Spiritualité

Édito Janvier 2022 > Jésus enfant

Grâce au travail de fourmi de nos amis anciens de St-Sa qui se passionnent pour le patrimoine de l’Œuvre, nous avons retrouvé un texte qui explique que Monsieur Allemand, le fondateur de l’OJJA, a choisi de fixer la fête patronale de l’Œuvre autour de Noël, car il voulait que l’enfance du Christ soit une référence pour les jeunes. La date exacte de la célébration a évolué pour s’adapter au rythme des festivités familiales et s’est fixée sur celle de l’Épiphanie, qui permettait au plus grand nombre d’être présents pour l’occasion.

Une vie ordinaire
Les Évangiles ne s’étendent pas beaucoup sur l’enfance de Jésus. Il passe de l’état de nourrisson à celui d’adulte en quelques lignes, et hormis l’épisode de la disparition de trois jours à Jérusalem lors d’un pèlerinage avec ses parents vers sa douzième année, la jeunesse de Jésus n’est pas évoquée. L’évangéliste Luc indique simplement que Jésus « était soumis » à ses parents et qu’il « grandissait en sagesse, en taille et en grâce devant Dieu et devant les hommes ». On imagine que pendant les trente années de sa vie familiale et discrète à Nazareth, Jésus a reçu une éducation qui l’a marqué et qui a façonné sa personnalité. Mais Marie et Joseph restent dans une ombre très pudique. Jean-Joseph Allemand était sensible à cette dimension de la vie ordinaire : ce n’est pas en premier lieu dans les grands événements et les choses exceptionnelles que se fonde la vie spirituelle, mais sur notre capacité à vivre d’une manière extraordinaire le quotidien souvent banal de nos existences. Si le Christ a vécu quelques années d’une vie publique intense et marquante, relatée dans les Évangiles, les trente premières et discrètes années de sa vie n’en sont pas moins fondamentales. On sait bien que notre manière d’être adulte est enracinée dans ce que nous avons vécu avec nos parents et nos éducateurs, même si nous n’en sommes pas conscients. Nous en retenons le meilleur, nous essayons de ne pas reproduire ce qui n’a pas été positif, parfois nous prenons le contre-pied, ou au contraire nous mettons nos pas dans ceux de nos modèles… Mais que nous le voulions ou pas, nous sommes influencés par ce que nous avons vécu dans notre enfance et notre jeunesse.

Humilité
La manière d’être de Jésus a donc été marquée par ce qu’il a reçu de ses parents et son message a été nourri de cette expérience fondatrice, tout autant que par l’inspiration divine en lui. Pour le dire de manière plus précise, c’est parce que Marie et Joseph ont acquiescé au projet de Dieu pour leur enfant qu’ils ont été capables d’être ses messagers et d’accompagner la croissance de Jésus de la manière que Dieu voulait… Leur propre humilité et leur discrétion ont sans doute beaucoup influencé la manière d’être de Jésus qui n’a pas cherché la gloriole ni les reconnaissances. L’humilité est un des principes fondamentaux sur lequel Jean-Joseph Allemand insistait beaucoup : non pas la fausse modestie mais la capacité à trouver sa juste place, à ne pas être dans le registre de la concurrence avec les autres, à préférer la profondeur du service gratuit et discret à la renommée et à ses artifices, à savoir reconnaître ses talents et les faire fructifier sans comparatisme.

Fragilité et dépendance
L’autre leçon que nous pouvons retenir de ce choix de Dieu de s’incarner et de se faire petit enfant, c’est qu’il se révèle dans la dépendance et la fragilité. Nous sommes loin des images d’un Dieu puissant, fort, redoutable… Le visage que Dieu nous montre en Jésus, c’est celui de la confiance de l’enfant qui a besoin de ses parents pour être en sécurité, pour survivre, pour grandir, pour s’épanouir. La seule chose que le petit enfant peut donner à ses parents, c’est son amour fragile et confiant. C’est dans cette gratuité que réside sa capacité à rendre ses parents capables de prendre cette vertigineuse responsabilité d’avoir donné naissance à un être nouveau et de le faire grandir.

