommes prennent de la hauteur et sortent des logiques de concurrence pour aider leurs congénères à dépasser leurs divisions et leurs idéologies afin de vivre l’authentique fraternité qui n’est pas une uniformité de façade mais un enrichissement mutuel. Nous devons nous inspirer de ces attitudes d’intelligence et d’ouverture pour affronter les défis de notre temps. Il est facile d’aller vers ce (celui) qui nous est sympathique, agréable, familier. « Aller à la périphérie », comme nous y invite le pape François, est un exercice difficile, périlleux parfois, quand concrètement il s’agit d’écouter les points de vue des autres, de s’ouvrir à des arguments ou des logiques qui nous sont étrangères, voire hostiles. Le dialogue est plus qu’une posture, c’est quasiment un acte de foi car il nous sollicite profondément en tant qu’humain, frère ou sœur de celui ou celle qui ne nous ressemble pas et qui, malgré tout, nous maintient en relation. Nous pouvons essayer de trouver dans la figure du Christ une façon de gérer ces conflits : Jésus a une inclination particulière pour le dialogue, il ne refuse pas le débat, parfois violent, avec ses contradicteurs. Ensuite, il agit et se positionne avec une grande liberté vis-à-vis des rites, des codes, de la norme, de ce qui est « de bon ton » dans la société de son époque. Enfin, Jésus fait des choix radicaux et les assume, il ne se dérobe pas à l’heure critique. Que nos choix de citoyens, de parents, de croyants soient animés par un esprit de liberté, de paix et de fraternité.

Olivier

2024-03-20T21:51:40+01:00

L’Évangile du mois d’avril 2024

L’Évangile du mois sera proclamé le 21 avril prochain au cœur du Temps Pascal. Ce sera le dimanche dit du bon berger en référence aux paroles par lesquelles Jésus nous dit qui il est.

Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean

En ce temps-là, Jésus déclara : « Moi, je suis le bon pasteur, le vrai berger, qui donne sa vie pour ses brebis. Le berger mercenaire n’est pas le pasteur, les brebis ne sont pas à lui : s’il voit venir le loup, il abandonne les brebis et s’enfuit ; le loup s’en empare et les disperse. Ce berger n’est qu’un mercenaire, et les brebis ne comptent pas vraiment pour lui. Moi, je suis le bon pasteur ; je connais mes brebis, et mes brebis me connaissent, comme le Père me connaît, et que je connais le Père ; et je donne ma vie pour mes brebis. J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cet enclos : celles-là aussi, il faut que je les conduise. Elles écouteront ma voix : il y aura un seul troupeau et un seul pasteur. Voici pourquoi le Père m’aime : parce que je donne ma vie, pour la recevoir de nouveau. Nul ne peut me l’enlever : je la donne de moi-même. J’ai le pouvoir de la donner, j’ai aussi le pouvoir de la recevoir de nouveau : voilà le commandement que j’ai reçu de mon Père. qu’il soit manifeste que ses œuvres ont été accomplies en union avec Dieu. »

Pour prendre un bon départ…
À l’occasion de la fête des Tentes, Jésus se trouve à Jérusalem, au cœur du judaïsme. À la suite d’une guérison, il dialogue avec des pharisiens et prononce un discours scandé par deux paroles fortes : Je suis la porte… Je suis le Bon Berger. Nous lisons ici la deuxième partie de son discours.
La figure du berger
Jésus se présente comme le bon, le beau berger. Selon une image courante dans l’Ancien Testament, le Bon Berger, c’est Dieu. Cela veut dire que Dieu a pour chaque être humain l’attention, l’affection même, que le berger a pour un agneau. Il le guide là où il y a un pâturage et de l’eau, il le met à l’abri la nuit dans une bergerie pour qu’il ne soit ni dévoré par une bête ni volé par un brigand, il le soigne quand il est blessé et le recherche quand il est perdu. La théologie chrétienne au cours des premiers siècles a même largement représenté le Christ comme un berger portant un agneau perdu. Cela était pour eux un bon résumé de son rôle et de l’Évangile.
Une figure paradoxale
Pourtant à l’époque de Jésus, les bergers étaient assez mal vus par les intégristes, car il est difficile d’appliquer à la lettre les commandements de la Loi religieuse quand on est dans la nature. En même temps, les bergers étaient réputés être proches de Dieu par la prière (la nature rend humble et admiratif de la création), et par le chant (comme David).

