Olivier

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Camp Hiver 2023 > les Grands Cadets

Les Grands Cadets à Larche

Bienvenue au camp Grand Cadet. À travers cette lecture vous allez découvrir la joie qui était de passer quelques jours avec le groupe, nous avons partagé le camp les Benjamins, le début de l’aventure !
Une première expérience pour les Grands Cadets qui avaient la liberté de skier seuls à condition d’être par groupe de 3 minimum. Mais très rapidement naturellement nous formions un groupe unique sur les pistes.
Nous partagions beaucoup de choses et beaucoup de rires. Tous les soirs nous retrouvions les Benjamins, on partageait le repas et les jeux du soir. Ça a été très riche en partage, car les GKD’s et BJ’s ont pu apprendre à faire connaissance tout au long du voyage ; ce qui a aussi permis aux GKD’s d’avoir un premier aperçu de ce qu’était l’animation. Ce qui est d’ailleurs très agréable aussi pour le retour à l’Œuvre car des liens se créent entre les 2 groupes. Entre Grands Cadets, nous jouions aussi, les jeunes devaient avant le camp faire les jeux pour le reste du groupe avec un univers, un thème, des règles bien précises… Ce qui a été très instructif pour les GKD’s, car ça leur a permis de tenir un personnage pendant la totalité du jeu, de s’exprimer devant un public en adaptant leur vocabulaire à des enfants de 9 ans, à apprendre à structurer le déroulé d’un jeu et ainsi à être confrontés à la gestion des enfants durant un jeu.
Ce camps fut riche en partages et découvertes.
Nous sommes très heureux de vous avoir fait partager notre séjour au ski. Maintenant face au cheval et à la Mer en Camargue en avril !

Martin

2023-03-15T22:18:24+01:00

Lettre du Villard – février 2023

Lettre du Villard

Le Villard, le 15 février 2023

Le Villard, le 15 février 2023
Cher ami,
Dès réception de votre lettre qui nous annonçait votre prochaine venue au Villard avec quelques amis, j’ai demandé à Mademoiselle Reynaud, comme vous le souhaitiez, de s’assurer que les chambres de l’étage que vous n’avez pas occupées depuis l’été dernier ne nécessitaient pas un peu de ménage. Elle a eu tôt fait de venir, aurige pétaradant, sur le quad1 de son frère car elle ne se risque plus avec sa moto sur la glace qui recouvre la route depuis des semaines. Je me suis enquis auprès d’elle (car les naturels – comme on disait du temps de Bougainville – sont assez flattés d’être crédités de la réputation de connaître l’évolution du temps) de savoir si le bel enneigement se maintiendrait jusqu’à votre venue. Elle n’en doute pas (elle ne doute de rien) mais, m’a-t-elle promis, elle va demander par précaution à sa tante des Maïts de commencer une neuvaine en invoquant Sainte Eulalie. L’interrogation qu’elle a lue sur mon visage lui a donné le plaisir de me raconter l’histoire de cette sainte2 dont une neige inattendue vint recouvrir le corps après son horrible martyre et dont on peut solliciter l’intercession pour faire tomber de la neige, quelle que soit la saison.
Vous me reprochez gentiment dans votre lettre de paraître sans trop d’illusion quant à l’intérêt des conversations qu’on a en société et vous soulignez que c’est souvent avec de petits riens qu’on fait du lien. Vous relevez que ce qui ne justifierait pas toujours d’être échangé traduit le besoin et le plaisir qu’on a de partager un moment de vie. Et vous soulignez que la prétention à vouloir introduire dans la conversation des sujets extérieurs à l’objet de la réunion familiale ou amicale peut ne pas être sans risque. Vous rappelez le diptyque « Un dîner en famille » que Caran d’Ache en 1898 dessina à propos de l’affaire Dreyfus. Il présente deux moments d’un repas d’une famille bourgeoise ; sur le premier dessin, le chef de famille prévient : « Surtout ! ne parlons pas de l’affaire Dreyfus ». Le second montre la famille en train de se battre autour de la table, avec la légende « … ils en ont parlé ». Cette caricature vous fait penser aux opinions tranchées qui agitent bien des dîners actuels ; vous rappelez, sans omettre les débats sur l’opportunité de modifier les régimes de retraite, les controverses qu’animent les complotistes depuis que le Covid s’est répandu dans le monde, et vous notez que les prises de position exprimées actuellement sur la guerre entre l’Ukraine et la Russie mettent parfois un peu de gêne autour dans certains cercles. Dans un cas comme dans l’autre, notez-vous, la difficulté vient de ce qu’une personne qui s’est intéressée à un sujet pour des raisons qui lui sont propres pense, sans doute de bonne foi, en connaître sinon tous les aspects, du moins ceux qui lui permettent de croire qu’elle est au fait de la question.
Nous constations l’autre jour avec Gastinel, qui a repris ses randonnées en raquettes et qui ne manque pas d’inclure le Villard dans son itinéraire pour y passer à l’heure du café, qu’il nous était bien difficile de pondérer le poids des arguments qui s’affrontent dans les sujets dont le monde bruisse. Nous les entendons, les analysons, mais un « je ne sais quoi » fait que nous privilégions l’un par rapport à l’autre. Il serait intéressant de savoir pourquoi ; s’agit-il de dispositions innées ou d’un conditionnement social ? L’ami Béraud a son idée là-dessus ; « c’est, dit-il, une question de système hépatique : il y a les bileux et les autres ». C’est sans doute un peu abrupt mais l’hypothèse n’est pas à écarter. A-t-on déjà vu un trotskyste flegmatique ? Cette « grille de lecture » qui nous guide ou nous conditionne se retrouve dans nos sujets d’intérêt ou de préoccupation. Pour certains, rien n’est plus important actuellement que la montée des périls en Ukraine, pour d’autres, il s’agit du réchauffement climatique, pour d’autres encore des conséquences possibles pour l’Europe de la croissance vertigineuse des populations pauvres d’Afrique, pour d’autres enfin de l’évolution culturelle chaotique de notre société. Chacun à son avis mais, dans une course d’obstacles, choisit-on l’ordre dans lequel on les aborde ? Mimiquet, qui, venu déneiger l’accès à votre maison, était entré quelques instants chez nous pour se réchauffer, a observé en plaisantant que, si on n’avait pas de chance, la course pouvait s’interrompre dès le premier obstacle… Béraud a poursuivi dans son idée que les opinions que nous estimons énoncées de bonne foi doivent sans doute autant à la nature qu’à la raison. « Nous croyons que nous pesons correctement les arguments mais nous ne nous rendons pas toujours compte que les bras du fléau de notre balance sont inégaux. Il vous est sûrement arrivé d’hésiter avant d’acheter une voiture ou un canapé ; vous avez pesé le pour et le contre, comparé les caractéristiques et puis vous avez choisi le modèle qui vous plaisait, en pensant sans doute que c’était le choix raisonnable. Ne nous prenons pas pour des héros : nous tenons à ce que nos choix ne nous mettent pas mal à l’aise, à ce qu’ils nous plaisent. Et vous voudriez qu’étant incapables de choisir rationnellement un canapé nous ayons l’esprit plus aiguisé pour savoir ce qu’il faudrait faire pour réformer le régime des retraites ! » À Gastinel qui lui faisait remarquer que son scepticisme était sinon désespérant, du moins démobilisateur, il rappela que Socrate avait déclaré que la seule chose qu’il savait était qu’il ne savait rien, autrement dit qu’il fallait apprendre à abandonner nos certitudes pour commencer à réfléchir réellement. Mimiquet, paraphrasant César, dans la pièce éponyme de Pagnol, s’est éclipsé en déclarant « Oh !… Alors ! Si vous faites de la philosophie ! Alors… ».
Au même instant, comme au théâtre de boulevard, la porte s’est ouverte sur Mademoiselle Reynaud qui, en ajustant son casque, m’a prié de vous dire que la reprise de l’inflation et la flambée du prix de son liquide lave-vitres allaient la conduire à vous demander un petit quelque chose en plus… Voilà… Vous êtes prévenu !
Dites-nous quel jour vous pensez arriver pour que nous puissions vous accueillir dignement.
Nous vous assurons de nos pensées les plus amicales.