Joie et sincérité
Une autre caractéristique de l’enfance, c’est la capacité à savoir s’émerveiller et à être dans la joie. L’enfant se contente de choses simples et sait se suffire de peu pour être heureux. Sa joie est communicative et profonde. Il n’a pas besoin des chimères et des plaisirs artificiels, mais il sait goûter au véritable sens de la vie et s’extasier devant les belles choses et les mystères de l’infiniment grand et de l’infiniment petit. Nous sommes invités à retrouver une âme d’enfant. Il ne s’agit pas d’être irresponsable, de ne pas assumer nos actes ou de ne pas être capable de nous engager, mais il s’agit de revenir à l’essentiel pour profiter pleinement de la vie. Enfin l’enfant ne fait pas semblant et n’est pas dans la dissimulation. Ce qu’il ressent, il l’exprime : la tristesse ou la joie, la peur ou la colère, la tendresse ou le dégoût. Quand nous devenons adultes nous perdons cette capacité à exprimer nos sentiments avec confiance, alors qu’il y aurait parfois quelque chose de cette transparence à retrouver dans nos comportements d’adultes, si loin, souvent, de ce que nous sommes vraiment. Face à Dieu, nous ne pouvons pas nous cacher derrière un masque ou un personnage, nous sommes tels que nous sommes… Dieu s’est fait enfant pour que comprenions que nous sommes ses fils et ses filles.

Olivier

2022-01-15T11:22:37+01:00

L’Évangile du mois de janvier 2022

C’est l’Épiphanie la fête de l’Œuvre !

Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu

Jésus était né à Bethléem de Juda, au temps du roi Hérode ; alors, des pays de l’Orient, des mages arrivèrent à Jérusalem et demandèrent : « Où se trouve le roi des Juifs qui vient de naître ? Nous avons vu son étoile à l’orient et nous sommes venus pour lui rendre hommage »
Quand le roi Hérode l’apprit, il en eut un choc, et tout Jérusalem avec lui. Il réunit tous les chefs des prêtres et ceux qui enseignaient la religion au peuple, car il voulait leur faire préciser où devait naître le Christ. Ils lui firent cette réponse : « C’est à Bethléem de Juda. Car il est écrit dans le livre du prophète : Toi, Bethléem en Juda, tu n’es pas le dernier des chefs-lieux de Juda, car c’est de toi que sortira le chef, le pasteur de mon peuple Israël ». Alors Hérode convoqua les mages en secret et leur fit préciser le moment où l’étoile leur était apparue. Il les mit sur le chemin de Bethléem et leur dit : « Allez là-bas et tâchez de bien vous informer sur cet enfant. Si vous le trouvez, vous me le direz, et moi aussi j’irai lui rendre hommage ».
Après cette entrevue avec le roi ils se mirent en route, et voici que l’étoile qu’ils avaient vue en Orient les conduisait. Finalement elle s’arrêta au dessus de l’endroit où se trouvait l’enfant. Revoir l’étoile fut pour eux une grande joie ; ils entrèrent dans la maison, ils virent l’enfant avec Marie sa mère et ils se prosternèrent pour l’adorer. Ils ouvrirent alors leurs coffres et lui firent des cadeaux : de l’or, de l’encens et de la myrrhe. Ils reçurent alors un avertissement au moyen d’un rêve : ils ne devaient pas revoir Hérode. Ils repartirent donc vers leur pays par un autre chemin.

Le contexte

Jésus vient de naître. Après la joie de la naissance dans le village de Bethléem et l’accueil de ce petit enfant par des bergers, c’est au tour des mages, ces savants venus d’Orient de venir se recueillir devant lui. Matthieu, dans ce passage au-delà de l’histoire déjà très belle des mages suivant une étoile pour arriver à Bethléem, veut répondre à deux questions au sujet de Jésus : Qui est-il ? Pour qui vient-il ?

Qui est-il ?

Que nous dit-on de Jésus dans ce récit ? C’est le roi des juifs, expression qui sera inscrite sur la croix. On nous parle de chef, de pasteur. Mais c’est l’attitude des mages qui est significative, ils sont venus l’adorer. Il ne s’agit pas d’un futur chef de guerre ou d’un sage comme l’Orient les aime. Il s’agit de Dieu lui-même. Les cadeaux offerts nous aident à mieux comprendre : L’or parce qu’il sera Roi au sens de serviteur, l’encens parce que de nature divine et la myrrhe pour annoncer qu’il sera le Sauveur en donnant sa vie pour l’humanité.

Pour qui vient-il ? 

Avec sous-entendue cette conviction qu’il est bien normal que chaque peuple ait son Dieu, et donc que Jésus vienne pour les juifs seulement puisqu’il est l’un d’eux. Pourtant, cette logique est contrariée là encore par la présence des mages qui représentent l’ensemble des nations païennes. Le Christ est venu pour tous, il ne sera pas le leader, le gourou d’un peuple particulier. Matthieu l’annonce : Jésus est Dieu fait homme pour le monde entier. 