Jésus en tant que berger donne sa vie. 
Qu’est-ce à dire ?
Donner sa vie, c’est avoir confiance en Dieu. C’est la déposer dans les mains d’un Autre, c’est accepté d’être brebis pour un autre. Les religieux, les personnes mariées déposent ainsi leur vie, ils acceptent de dépendre d’un autre.
Donner sa vie, ce n’est pas mourir, c’est vivre. On pense aux difficultés, à la mort, aux renoncements quand on pense au fait de donner sa vie ! Or, le caractère onéreux du don de soi vient du péché. Donner nous conduit au bonheur même si on en a peur, même si on est égoïste.
Donner sa vie, c’est en même temps la recevoir de nouveau. Elle se révèle alors plus profonde, plus belle. On pourra la recevoir, cabossée peut-être, mais embellie, enrichie, fortifiée !
Donner sa vie, c’est aimer toujours plus loin. On ne peut pas aimer en général, sans aimer en particulier. Mais l’amour auquel nous invite Jésus-Christ va plus loin, voit plus grand. En lui, nos horizons s’élargissent à travers ce jeune que j’anime, à travers cette personne que je visite… Les brebis ne sont pas comptées. Elles sont toujours plus nombreuses que ce que j’imaginais.

Didier Rocca

Le nom du mois : Bon Pasteur
Le Bon Pasteur est un des titres par lesquels Jésus s’identifie. Il fait partie des sept paroles qui commence par « Je suis… » que l’on trouve uniquement dans l’Évangile de Jean et qui font allusion à un aspect de la mission de Jésus : le bon Pasteur est celui qui rassemble, guide, cherche celui qui est perdu et donne sa vie pour les autres. Il fait paître ses brebis ou ramène la brebis égarée.

2024-03-20T21:54:23+01:00

Édito mars 2024 > Chemin de conversion

Nous sommes dans le temps liturgique du carême, ces 40 jours de préparation aux fêtes pascales, temps de conversion et d’approfondissement de notre relation à Dieu et aux autres. Nous allons aussi accompagner, tout au long de ces six semaines, le Christ dans sa montée vers Jérusalem, lieu de sa passion, de sa mort et de sa résurrection. Il me semble que le récit de la rencontre du Christ avec un lépreux dans l’Évangile de Marc (Mc 1, 40-45) peut nous aider à comprendre ce que Dieu est venu vivre avec l’humanité en se faisant homme.

Le pur et l’impur
Dans ce récit, Jésus est abordé par un lépreux, homme impur par excellence. Ce pauvre homme, tenu de vivre à l’écart des autres dans des lieux retirés de toute vie sociale et communautaire, ose s’approcher du Christ. Jésus ne le rejette pas, mais entend sa demande de guérison et l’accomplit. L’homme, tout joyeux, s’en va annoncer autour de lui cette bonne nouvelle de sa guérison, désobéissant à l’injonction de Jésus de ne rien dire à personne, et mettant le Christ dans une posture intenable, lui imposant de se cacher dans un lieu désert pour ne pas être assailli de demandes de guérisons et de miracles, lui qui se méfie de l’idolâtrie dont il pourrait être l’objet.