P. Deladret

  1. Quad : Quadricycle à moteur tout terrain non carrossé.
  2. Sainte Eulalie de Merida, vers 304, fêtée le 10 décembre, dont l’histoire est rapportée dans la Cantilène de Sainte Eulalie (vers 880), premier texte en langue d’oïl.
2023-02-08T08:55:40+01:00

Édito Mars 2023 > La conversion

Le temps du carême qui nous prépare à célébrer les fêtes de Pâques est un moment fort de conversion personnelle, fraternelle et spirituelle. Je vous propose de réfléchir ensemble à cette notion de conversion et de découvrir à frais nouveaux comment les chrétiens sont invités à la vivre.

Un effort surhumain
Une conception très répandue est de penser que la conversion consiste à faire des efforts, parfois surhumains ou contre-nature, pour atteindre Dieu, comme s’il nous fallait gravir une immense montagne et faire de l’escalade dans des conditions extrêmes. L’objectif serait impossible à atteindre, mais il nous faudrait quand même nous donner du mal pour essayer d’aller le plus haut possible. Nous devrions mettre toutes nos forces et nos capacités à faire des efforts énormes, avec un sentiment de culpabilité immense devant nos échecs et notre impossibilité à atteindre l’objectif. Nous ne pourrions que nous sentir nuls et médiocres aux yeux de Dieu qui nous regarderait du haut de sa puissance comme des incapables. Certains parmi nous arriveraient à grimper plus haut que d’autres, ils seraient des héros, des modèles, mais ils seraient tellement exceptionnels et leurs sacrifices tellement grands, que nous ne pourrions qu’en ressentir encore plus de déception quant à notre incapacité à faire aussi bien qu’eux. Dans cette conception, le résultat est la culpabilité et le sentiment d’infériorité.

Un retournement
Une conception qui me semble mieux correspondre à ce que Jésus nous révèle du désir de Dieu serait plutôt une invitation faite à l’homme qui avance dans son existence de se retourner et de découvrir que Dieu est juste là, derrière lui, un peu en retrait, mais tout proche et qu’il ne désire qu’une chose, c’est que l’homme se retourne vers lui et oriente sa marche dans la direction qu’il lui propose. Dans cette conception, c’est Dieu qui s’engage dans une relation avec l’humanité, il fait le premier pas, il nous rejoint là nous sommes, là où nous en sommes, et il nous invite à nous engager dans cette relation. Il vient à notre rencontre, et respecte notre liberté. Si nous désirons le suivre, si nous comprenons que la direction qu’il nous invite à prendre est la meilleure pour nous et qu’elle nous permettra d’avoir une vie qui a du sens, et d’être heureux, alors nous deviendrons capables de cheminer avec lui, traçant une nouvelle route, peut-être sinueuse et difficile, mais pleine de sens. Selon cette manière de concevoir la conversion, on comprend qu’elle n’est pas d’abord un effort pour atteindre Dieu qui serait loin de nous, mais un retournement pour accueillir Dieu qui vient à notre rencontre.

Une vie de carême : se retourner…
Les quarante jours que dure le carême nous donnent l’occasion de mettre en œuvre de manière plus radicale ce que notre vie de chrétien devrait être en permanence : retournement sur notre manière de vivre, sur nos priorités et sur ce qui peut-être nous empêche d’être libres. Cela s’exprime par le terme de « jeûne » ou de « pénitence », qu’il faut comprendre comme un moyen pour se purifier de ce qui nous fait du mal et pour nous orienter vers une vie plus simple, plus unifiée et plus juste. On pourrait dire ce que c’est une invitation à se donner de la peine pour se faire du bien, comme un temps de « détox » pour utiliser un mot à la mode. Le carême est aussi un temps de retournement vers les autres, en essayant d’être plus attentifs aux situations de malheurs et d’injustices qui nous entourent, et desquelles nous pouvons parfois nous rendre complices. On appelle cela le partage, la solidarité, l’aumône. C’est la raison qui explique que le carême souvent est l’occasion d’actions d’entraide et de solidarité. Le troisième retournement proposé durant le temps du carême est plus spirituel : le retournement vers Dieu. En donnant un peu plus de temps à la prière, à la lecture de la Bible, à la célébration des sacrements, nous prenons le moyen de nous rendre compte de la présence de Dieu auprès de nous, nous entrons en relation avec lui et nous pouvons vivre la pratique religieuse comme le double mouvement de l’amour de Dieu et de l’amour du prochain.