La joie

Le thème de la joie est aussi très marquant. Il ne s’agit pas simplement d’être content lorsqu’on reçoit un compliment ou que l’on est félicité. La joie éprouvée par les mages (qui n’étaient ni trois, ni rois) les a bouleversés comme dans ces rencontres inoubliables qui nous marquent pour toute la vie. La joie est un critère simple pour réaliser la présence de Dieu en soi, en l’autre, dans le dialogue entre les deux.

Choisis ton roi

Enfin, Hérode représente l’anti-Jésus. Menteur, manipulateur, Hérode n’est pas le roi que le monde attend. Lui passera mais il laissera la place à Jésus qui lui règne encore aujourd’hui. Les mages l’ont bien compris et repartent chez eux par « un autre chemin » sans le prévenir.

Pour actualiser

Cet Évangile dessine l’itinéraire de tout croyant à la recherche de Dieu : La curiosité d’abord (on scrute le Ciel pour y trouver une étoile), la mise en route, la ténacité (on ne change pas d’étoile en route), le passage par les Écritures (on se soumet à une Tradition, une Histoire), la rencontre avec Dieu dans un acte d’adoration puis le retour dans sa vie ordinaire par un autre chemin.

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Didier Rocca

Le mot du jour : myrrhe

La myrrhe était un ingrédient de l’huile d’onction sacrée. On s’en servait pour parfumer les vêtements ou les lits, et elle entrait dans la fabrication d’huiles de massage ou de lotions pour la peau. On utilisait aussi la myrrhe pour préparer les corps avant leur enterrement.

2021-12-17T14:43:33+01:00

Édito Décembre 2021 > Pas au nom du Christ

Nous entendons certains responsables politiques et des éditorialistes revendiquer des postures et des idées au sujet de grands sujets de société en se référant au message chrétien. Je ne veux pas prendre de position politique dans cet humble journal de l’Œuvre, mais je m’offusque de cette récupération et de cette trahison de la pensée chrétienne. Comment ces personnes osent-elles instrumentaliser l’Évangile et lui faire dire l’exact contraire du message de Jésus ?

Instrumentalisation
Dans l’histoire, on a déjà vu cette récupération des prétendues valeurs chrétiennes mises au service d’un discours de haine, de replis identitaires et de rejet de l’autre. De tout temps il y a eu la tentation d’instrumentaliser le discours religieux pour justifier des idées politiques et sociales. Si les responsables religieux n’ont pas de consigne de vote à donner et doivent respecter la laïcité en refusant d’exposer et d’imposer leurs idées politiques, ils se doivent de réagir quand les textes fondateurs et la pensée de leur religion sont trahis et pervertis à des fins électoralistes. Les gens ont le droit de penser ce qu’ils veulent. Ils ont la liberté d’avoir des idées et des projets nationalistes, et mêmes xénophobes, tant qu’ils ne poussent pas à la haine et à la violence, mais honte à ceux qui cherchent à justifier ces idées au nom de la religion !

Fidélité
Le Christ n’a eu de cesse de faire comprendre que Dieu venait rassembler les gens comme les membres d’une même famille, avec une prière qui résume ce projet : le « Notre Père ». Tous les hommes sont invités à se reconnaître enfants de Dieu, donc frères et sœurs de tous. Le Christ s’est battu contre les responsables des autorités juives de son temps pour briser le mur de mépris et de haine construit autour d’une interprétation rigide des lois de pureté et de pratiques religieuses. Avec Jésus nous ne pouvons pas utiliser la pratique religieuse comme un critère de jugement sur les personnes. Il a très souvent mis en avant des personnes méprisées par les « bons croyants » de son temps : les malades, les pauvres, les prostituées, les handicapés, en disant que ces personnes étaient premières dans le royaume de Dieu. Et il a rabaissé les prétendus « bons pratiquants » en leur faisant comprendre que la pratique consistait aussi à mettre en œuvre dans son existence concrète la loi d’amour et d’ouverture proposée par Dieu.