Le mérite et la gratuité
Ce court récit nous donne des repères quand au projet de Dieu dans sa relation avec l’humanité : il accueille l’homme considéré comme impur par ses coreligionnaires. Il ne le rejette pas et ne le culpabilise pas, alors qu’à l’époque on considérait qu’un homme atteint de cette grave maladie de peau extrêmement contagieuse était puni pour la laideur de son âme, et que cette malédiction avait pour cause ses grands péchés. Dans la logique religieuse de ce temps, on considérait que la toute puissance de Dieu était agissante sur les événements et les personnes, et que, Dieu étant bon, si une personne souffrait ou était malheureuse, c’était la conséquence de ses mauvaises actions. C’était une façon de placer le religieux sur le registre de la rétribution : le bonheur et le paradis pour les personnes bonnes, le malheur et l’enfer pour les méchants. Jésus – qui pour les chrétiens n’est pas un simple messager ou un prophète parmi d’autres, mais l’incarnation de Dieu, de sa parole, de son message, de son alliance – nous fait sortir de ce registre du mérite. Il ne dit pas que l’homme mérite son malheur, mais il le guérit, signifiant que la maladie, la souffrance, ne font pas partie du projet de Dieu. Et nous comprenons ainsi que la puissance de Dieu n’est pas une force agissant sur les événements ou sur le matériel, mais qu’elle est en œuvre dans la capacité de Dieu d’aimer toute personne sans condition. C’est cet amour gratuit et gracieux qui peut nous permettre de traverser les épreuves, mais il n’agit pas par magie sur les événements eux-mêmes. Les quelques récits de miracles accomplis par Jésus et relatés dans les Évangiles sont des signes de ce désir de Dieu de lutter contre ce qui défigure les êtres humains et les coupe de la relation aux autres. Jésus n’explique pas le mal ni ne le justifie, mais il le combat. La réponse religieuse à la question de la souffrance et de la mort doit être sur ce registre : encourager, accompagner, être là par amour gratuit pour que cet amour porte du fruit en celui qui souffre et qu’ainsi il ne tombe pas dans le découragement et la fatalité, mais soit dans l’espérance, la foi, la charité.

Conversion
Autre repère que nous donne ce récit, et qui est au cœur du message chrétien et de ce que nous nous préparons à célébrer à Pâques : le Christ ne se contente pas de lutter contre le mal dont est atteint ce pauvre lépreux, mais il s’identifie à l’homme méprisé, culpabilisé et exclu : à la fin du récit, c’est Jésus qui ne peut plus entrer ouvertement dans une ville, mais doit rester à l’écart, dans des endroits déserts, comme le lépreux avant sa guérison. C’est un renversement total, qui peut faire penser à celui dont nous avons été témoins lors de la nuit de Noël, durant laquelle les plus pauvres des hommes, les bergers, ont pris le relais des anges, êtres célestes par excellence, pour chanter la gloire de Dieu. Ici, c’est Dieu, en Jésus, qui se retrouve à la place du lépreux. Nous osons exprimer ce renversement en mettant dans la bouche de Dieu ces mots un peu triviaux : « Vous les hommes, vous êtes fous, vous ne comprenez rien. Vous m’utilisez pour rejeter et condamner les gens avec des notions de pureté et d’impureté qui n’ont rien à voir avec mon amour offert à tous. Pour qui vous prenez-vous ? Vous osez instrumentaliser mon message pour agir à l’opposé de ce que j’essaie de vous faire comprendre et de vivre avec vous ! Si vous voulez jouer à ce jeu-là, alors voyez : je me mets du côté des impurs pour vous montrer l’absurdité de votre manipulation, et je partage la vie des exclus et des méprisés pour vous indiquer de qui je veux être proche en priorité. » C’est cela la véritable conversion : comprendre comme Dieu comprend, regarder comme Dieu regarde, aimer comme Dieu aime…

Olivier

2024-02-20T23:02:48+01:00

L’Évangile du mois de mars 2024

Dimanche 10 mars, nous vivrons le quatrième dimanche du Carême. Ce sera l’occasion de lire un Évangile relatant une belle rencontre entre Jésus et un pharisien.

Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean

En ce temps-là, Jésus disait à Nicodème : « De même que le serpent de bronze fut élevé par Moïse dans le désert, ainsi faut-il que le Fils de l’homme soit élevé, afin qu’en lui tout homme qui croit ait la vie éternelle. Car Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle. Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé. Celui qui croit en lui échappe au Jugement, celui qui ne croit pas est déjà jugé, du fait qu’il n’a pas cru au nom du Fils unique de Dieu. Et le Jugement, le voici : la lumière est venue dans le monde, et les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière, parce que leurs œuvres étaient mauvaises. Celui qui fait le mal déteste la lumière : il ne vient pas à la lumière, de peur que ses œuvres ne soient dénoncées ; mais celui qui fait la vérité vient à la lumière, pour qu’il soit manifeste que ses œuvres ont été accomplies en union avec Dieu. »

Le contexte
Nous sommes au début de l’Évangile de Jean. Une rencontre a lieu de nuit avec un juif pieux, un pharisien appelé Nicodème. Cet homme sage vient interroger Jésus pour mieux le connaître et comprendre ce qui lui permet d’accomplir de tels prodiges.

À propos du serpent de bronze
Cet Évangile évoque l’épisode du serpent de bronze évoqué dans l’Ancien Testament. Lors des quarante années passées dans le désert, les Hébreux sont la proie de dangereux serpents et ils sont convaincus que Dieu les leur envoie pour les punir de leurs infidélités. Doute mortel qui prend figure de serpents venimeux. À leur demande, Moïse intercède pour eux. Il fait un serpent en bronze et le fixe à une perche. Le mal intérieur, caché, sera « élevé de terre », rendu visible sous la forme d’un serpent de bronze. Ceux qui avaient été mordus par un serpent pouvaient regarder le serpent de bronze, ils étaient alors sauvés.

Acte de magie ou acte de foi ?
En fait, Moïse, suivant les directives de Dieu, veut faire comprendre au peuple que les actes de magie sont vains. Ce n’est pas le serpent qui sauve mais bien Dieu. Jésus reprend alors cette histoire bien connue de ses interlocuteurs et fait un parallèle entre Moïse qui a dû utiliser un serpent de bronze élevé de terre pour sauver les Hébreux, et le fils de l’Homme, autrement dit lui-même, qui devra lui aussi être élevé de terre par la croix pour que l’humanité soit sauvée. L’évangéliste Jean voit donc dans le serpent de bronze une préfiguration du Christ crucifié.

Une réflexion sur la Croix
Le fait que Jésus consente à la croix est un acte d’amour indépassable, plus fort que la mort qu’il accueille. C’est pourquoi la croix ne sera pas pour lui enfouissement dans la terre, mais exaltation, élévation au-dessus de la terre.
Regarder le Christ crucifié, c’est regarder notre méchanceté et l’amour, son contraire, qui la surmonte. Notre mort est comme prise dans la mort du Christ. Nous pouvons ainsi prendre conscience de notre péché, et de l’amour qui a amené Jésus à s’en faire librement la victime.

Dieu a tant aimé le monde…
Cette Parole de Jésus synthétise en quelque sorte l’esprit du concile Vatican II dont nous fêtons le 60e anniversaire. Pour l’Église et donc pour chacun de ses membres, il s’agit de se mettre non pas dans une posture de jugement, regardant de haut les personnes, mais dans une posture d’accueil et de dialogue. Cela ne relativise pas les exigences de notre foi. Cela met les choses dans un ordre plus juste, plus conforme à l’Évangile. Il s’agit d’aimer le monde :
Aimer le monde, ce n’est pas dire que tout ce qui s’y vit est bon. Il n’y a pas de naïveté dans ces paroles.
Aimer le monde, c’est s’en sentir proche, c’est prier et travailler pour que celui-ci ressemble à ce que Dieu veut en faire. Aimer le monde, c’est collaborer au salut que Dieu nous donne.
Dieu a tant aimé le monde, pas seulement l’Église. Comprendre cela change notre compréhension de l’action de Dieu et de notre mission comme chrétiens.