Chemin de sainteté
Par le baptême, nous sommes tous appelés à la sainteté. Comme pour la conversion, nous avons besoin de transformer notre manière de concevoir ce que la sainteté représente pour nous. Si c’est un chemin de perfection qu’il faut emprunter en vue d’un idéal à atteindre par nos propres forces, alors là encore nous risquons de trébucher sur l’écueil de la culpabilité et du moralisme. La sainteté telle que le Christ nous la présente est plutôt l’ouverture à une alliance avec lui. Il nous aime gracieusement, il fait le premier pas, et nous invite à entrer dans cette relation d’amour avec une promesse de sa part : « Tu ne seras pas seul sur ta route, je t’aiderai à donner le meilleur de toi-même et je t’accompagnerai dans les épreuves et les difficultés pour que tu poursuives ton chemin ». Les saintes et les saints qui nous sont donnés comme exemples ne sont pas des femmes et des hommes désincarnés et héroïques, ce sont des personnes normales qui ont entendu cette promesse de Dieu et qui ont décidé d’y répondre, avec ce qu’elles étaient. Les saints nous montrent que c’est possible de dire « oui » à Dieu.

Olivier

2023-02-08T08:51:49+01:00

L’Évangile du mois de mars 2023

Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu

En ce temps-là, Jésus prit avec lui Pierre, Jacques et Jean son frère, et il les emmena à l’écart, sur une haute montagne. Il fut transfiguré devant eux ; son visage devint brillant comme le soleil, et ses vêtements, blancs comme la lumière. Voici que leur apparurent Moïse et Élie, qui s’entretenaient avec lui. Pierre alors prit la parole et dit à Jésus : « Seigneur, il est bon que nous soyons ici ! Si tu le veux, je vais dresser ici trois tentes, une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie. » Il parlait encore, lorsqu’une nuée lumineuse les couvrit de son ombre, et voici que, de la nuée, une voix disait : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie : écoutez-le ! » Quand ils entendirent cela, les disciples tombèrent face contre terre et furent saisis d’une grande crainte. Jésus s’approcha, les toucha et leur dit : « Relevez-vous et soyez sans crainte ! » Levant les yeux, ils ne virent plus personne, sinon lui, Jésus, seul. En descendant de la montagne, Jésus leur donna cet ordre : « Ne parlez de cette vision à personne, avant que le Fils de l’homme soit ressuscité d’entre les morts. »

Le contexte

Matthieu propose cet épisode de la Transfiguration en plein cœur de son Évangile, juste après la confession de foi de Pierre, l’annonce de sa mort et la forte incompréhension de Pierre. Que s’y passe-t-il ? Jésus gravit une montagne, pour une rencontre avec son Père. Il n’est pas seul puisque cinq autres personnes sont avec lui : les trois disciples Pierre, Jacques et Jean qui seront à côtés à Gethsémani, mais aussi les deux grands prophètes de l’Ancien Testament, Moïse et Elie.

Six jours…
Jésus prend donc avec lui trois de ses plus proches compagnons et les invite à monter sur une montagne.
Six jours ? Cette indication de temps est suggestive. C’est le temps qui sépare, dans la liturgie juive, le Yom Kippour, appelé aussi le jour du grand pardon, de la Fête des Tentes (voir mot du mois). Ainsi, durant une semaine, la communauté vit sous des tentes, comme au désert, pour exprimer cette attente d’une nouvelle manifestation de Dieu et de la venue du Messie. Un peu comme les chrétiens durant le temps de l’Avent. Ce n’est pas un hasard. Matthieu évoque explicitement les tentes lorsqu’il fait dire à Pierre : « Je vais dresser ici trois tentes… »

Chacun sa montagne
L’indication de la montée de Jésus sur une montagne est tout aussi intéressante. Attention, n’imaginons pas le Mont-Blanc ou un haut sommet enneigé mais plutôt une colline. Remarquons que les deux figures de l’Ancien Testament, Moïse et Elie renvoient chacun à une montagne, toutes deux bien connues. Moïse est monté au Sinaï où la Loi fut donnée ; Élie est allé sur la montagne de l’Horeb où Dieu s’est manifesté non pas dans le tonnerre mais dans une brise légère ! Sur la montagne, Dieu se révèle. Que va-t-il dire ?

Une reprise du baptême
« Celui-ci est mon fils bien-aimé ». Cette parole divine, nous l’avons déjà entendue au moment du baptême de Jésus par Jean. C’était au début de l’Évangile. Une mention est rajoutée ici : « Écoutez-le ». Notre pédagogue divin insiste sur l’écoute, précisément parce que ce n’est pas le fort des disciples, et nous sommes probablement aussi dans ce cas-là. L’écoute est synonyme d’obéissance, cela ne renvoie pas à un quelconque problème d’audition. Rappelons-nous qu’écouter Jésus, c’est tout simplement faire partie de ses disciples.

La transfiguration nous parle de Pâques
Une nouvelle fois, un épisode de l’Évangile évoque Pâques. Ainsi lorsque Jésus s’approche des disciples qui sont tombés « la face contre terre », il les touche et leur dit : « (R)éveillez-vous ». Puis, à la fin, Jésus leur demande de ne « parler à personne de cette vision avant que le fils de l’homme soit ressuscité d’entre les morts ». Éveillé, ressuscité, réveillé, ces verbes en français renvoient au mystère vécu à Pâques.

En descendant
Nous pouvons imaginer le trouble, l’incompréhension ressentis par les trois disciples. Qu’ont-ils compris de ce son et lumière ? Comme souvent, il faut du temps pour analyser, décrypter les moments spirituels forts d’une existence. Il leur faudra attendre la Passion de leur maître. C’est ainsi que leur reviendra à l’esprit les événements du Thabor (montagne de la transfiguration) durant lesquels le Père leur aura donné les clés de compréhension du ministère et de l’identité de Jésus. Ainsi, après Pâques, ils comprendront que l’Amour du Père a été le plus fort que la mort et qu’ils en avaient eu une preuve par avance.

Pour actualiser
Cette page d’Évangile nous oriente vers Pâques en nous recentrant sur l’essentiel : écouter le Fils bien-aimé du Père. Ah, si nous pouvions devenir de véritables écoutants, à l’écoute de Dieu, de sa Parole et des autres afin d’y déceler les conseils de notre divin maître ! Ah, si nous pouvions à l’occasion de ce temps de carême nous rafraîchir la mémoire afin que reviennent à notre esprit ces épisodes fondateurs qui nous ont permis de dire : Oui, j’y crois. Il m’a parlé, j’ai compris quelque chose de sa grandeur, de sa bonté… Ah, si nous pouvions devenir ou redevenir de véritables pèlerins. La tentation est si grande de faire comme Pierre qui voulait rester là avec son Jésus. Que ce soit pour les autres disciples ou pour nous-mêmes, Jésus nous attend dans notre Galilée, dans notre lieu de mission où déjà il nous précède. Jésus lui-même est descendu de la montagne, alors pourquoi voudrions-nous rester là-haut ?
Didier Rocca

Didier Rocca

Le nom du mois : La fête des tentes
La fête des tentes ou en hébreu la fête de Souccot est l’une des trois fêtes de pèlerinage prescrites par la Torah, au cours de laquelle on célèbre dans la joie l’assistance divine reçue par les enfants d’Israël lors de l’Exode et la récolte qui marque la fin du cycle agricole annuel. Elle est fêtée aux mois de septembre ou octobre et dure une semaine.

2023-02-08T08:54:27+01:00

Lettre du Villard – janvier 2023

Lettre du Villard

Le Villard, le 15 janvier 2023

Bien cher ami,
La joie qu’a apportée la présence de votre famille au Villard à l’occasion des fêtes de Noël et du Nouvel an ne s’est pas estompée. Vous avez rendu, comment dire, plus léger l’air que nous respirons, le climat dans lequel nous évoluons. Ma femme me confiait que votre venue au Villard nous faisait autant de bien qu’un voyage ! Vous arrivez, avec vos façons de voir les choses, de vous exprimer, avec vos préoccupations, vos rythmes de vie, qui ne sont pas forcément les nôtres. Vous nous dépaysez. Ces rencontres nous font, en quelque sorte, sortir de nous même, de nos idées fixes, de ce que nous croyons être des certitudes. Et c’est en quoi elles nous font du bien, nous rendent heureux. Rien n’est plus fade que ces réunions où on échange beaucoup de banalités parce qu’on n’a rien de nouveau à se dire, ou bien parce qu’on est tous – du moins le croit on – du même avis, ou encore parce qu’on craint de ne pas savoir exprimer avec tact des opinions qui fâcheraient ou même parce qu’on n’est pas vraiment assuré de ce qu’on pense. On se réfugie dans des anecdotes, des souvenirs communs, des histoires que tout le monde connaît. On alimente la conversation de petit bois, pour ne pas prendre le risque qu’elle puisse s’embraser.
Je me suis autrefois posé la question, à la vue d’une photo, parue il y a des décennies dans Paris-Match, d’un repas de la famille Servan-Schreiber ; il n’y avait là que de beaux esprits, journalistes, hommes et femmes politiques, essayistes, gens de lettres et de pouvoir. Je me suis demandé de quoi pouvaient bien parler ces gens là entre eux. Échangeaient-ils des points de vue sur le mouvement hippie alors naissant ? Entrevoyaient-ils ce en quoi l’informatique allait bouleverser nos sociétés ? Esquissaient-ils ce qu’il pourrait advenir du monde lorsque la Guerre Froide serait terminée ? Gatinel, à qui j’ai eu la faiblesse de raconter cette histoire, m’a douché en m’assénant qu’ils parlaient sans doute des mésaventures conjugales de leur cousine Christine ou de la scandaleuse augmentation du prix du foie gras chez Jambier, l’épicier de la rue Poliveau. « Il y a un moment pour tout et un temps pour toute activité sous le ciel ! dit-il, paraphrasant l’Ecclésiaste, un temps pour se taire et un temps pour parler… Ne confondez pas tout ». Peut être avait-il raison, mais peut être aussi mésestime-t-il l’importance de ce qui peut être dit lors de « dîners en ville ».
Béraud considère que si les conversations qu’il appelle « de convenance » sont là pour masquer l’absence de sujets à partager, nous allons cependant au-devant des autres parce que la solitude nous pèse, parce que nous pensons qu’il n’y a pas grand-chose dans notre jardin intérieur ou bien parce qu’il nous paraît un peu étriqué, ou encore mal entretenu. Ce vieux ronchon pense comme Pascal que « tout le malheur des hommes vient de ne savoir pas demeurer en repos dans sa chambre »1.Soit. Mais alors, pourquoi rompt-il des lances avec Gatinel et taquine-t-il Mimiquet ? Quoi qu’en dise Béraud, l’homme est un animal social. Quelques êtres d’exception peuvent demeurer en repos dans leur chambre, mais, le fait qu’on les trouve exceptionnels n’induit pas qu’ils soient de nature différente. Ils ne sont exceptionnels que parce qu’ils sont de la même essence.
Cela me fait penser à ce que nous disait votre voisin Poulenc en réaction à des déclarations d’écologistes, ses meilleurs ennemis (il a fait toute sa carrière dans la chimie !). Ceux-ci admettaient que telle ou telle mesure qu’ils préconisaient pour lutter contre le réchauffement climatique, n’aurait sans doute pas d’effet réellement sensible sur cette tendance, mais que ce qui était important était d’être exemplaire. La prétention à l’exemplarité chiffonnait Poulenc. On ne constitue un exemple, disait-il, on n’est exemplaire, que si d’autres peuvent comprendre ce qu’on entend promouvoir. Je ne sais pas si Kant aurait approuvé cette opinion. La démarche qu’on adopte « dans le huis clos de notre salle de bains », comme aurait dit Philippe Meyer2 paraît d’autant moins exemplaire qu’elle n’est connue de personne. Poulenc ne philosophait pas. Il ne supportait pas, simplement, qu’on puisse dire aux autres « Suivez mon exemple », sous-entendu : « Moi, je sais ce qu’il faut faire ». Sans doute était-ce la suffisance qui peut se glisser dans la motion d’exemplarité qui le hérissait. Je l’ai calmé en lui proposant quelques synonymes du mot de façon à atténuer l’impression d’arrogance qu’il pouvait avoir. On ne peut cependant nier le rôle des exemples qu’on reçoit et qu’on donne : les bases de l’éducation reposent sur cela. Encore faut-il que celui qui présente l’exemple à suivre ait les compétences suffisantes, car, sans ce pré-requis, que vaut l’exemplarité de ses propos ? On ne se méfie pas toujours de ceux qui nous sont présentés comme exceptionnels ou exemplaires.
Et l’actualité déborde des exemples dont Pierre et Paul ne sont pas avares dès lors qu’il s’agit d’apporter de l’eau au moulin de leur cause ; qu’il s’agisse de la question du financement des retraites, des réponses qu’attendent les problèmes rencontrés par l’accueil des immigrés clandestins, ou des modifications qu’on pourrait apporter aux dispositions concernant la fin de vie… On ne cesse d’invoquer ce qui se fait ailleurs dans le monde à l’appui des thèses qu’on défend. Cela n’éclaire pas vraiment celui qui sait se souvenir que l’histoire d’un pays, l’origine et l’importance de sa population, sa culture, ses religions ancestrales, rendent compte de sa législation et de ses institutions. L’état de notre société n’est pas l’effet du hasard. Et ce qui est excellent à Nauru3 ne va pas forcément correspondre à ce que notre société peut supporter. On peut même se demander, en ce qui concerne, par exemple, la question des retraites, si le recours de tel parti ou syndicat à la comparaison avec ce qu’on observe dans d’autres pays n’est pas l’aveu implicite de la difficulté qu’ils éprouvent pour démontrer les thèses soutenues. Il est un peu paradoxal de vouloir conforter l’exception d’un modèle social en évoquant des exemples par certains aspects contraires. Disons qu’il faut savoir le faire.
Je doute que lorsque vous retournerez au Villard en février cette question ait fini de soulever les passions. Mais venez nous dépayser !
Je vous assure de nos sentiments les plus cordiaux.