Didier Rocca

Le nom du mois : les scrutins
Dans la vie démocratique, les scrutins permettent d’obtenir des élus. Dans la foi catholique, les élus sont ceux qui se préparent au baptême et qui après l’appel décisif célébré par l’évêque sont appelés « catéchumènes ».
Les scrutins lors des 3e-4e-5e dimanches de carême sont célébrés par exorcismes. Ces prières par lesquelles Dieu agit, rappellent aux catéchumènes que la liberté est un don que Dieu nous fait si nous acceptons de nous en remettre à Lui, de remettre nos fragilités et nos faiblesses entre ses mains. En disant cela aux catéchumènes, qui dans l’ardeur des commencements peuvent penser qu’ils viendront à bout de tous les obstacles, l’Église le dit aussi à toute la communauté. En effet, l’Église porte en elle l’expérience que le salut est donné gratuitement par Dieu. Elle porte l’expérience de tous ces combats, heureusement perdus, qui ont enfin ouvert la possibilité à l’Esprit saint d’agir. La place est alors ouverte à l’Esprit de Dieu qui seul est la Liberté, qui seul peut conduire vers le grand large. « Lui dont on ne sait ni d’où il vient ni où il va. »

(D’après un commentaire du Père Christian Salenson
dans la revue Points de repères en 2009)

2024-02-20T23:07:42+01:00

Édito février 2024 > Vivre sans Dieu ?

« Peut-on vivre sans Dieu ? » C’est la question que nous nous sommes posée avec les aînés lors d’une soirée discussion pendant le camp de ski à Larche à Noël. Ça a été l’occasion d’un bel échange. Nous nous sommes d’abord posé la question de ce que signifiait « vivre », et nous avons fait la distinction entre « donner du sens à sa vie » et « survivre » – c’est-à-dire les choses élémentaires comme se nourrir, se vêtir, s’abriter, se protéger des intempéries, des dangers et des ennemis potentiels, être en bonne santé, se reproduire… Et nous sommes convenus que la réponse est assez claire sur cette question de la survie, que nous partageons avec le monde animal : il est tout à fait possible de se passer de Dieu, de spiritualité ou de religion pour cela. Par contre, pour ce qui est de la question de donner du sens à sa vie, la réflexion est importante et la réponse moins évidente.
Dieu / Religion / Spiritualité
Nous avons alors approfondi la question, en distinguant Dieu, la religion et la spiritualité. Nous ne pouvons que constater que beaucoup de nos contemporains ne se retrouvent pas dans les religions, et qu’ils s’en passent sans pour autant être de mauvaises personnes. Donc, oui, effectivement, on peut vivre vivre sans religion. Pas besoin de religion pour avoir des principes et des repères dans son existence, et pour bien vivre avec les autres.
Pour ce qui est de la spiritualité, nous constatons que c’est une dimension importante dans la vie de beaucoup de personnes, mais que cette notion est tellement large qu’elle peut être, pour certain, déconnectée de la transcendance et du rapport au divin. C’est parfois un rapport à soi-même qui est recherché dans certains courants spirituels ou pratiques de méditation, un rapport à la nature, à la respiration, à la contemplation…

Envisager Dieu
Pour ce qui est de « vivre sans Dieu », nous ne pouvons répondre à cette question que si nous arrivons à préciser ce que nous entendons par « Dieu ». Lors de nos échanges, nous nous sommes posé la question de savoir si ce que nous nommons Dieu est un grand marionnettiste qui décide de tout ce qui se passe sur terre et dans nos vies, et nous ne nous sommes pas reconnus dans cette conception qui induit une religion magique qui ne rendrait pas les personnes libres. Nous ne nous sommes pas reconnus non plus dans une vision d’un Dieu qui serait un juge, qui pèserait nos vies à la balance pour voir si nous mériterions, selon nos actions bonnes ou mauvaise, la récompense ou la punition. Dans ce que nous avons compris du message chrétien, la justice de Dieu n’est pas une justice de condamnation, mais une justice de rétablissement dans la dignité, de réaction contre l’injustice, de lutte contre le mal en nous pour mettre en valeur le bien, le bon et le vrai.