P. Deladret

  1. Blaise Pascal (1623-1662), Pensées, 139.
  2. Philippe Meyer. Né en 1947. Chroniqueur, essayiste, écrivain, humoriste.
  3. Nauru. La plus petite république du monde, en Océanie ; 21 km2 ; 10 000 hab.
2023-01-19T16:29:48+01:00

Édito Février 2023 > Jésus, le message

À l’occasion d’une discussion pendant une messe du camp des aînés à Larche fin décembre, nous avons réfléchi à l’identité du Christ. Sujet complexe et mystérieux. Est-il un prophète, un surhomme, un modèle, un messager, le Messie, le Fils de Dieu, Dieu lui-même ? Nous avons résumé le fruit de notre partage avec une formule inédite pour nous, et qui nous a parue bien parlante : Jésus n’est pas un messager, il est le message. Cette manière de dire rejoint et réactualise des formulations traditionnelles : « Le Verbe s’est fait chair » ou « Dieu s’est fait homme ».

Plus qu’un messager
Jésus, dans la foi chrétienne, n’est pas un simple prophète, fut-il le plus grand. Il ne se contente pas d’annoncer la Bonne Nouvelle et de prêcher la parole de Dieu, il l’incarne ! Il n’est pas un messager, mais il est en lui-même le message. Non seulement par ses paroles, mais aussi par ses gestes, ses attitudes, sa vie tout entière. Il nous donne à voir et à comprendre ce que Dieu veut dire à l’humanité, ce que Dieu veut vivre avec l’humanité. Lorsque nous découvrons la vie de Jésus, ses paroles et ses gestes, nous contemplons Dieu qui agit. Il y a des religions pour lesquelles Dieu se révèle par des écritures ; pour les chrétiens, c’est en Jésus qu’il se fait connaître. Il s’auto-révèle en Jésus.

Le message incarné
Jésus assume les missions de prêtre, de prophète et de roi, dans le sens où il est celui qui célèbre la relation des hommes avec Dieu par la prière, les sacrifices et les sacrements, ce qui relève du rôle du prêtre ; de même il est prophète par l’acclamation qu’il fait de la Bonne Nouvelle de l’amour de Dieu offert à tous les hommes, par l’annonce du salut et de la résurrection pour chacun, par l’appel à la conversion du cœur de l’homme vers l’amour de Dieu ; et comme roi, il est celui qui s’engage concrètement à lutter pour la justice, contre ce qui défigure l’homme et l’empêche d’être libre. Mais il est plus que celui qui accomplit parfaitement les fonctions de célébration, de prédication et de service, il est véritablement Dieu qui s’identifie à nous, qui nous montre ce que nous sommes réellement pour lui : des filles et des fils qu’il aime et sur lesquels il s’appuie pour que son royaume d’amour se réalise.

Notre mission
Si Jésus est le message, il nous invite à découvrir qu’à notre tour nous pouvons être non seulement des prêtres, des prophètes et des rois à sa manière, mais que nous sommes aussi appelés à incarner le message, à être à notre tour le message de Dieu par notre manière de vivre et de nous engager au service du bien commun. Cette compréhension est vertigineuse et pourtant bien fidèle au désir de Dieu. Ce n’est pas de la prétention, c’est notre vocation… Cet appel n’est pas réservé à une élite mais nous concerne tous, quelles que soient nos cultures, nos origines, nos histoires, nos sensibilités… Nous sommes tous appelés à devenir message de Dieu. Pour ne pas nous décourager, nous pouvons comprendre que cet appel n’est pas seulement individuel, mais qu’il est aussi collectif. C’est en communion les uns avec les autres, en communauté, en Église, que nous pouvons former ce corps de Dieu qui agit au cœur du monde. Ce qui est remarquable dans cette histoire, c’est de découvrir que Jésus, lors de son passage sur terre comme homme historique, a mis cela en œuvre en choisissant pour l’accompagner des hommes et des femmes ordinaires, des personnes qui n’étaient pas parfaites et qui ont eu leur lot d’égarements, d’erreurs et de péchés. C’est précisément parce qu’ils se sont découverts pécheurs pardonnés, qu’ils ont pu accomplir des choses extraordinaires et assumer la mission que Jésus leur avait confiée : annoncer le pardon et l’amour de Dieu.

Notre vocation
Il nous revient de découvrir quelle sera notre manière d’incarner le message de Dieu. C’est ce que l’on appelle la vocation : le chemin propre à chacun et qui sera notre façon de vivre en harmonie avec la Bonne Nouvelle proclamée par Jésus. Il n’y a pas de vocation idéale ou supérieure aux autres, le but étant que chacun découvre la sienne et s’y engage pour faire grandir le royaume de Dieu. Chemin de liberté et de bonheur, chemin de partage et de joie, chemin exigeant et parfois difficile, mais chemin qui donne sens à la vie. Une des grandes missions de l’Œuvre est d’accompagner les jeunes dans cette découverte de leur vocation. En donnant aux jeunes le goût de l’accueil, de l’engagement, du partage, de la fraternité, de la fidélité, de l’ouverture, nous leur permettons d’expérimenter et de découvrir la joie du don de soi et du dépassement. Dans un contexte de sollicitations et d’angoisses multiples, les jeunes ont du mal à faire la part des choses et sont parfois tentés par les mensonges d’un mode de vie centré sur la consommation et les relations virtuelles. Nous croyons que le message de Dieu révélé en Jésus Christ est une réponse aux défis de notre monde et qu’il est étonnamment plein d’actualité pour trouver des repères en ces temps de grands bouleversements.

Olivier

2023-01-19T16:23:00+01:00

L’Évangile du mois de février 2023

Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu

En ce temps-là, voyant les foules, Jésus gravit la montagne. Il s’assit, et ses disciples s’approchèrent de lui. Alors, ouvrant la bouche, il les enseignait. Il disait :
« Heureux les pauvres de cœur, car le royaume des Cieux est à eux.
Heureux ceux qui pleurent, car ils seront consolés.
Heureux les doux, car ils recevront la terre en héritage.
Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, car ils seront rassasiés.
Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde.
Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu.
Heureux les artisans de paix, car ils seront appelés fils de Dieu.
Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice, car le royaume des Cieux est à eux.
Heureux êtes-vous si l’on vous insulte, si l’on vous persécute
et si l’on dit faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi.
Réjouissez-vous, soyez dans l’allégresse, 
car votre récompense est grande dans les cieux.

Le contexte

Ce texte des Béatitudes ouvre le premier discours de Jésus appelé « le discours sur la montagne ». Ce n’est pas un enregistrement exact des paroles de Jésus, mais plutôt une œuvre littéraire reprenant quelques-unes de ses paroles fortes.

Pourquoi parler des Béatitudes ?
L’adjectif « heureux » (en latin béatus) est répété neuf fois dans ce passage. C’est le mot clé du texte. 
Une béatitude évoque ici un cri de joie pour annoncer un message paradoxal puisque le bonheur est dans le manque, dans le besoin de justice, de paix, de consolation. Les béatitudes dressent le portrait du disciple, avec bien évidemment celui de Jésus en filigrane. Doux, pauvre, artisan de paix, Jésus porte en lui toutes ces qualités. 
Regardons cela de plus près…
Heureux vous les pauvres
Attention, ne nous trompons pas, ce qui rend heureux, c’est d’obtenir le royaume des Cieux, ce n’est pas d’être pauvre. Par ailleurs, ceux qui obtiennent le royaume des Cieux, ce sont justement ceux qui ont une âme de pauvre. On peut donc entendre la Béatitude de la manière suivante : « Heureux êtes-vous d’obtenir le Royaume des Cieux, vous qui avez une âme de pauvre, vous qui avez un cœur de pauvre ». Cette béatitude, comme toutes les autres d’ailleurs, se rapporte particulièrement à Jésus ; Il ne possède rien, il meurt nu sur la croix. Jésus est vraiment le pauvre tout au long de l’Évangile.
Heureux les doux
Jésus lui-même dit à ses disciples : « Mettez-vous à mon école car je suis doux et humble de cœur ». La douceur, l’humilité est une vertu essentielle pour qui veut recevoir de Dieu et des autres.
Heureux êtes-vous d’être consolés vous qui pleurez.
La consolation, on la retrouve dans le choix que fait Jésus de résider à Capharnaüm lorsqu’il est en Galilée. Le nom de ce bourg signifie « village de la consolation ». Ainsi, Jésus s’installe à Capharnaüm pour être dans ce lieu carrefour où il va rencontrer beaucoup de gens, et qui aussi est le lieu de résidence de Pierre. Il s’y installe pour consoler. Il est le Consolateur par excellence.
Heureux les miséricordieux
Si on restait fidèle au texte grec, on pourrait presque dire « Heureux êtes-vous d’être miséricordiés vous qui avez fait miséricorde ». À plusieurs reprises, on voit que Jésus fait miséricorde parce qu’il a pitié, ce mouvement qui vient du plus profond des entrailles et qui n’a rien à voir avec de la condescendance.
Heureux les cœurs purs
Qu’est-ce que c’est qu’un cœur pur ? C’est un cœur unifié, c’est-à-dire un cœur qui suit son chemin et qui n’est pas, au contraire, dans l’errance, dans le papillonnage. Un cœur qui ne sait pas où il va, qui va dans tous les sens serait un cœur divisé. Le cœur pur c’est un cœur qui suit une voie, un chemin.
Heureux vous qui avez œuvré pour la paix.
Et la paix c’est aussi une des œuvres de Jésus, non seulement lorsqu’il guérit, lorsqu’il enseigne, qu’il pacifie les cœurs, mais aussi vis-à-vis de la nature, on nous raconte qu’il apaise même la mer, le vent.

La dernière béatitude reprend la notion de justice. En insistant sur le « à cause de moi », Jésus s’identifie à la justice et se signale donc comme le juste par excellence.

Didier Rocca

Le nom du mois : justice
La justice est le style de vie qui ajuste l’être humain à la volonté de Dieu. Être juste ce n’est pas faire juste mais c’est plutôt s’ajuster. C’est de cela dont Jésus parle dans l’expression « faim et soif de justice ».