Dieu, source de tout amour
Nous en sommes arrivés à la conclusion que ce que nous appelons Dieu, c’est la source de tout amour, qu’il est présent dans toute personne, dans toutes les relations, et qu’il n’a pas de frontière, pas même celles que nous savons si bien dresser entre croyant et non-croyant, entre pratiquant et non-pratiquant, ou entre les religions. Si Dieu est amour, alors sa puissance se révèle dans sa capacité à se donner à tout le monde et à être totalement gratuit, en dehors de toute notion de mérite. La force de l’amour, ce n’est pas d’agir sur les événements ou les éléments, mais de transformer les cœurs. Ainsi nous pouvons répondre, après toutes ces précisions, que personne ne peut vivre sans Dieu, c’est-à-dire sans amour. Même si les gens ne se reconnaissent pas dans les discours des religions ou les conceptions de Dieu proposées par les grands courants spirituels, cela ne veut pas dire qu’ils ne sont pas habités par l’amour de Dieu. Nous nous devons de respecter leur conception d’une vie sans Dieu, mais, comme croyants, nous ne pouvons pas cesser de croire que Dieu est présent dans leur vie et qu’il est la source de ce qui y est beau, bon et vrai. Notre mission consiste aussi à savoir nous émerveiller de cette présence de Dieu en chaque personne humaine.

Mettre en pratique l’amour reçu
Cette manière de voir les choses peut nous permettre aussi de comprendre pourquoi les croyants donnent une grande importance à la religion : elle est le moyen de toujours mieux comprendre la bonne nouvelle chrétienne et de la vivre concrètement par des pratiques religieuses qui ne sont pas dans le registre du mérite – comme s’il fallait être un bon pratiquant des rites religieux pour être aimé de Dieu – mais parce que nous avons besoin que notre foi soit vécue concrètement, physiquement et communautairement, car nous sommes des êtres incarnés pour qui l’essentiel passe par notre corps. Les pratiques rituelles et religieuses ne sont pas des fins en soi, elles aident les croyants à toujours mieux comprendre qu’ils sont habités par l’amour, et que la réponse à cet amour reçu gracieusement se manifeste dans l’amour donné gratuitement aux autres.

Dieu, une personne
Cette acception de Dieu comme amour peut sembler incompatible avec la personnification de Dieu dans les grandes religions monothéistes. Pour les croyants c’est très cohérent : l’amour se donne à voir et se vit en nous, mais aussi et surtout dans les relations que nous établissons les uns avec les autres. Le récit biblique inaugure, avec le peuple hébreu, cette relation entre le Dieu d’amour et les hommes, le plus souvent par l’intermédiaire des prophètes. Pour les chrétiens, cette relation interpersonnelle entre Dieu et l’humanité s’accomplit pleinement dans son incarnation en Jésus. Par sa proximité avec nous, Jésus amène l’humanité à comprendre et à accueillir ce qu’il désire que nous vivions avec lui et les uns avec les autres : une relation de confiance, de fraternité, de filiation qui transforme toutes nos relations humaines en relation d’amour.

Olivier

2024-01-30T18:45:34+01:00

L’Évangile du mois de février 2024

Le 4 février prochain, nous entendrons le résumé d’une journée de Jésus à Capharnaüm. Le moins que l’on puisse dire est qu’il ne chôme pas…