2023-01-19T16:28:15+01:00

Lettre du Villard – décembre 2022

Lettre du Villard

Le Villard, le 15 décembre 2022

Bien cher ami,
Réjouissez-vous ! Réjouissez-vous et répandez autour de vous la bonne nouvelle ! La neige est là ! Vous allez me dire qu’il n’est peut-être pas de très bon goût d’emprunter le langage de l’Avent pour parler des précipitations dont nous venons de bénéficier. C’est à voir. Car les mots ne se contentent pas d’être les véhicules des idées. Ils les laissent volontiers monter à leur bord et il n’est pas rare qu’ils les détournent. Parfois ils les influencent ; d’autres fois, ils les déforment et même favorisent des rapprochements d’idées qui nous font glisser d’un ordre de pensée à un autre. Il leur arrive de donner un tour inattendu à la conversation. Je ne m’en plaindrai pas. Grâce à eux, la chute de neige m’entraîne vers l’Avent. Il y a de pires convergences.
Il a donc neigé et je pense que votre petite famille va se préparer avec encore plus de joie à votre migration hivernale vers le Villard. Vous nous direz quand vous pensez arriver pour que nous chauffions votre maison, en espérant, bien sûr qu’il y aura assez d’électricité pour produire un peu de chaleur. En tout état de cause, nous mettons du bois de côté pour vous permettre une flambée… La bûche va devenir le cadeau de Noël de l’année ! « Pauvre France ! » comme dirait Mimiquet. Nous discutions de cela pas plus tard que cet après-midi avec l’ami Béraud qui me faisait remarquer que la situation inimaginable dans laquelle nous nous trouvions plongés nous transformait tous en chauffagistes amateurs. Il a changé il y a deux ans sa vieille chaudière à mazout avec thermosiphon1 pour une chaudière à granulés de bois dernier cri (il a les moyens !) et maintenant, il craint de n’avoir ni suffisamment de granulés pour sa chaudière ni assez d’électricité pour la pompe qui fait circuler l’eau ! « Cela serait simplement gênant », me disait-il, « si ça n’illustrait pas l’inconséquence de notre société. On a décidé de se passer de l’énergie nucléaire pour toutes sortes de bonnes ou de mauvaises raisons sans avoir de solutions de remplacement disponibles et suffisantes. Disponibles et suffisantes par rapport aux besoins immédiats de la population. Il est possible que les détracteurs du nucléaire n’aient pas imaginé qu’un bruit de bottes pouvait, en faisant s’envoler les prix des différentes sources d’énergie, appauvrir la société et l’obliger à modifier ses comportements. C’est possible. Mais ce n’est pas certain car cela ne va-t-il pas dans le sens de ceux qui veulent changer la société en organisant la décroissance ? »
Cela m’a rappelé ce que vous me disiez lorsque vous êtes venus pour les vacances de la Toussaint, devenues, soit dit en passant, vacances d’automne dans notre société christianophobe et non plus simplement laïque. Les affrontements auxquels donnaient lieu les aménagements de réserves d’eau à Sainte-Soline dans les Deux Sèvres vous avaient mis mal à l’aise. Vous comprenez qu’il faille préserver les ressources naturelles mais l’attitude qui consiste à s’opposer à tout aménagement vous paraît comporter sa part de dogmatisme mais aussi de danger. Vous concevez aisément que, dans la mesure où nous avons bien assez et peut-être même trop, il soit préférable, pour préserver nos ressources, de consommer mieux et moins, en évitant cependant d’enclencher la mécanique de la décroissance car on ne sait où elle nous mènerait. « Mais ce sont des préoccupations de nantis, disiez-vous, car on meurt de faim ailleurs ». Utiliser des produits chimiques voire de nouvelles semences vaudra bientôt à qui s’aventurera dans cette voie un lynchage qui risque de pas être seulement médiatique. Je vous avais raconté les difficultés qu’avaient rencontrées au xviie siècle les promoteurs du développement de la culture de la pomme de terre à qui on reprochait de transmettre la lèpre et d’épuiser les sols… Vous vous souvenez sans doute de la visite que nous avons faite du Jardin médiéval de Salagon2 et de l’émotion qui nous avait saisis en prenant conscience du nombre restreint de variétés de légumes et de fruits dont l’Europe disposait avant les Grandes découvertes ; il suffisait d’une ou deux années de mauvaises récoltes d’une céréale essentielle pour que la famine survienne.
Mimiquet, survenu dans ces entrefaites, s’était demandé si la même philosophie qui avait conduit à la mise à l’écart du nucléaire et au risque actuel de pénurie d’électricité ne pouvait pas causer l’apparition de famines dans des pays qui s’aviseraient d’en rester à une agriculture traditionnelle censée être vertueuse. Vous lui avez fait remarquer que la vertu ne résisterait pas à la pression démographique.
Tandis que nous devisions avec Béraud, Gastinel est arrivé pour nous montrer les raquettes à neige qu’il venait d’acquérir – alors même, l’a plaisanté Béraud, que ses anciennes raquettes étaient encore en bon état – il s’en était tiré en affirmant qu’avec celles-ci son pied était mieux tenu et qu’à son âge, n’est-ce pas, on ne plaisantait pas avec la sécurité ! Nous demandant de quoi nous parlions, il nous a, de façon abrupte, asséné que nous discutions sur le sexe des anges. Pour lui, que l’on s’engage dans une démarche de décroissance ou dans une politique de croissance, que celle-ci soit vertueuse ou pas, les ressources nouvelles ainsi dégagées seront toujours dévorées par la croissance démographique dont le freinage n’est pas une priorité pour les moins averties des populations les plus pauvres.
Faute de trouver immédiatement une solution à ce problème brûlant, nous l’avons complimenté pour ses raquettes, nous coulant dans le moule de ceux qui, étant censés savoir, savent surtout détourner la conversation.
Pour ces mêmes raisons, je ne pense pas que nous reprendrons ce débat lorsque vous viendrez nous voir. Mais nous avons par ailleurs tant à nous dire !
J’attends votre coup de téléphone pour craquer l’allumette.
Je vous assure de nos sentiments les plus cordiaux.

P. Deladret

  1. Thermosiphon : système dans lequel la circulation de l’eau est assurée par la différence de température entre celle de l’eau qui sort de la chaudière et celle qui y retourne refroidie.
  2. Salagon, prieuré et jardins, à Mane près Forcalquier.
2022-12-12T09:54:50+01:00

Édito Janvier 2023 > Jésus, un migrant

La sculpture reproduite ici a été installée sur la place St-Pierre à Rome à la demande du pape François, touché par ce symbole de la misère des rescapés de la migration, qui nous rappelle aussi le nombre immense de celles et ceux qui n’ont pas survécu aux dangers de ces traversées risquées. C’est une invitation à ne pas détourner le regard et à ne pas oublier toutes les personnes qui sont dans des situations de grand danger et d’extrême pauvreté, qui fuient leur pays, non par facilité mais pour survivre, acculées par un contexte insupportable… Ce n’est pas de gaieté de cœur que l’on quitte tout, au péril de sa vie, en acceptant des conditions d’exil inhumaines. Quelle désolation de constater comment ces personnes sont rejetées dans les pays qu’ils ont espéré devenir un refuge…

Dieu se fait pauvre
Pour les chrétiens, il est important de comprendre que Dieu ne se contente pas de prendre soin des plus petits ; avec Jésus il va encore plus loin. Non seulement il se fait proche d’eux mais il se fait l’un d’eux. Nous l’avons célébré à Noël : Dieu se fait homme dans des conditions d’extrême pauvreté et de grande précarité. Tout au long de sa vie publique, Jésus a vécu comme un vagabond, il a partagé la vie des pauvres et des petits, il a été associé à la part de la population la plus méprisée, et il a été condamné à subir le supplice réservé aux pires criminels de son temps. La victoire du Christ contre la mort, le mal suprême, est donc celle de tous les pauvres et de tous les petits. C’est aussi la nôtre, car, si nous nous regardons de manière objective, nous pouvons découvrir que nous sommes aussi des pauvres et des petits, même si nos misères sont plus cachées.

Rencontrer Dieu 
dans les pauvres
Pour les chrétiens, les plus pauvres et les plus petits ne sont pas seulement les sujets d’une attention charitable particulière, mais ils sont pour nous la figure même du Christ qui nous montre le visage de Dieu. En allant à la rencontre des plus petits, les chrétiens vont à la rencontre de Dieu. Les pauvres sont l’incarnation de Dieu. Cette compréhension devrait être pour nous une révolution, au sens fort du terme : une conversion totale de notre regard sur Dieu et sur les hommes. Cela devrait transformer toutes nos interactions humaines, nos conceptions de la société, de la justice, de la collectivité. Nos fonctionnements politiques, professionnels, judiciaires, économiques seraient totalement différents. Nous sortirions des rapports de force qui polluent nos manières de vivre ensemble. Nous arriverions naturellement à trouver des solutions aux problèmes environnementaux, écologiques et sociaux actuels qui traumatisent notre monde. Nous saurions faire les efforts nécessaires pour plus de justice, d’égalité, de sobriété et de fraternité.

Dieu est présent dans chacune de nos vies
Cette Bonne Nouvelle est à la portée de tous, mais il y a encore énormément de résistances en nous. Nous pouvons comprendre la révolution du message de l’Évangile, et pourtant nous n’arrivons pas encore à la mettre en pratique. Il y a un combat qui se joue en nous, ainsi que dans nos structures humaines et ecclésiales. Personne n’est épargné par cette difficulté à incarner l’amour de Dieu. Heureusement, pour mener ce combat, nous ne sommes pas livrés à nous-mêmes. Dieu est présent dans chacune de nos vies, quelles que soient nos cultures, nos histoires, nos conditions de vie, il veut se donner à tous. C’est bien le symbole de la grande fête de l’Épiphanie si chère à notre Œuvre et dont le tableau placé au chœur de la chapelle illustre le message. Autour de Jésus et de ses parents est rassemblée l’humanité tout entière : les pauvres, les étrangers, les ennemis, les riches, les soldats… Et pour chacune et chacun d’entre nous cela veut dire que Dieu vient nous rencontrer au cœur de nos pauvretés, non pour nous condamner mais pour nous rétablir dans une juste relation d’amour avec lui.

Olivier

2022-12-12T14:29:22+01:00

L’Évangile du mois de janvier 2023

Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu

En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples :  « Vous avez appris qu’il a été dit : Œil pour œil, et dent pour dent. Eh bien ! moi, je vous dis de ne pas riposter au méchant ; mais si quelqu’un te gifle sur la joue droite, tends-lui encore l’autre. Et si quelqu’un veut te poursuivre en justice et prendre ta tunique, laisse-lui encore ton manteau. Et si quelqu’un te réquisitionne pour faire mille pas, fais-en deux mille avec lui. À qui te demande, donne ; à qui veut t’emprunter, ne tourne pas le dos ! Vous avez appris qu’il a été dit : Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi. Eh bien ! moi, je vous dis : Aimez vos ennemis, et priez pour ceux qui vous persécutent, afin d’être vraiment les fils de votre Père qui est aux cieux ; car il fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, il fait tomber la pluie sur les justes et sur les injustes. En effet, si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense méritez-vous ? Les publicains eux-mêmes n’en font-ils pas autant ? Et si vous ne saluez que vos frères, que faites-vous d’extraordinaire ? Les païens eux-mêmes n’en font-ils pas autant ? Vous donc, vous serez parfaits comme votre Père céleste est parfait. ».

Le contexte
Nous lisons un extrait du sermon sur la montagne qui est un peu le discours-programme de Jésus au début de l’Évangile de Matthieu. Jésus aborde ici un sujet ô combien d’actualité, celui de la réaction à avoir en cas de conflit.

Vous avez appris… 
Moi, je vous dis…
Jésus semble se situer en contradiction avec les paroles de l’Ancien Testament. Il risque une parole personnelle qui témoigne de sa pleine liberté. En fait, il ne se place pas en opposition avec sa foi juive et la Loi qu’il pratique mais ses paroles sur l’amour des ennemis visent au plein accomplissement de la Loi.
Tu veux vraiment accomplir la Loi juive, tu veux véritablement respecter ce que Dieu te demande, alors n’en reste pas à une observance scrupuleuse qui est un cadre nécessaire mais fais un pas de plus : Aime ton ennemi. Ce pas de plus, est celui que Jésus a fait durant sa vie.

Aimer son ennemi,
pourquoi cela vient-il si tard ?
Dieu est un bon pédagogue. De la même manière qu’une maman ne va pas donner à son enfant une nourriture solide dès la naissance de son petit, Dieu nous propose un enseignement progressif. D’abord, la loi du talion (voir mot du jour) puis la loi de l’amour total. Il aurait été inimaginable que Dieu exige cela de l’être humain dès le début, la société n’aurait pas été prête à accueillir cela. Dieu s’est adapté à la culture dans laquelle il s’est rendu présent pour progressivement nous amener plus loin.
Tendre la joue, aimer son ennemi, serait-ce possible ?
Jésus de façon provocatrice nous invite à casser la logique du mal. Je te fais mal, tu me fais mal, on se fait la guerre… À un moment, il faut bien qu’un processus de paix voit le jour, c’est cela tendre l’autre joue. Et en pratique, cela marche ; regardez Gandhi en Inde ou Martin Luther King aux États-Unis.
Tu m’as fait (du) mal mais je ne veux pas que cela continue. Alors, j’accepte de ne pas te le rendre pour que cette situation cesse. Même si, par conséquent, je dois vivre une forme d’humiliation. Que ce soit dans nos familles, entre des pays, la paix est à ce prix.

Les paroles de Jésus t’agaceraient-elles ?
Bien évidemment, ce type de paroles peuvent nous agacer. D’abord, parce qu’on se sent si loin de cet idéal évangélique et, en même temps, on sait bien que si tout le monde agissait de la sorte, nous vivrions dans la paix et l’amour. Nous savons ce qu’il faut faire mais nous ne le faisons pas parce que nous attendons que l’autre fasse le premier pas. En fait, c’est cela qui est agaçant. Jésus appuie là où cela fait mal. Incapables de pardonner, nous nous faisons du mal. Dommage !

Attention !
La crise des crimes, délits et abus dans l’Église nécessite que nous comprenions bien les paroles de Jésus. La justice doit être appliquée et tendre l’autre joue ne consiste pas à taire les actes ou attitudes que l’un ou l’autre a pu me faire subir. Il ne peut y avoir de véritable paix sans justice. Jésus demande dans ce discours de casser la spirale mortifère du mal, de la violence. Pour cela, porter plainte est une attitude profondément évangélique qui rend possible la fin de cette violence.

Pour actualiser
Vivre l’Évangile c’est aller à contre-courant. Aimer son ennemi, prier pour lui non pas parce que c’est mon ennemi mais parce que Jésus a versé son sang pour tous, pour moi, pour lui, c’est suivre notre divin maître. Cela ne peut se vivre que dans la prière. C’est difficile mais possible, il suffit d’essayer.

Didier Rocca

Le nom du mois : talion
La loi du talion, consiste en la réciprocité du crime et de la peine. Cette loi (« Œil pour œil, dent pour dent ») caractérise un état intermédiaire de la justice pénale entre le système de la vendetta et le recours à un juge impartial et désintéressé.

2022-12-12T09:53:32+01:00