Évangile de Jésus-Christ selon saint Marc

En sortant de la synagogue, il se rendit à la maison de Simon et André, avec Jacques et Jean. La belle-mère de Simon était au lit avec de la fièvre : tout de suite ils lui en parlent.Jésus s’approche et la soulève en la prenant par la main : la fièvre la quitte et elle commence à leur faire le service. Au soir, dès que le soleil fut couché, on commença de lui amener tous ceux qui souffraient de maladies ou de démons. 33 La ville entière se pressait devant sa porte. Jésus guérit de nombreux malades, atteints de diverses maladies, et chassa de nombreux démons. Mais il ne laissait pas parler les démons, car ils l’avaient reconnu. Au petit matin, alors qu’il faisait encore nuit, Jésus se leva, sortit et s’en alla dans un lieu désert. Il y resta en prière. 36 Simon et ses compagnons se mettent à sa recherche et, quand ils le trouvent, ils lui disent : « Tout le monde te cherche. » Il leur dit alors : « Sortons d’ici, allons aux villages voisins pour que j’y prêche aussi ; c’est pour cela que je suis sorti. » Il alla donc prêcher dans leurs synagogues par toute la Galilée ; il chassait aussi les démons.

Le contexte
Marc se fait l’écho tout au long de l’Évangile de la pensée de Pierre. Nous sommes au début de l’Évangile de Marc. La scène se situe à Capharnaüm, ville où habite Pierre. Jésus vient d’appeler quatre pêcheurs de métier Simon (Pierre), André, Jacques et Jean. Ensuite, il enseigne avec autorité dans la synagogue. Marc poursuit le récit d’une journée-type de Jésus et résume en quelque sorte toute l’activité de Jésus durant ces trois années de vie publique.

Que fait-il ?
Il guérit les malades, chasse les démons. Et dans ce rythme effréné, Jésus nous montre qu’il n’oublie pas l’essentiel dans son désir de prendre de la distance et de prier. Enfin, Jésus ne reste pas enfermé dans un lieu, une activité, il part. Sa vie est itinérante. Il est toujours en mouvement.

Un secret mal gardé
Au verset 34, une phrase énigma-tique : « Jésus ne laissait pas parler les démons, car ils l’avaient reconnu. ». Pourquoi donc ce secret ? Personne ne parvient à connaitre Dieu en quelques jours. Il faut un long temps d’amitié avec Dieu, avec le Christ pour le connaitre vraiment et pour pouvoir en dire quelque chose de vrai. Des définitions ne nourrissent pas le cœur si elles ne sont pas habitées d’un vrai amour. Une juste compréhension de l’identité de Jésus passe nécessairement par la Croix.

Quel est donc le sens de toutes ces guérisons ?
Une carotte pour attirer les gens afin qu’ils croient ? Ce serait terriblement choquant. Les miracles en général et les guérisons en particulier sont des signes pour dire que le Royaume de Dieu vient, qu’il s’approche. S’il est vrai que le risque est grand de repartir guéri sans avoir rencontré Dieu, Jésus l’assume. Petit à petit, il rapprochera guérison physique et conversion du cœur, miracle et foi.

Pour actualiser
Enfin, l’attitude de Jésus en tant qu’évangélisateur dit quelque chose de notre attitude. L’action (servir, soulager) et la contemplation (prier, faire silence) doivent aller de pair. Voici quelques phrases de notre ancien évêque Mgr Georges Pontier qui résume ce nécessaire équilibre :
« Tel est le beau défi du christianisme : tenir en même temps l’amour de Dieu et l’amour des frères, la mystique et le social, l’approfondissement de la vie spirituelle et le dynamisme de l’engagement pour les plus pauvres. Il s’agit pour nous de ne pas réduire le christianisme à des exercices de piété désincarnés, ni à un engagement humaniste sans intériorité ni référence à Dieu » (Lettre pastorale, Pâques 2011).

Didier Rocca

Le nom du mois : se lever
Le matin du sabbat, le samedi matin, Jésus prend la belle-mère de Pierre et l’aide à se lever. Le dimanche matin à la première heure, Jésus se lève pour aller rencontrer son Père. Au matin de Pâques, le Père fera relever Jésus d’entre les morts. Autrement, dit le verbe « se lever » dit beaucoup plus qu’une attitude du corps, il évoque la résurrection. Pour Marc, se lever est synonyme de ressusciter.

2024-01-24T13:53:03+01:00