Noël
À Noël nous avançons encore davantage dans la compréhension du projet de Dieu : en Jésus il s’identifie aux plus petits, aux méprisés, aux exclus. Il se fait proche de tous afin que personne ne puisse se penser indigne que Dieu vienne partager sa vie. Et s’il s’identifie à nous, c’est pour nous inviter en retour à nous identifier à lui, c’est-à-dire à essayer de vivre comme il a vécu : dans la fraternité, l’ouverture aux autres, l’engagement au service des plus petits, la lutte contre les injustices, le soin des malades… Car c’est au cœur du drame humain que Dieu s’incarne à Noël. Nous avons fait de la crèche un symbole joyeux et paisible, mais pour la famille de Jésus c’est une tragédie : Marie est une jeune femme enceinte hors mariage, en exil avec le père de leur futur enfant dans une ville où ils sont étrangers, ils ne trouvent pas de lieu pour les accueillir alors qu’elle doit enfanter, ils se retrouvent dans une bergerie sans personne pour les prendre en charge lorsqu’elle donne naissance à Jésus. Après l’accouchement ils devront se faire migrants pour fuir la haine d’Hérode qui fait massacrer tous les nouveau-nés dans la région de Nazareth… Nous sommes loin des décors provençaux et bucoliques de nos crèches qui nous racontent une gentille histoire…

Au nom du Christ
Les chrétiens sont invités à agir au nom du Christ, c’est leur vocation. Il ne s’agit pas de leur faire croire qu’ils peuvent se prendre pour le Christ et qu’ils ont atteint la perfection du simple fait de leur baptême, mais plutôt qu’ils ont un idéal qui peut leur servir de boussole pour agir et faire des choix : « Si le Christ était à ma place, que ferait-il ? » Nous sommes donc invités à rester fidèle aux attitudes du Christ, et non pas à ce que les hommes ont fait du christianisme tout au long de son histoire, car de tout temps il y a eu la tentation de transformer l’Église en un instrument de pouvoir et de pression sur les consciences, qui a été utilisé pour justifier des actes contraires au projet chrétien, mais qui arrangeaient bien les hommes au pouvoir. Agir au nom du Christ, ce n’est pas une posture idéologique, c’est un engagement au service de plus de fraternité, de justice, de paix, d’amour. Cet idéal n’est pas à notre portée, nous devons être d’une extrême humilité lorsque nous nous engageons dans cette voie, mais nous nous devons de garder le cap et de n’avoir de cesse de nous convertir pour répondre à cette vocation, à cet appel. Ce n’est pas parce que l’idéal chrétien est hors de notre portée que nous devons lui tourner le dos… Nous ne sommes pas livrés à nos propres forces, nous sommes rejoints par Dieu lui-même qui se fait proche de nous en Jésus, qui se fait présence en nous par l’Esprit Saint.

Olivier

2022-01-15T11:23:02+01:00

L’Évangile du mois de décembre 2021

Cet évangile sera lu le 12 décembre, le troisième dimanche du temps de l’avent appelé Gaudete.

Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc

Les foules demandaient à Jean : « Que devons-nous donc faire ? » Jean leur répondait : « Celui qui a deux vêtements, qu’il partage avec celui qui n’en a pas ; et celui qui a de quoi manger, qu’il fasse de même ! »
Des publicains vinrent aussi pour être baptisés ; ils lui dirent : « Maître, que devons-nous faire ? » Il leur répondit : « N’exigez rien de plus que ce qui vous est fixé. »
Des soldats lui demandèrent à leur tour : « Et nous, que devons-nous faire ? » Il leur répondit : « Ne faites violence à personne, n’accusez personne à tort ; et contentez-vous de votre solde. »
Or le peuple était en attente, et tous se demandaient en eux-mêmes si Jean n’était pas le Christ. Jean s’adressa alors à tous : « Moi, je vous baptise avec de l’eau ; mais il vient, celui qui est plus fort que moi. Je ne suis pas digne de dénouer la courroie de ses sandales. Lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu. Il tient à la main la pelle à vanner pour nettoyer son aire à battre le blé, et il amassera le grain dans son grenier ; quant à la paille, il la brûlera au feu qui ne s’éteint pas. »
Par beaucoup d’autres exhortations encore, il annonçait au peuple la Bonne Nouvelle.

Le contexte
Nous lisons aujourd’hui un passage du début de l’Évangile de Luc. Jésus n’a pas encore commencé sa vie publique. Nous sommes au bord du Jourdain, lieu où Jean le Baptiste a constitué une communauté originale composée de personnes interdites de Temple à cause de leur métier ou de leur état de vie ou encore parce qu’elles portent un handicap. Jean leur propose un baptême de conversion. Vient naturellement la question : que faire après avoir vécu une expérience spirituelle si forte ?

Que faire ?
Le changement radical de vie n’est pas une fuite hors du monde. Jean renvoie à la réalité ordinaire du partage et de la solidarité. Au fond, Jean déploie une éthique du partage qui nous concerne tous.
Les collecteurs de taxes
et les soldats
Ces personnes sont détestées de la société religieuse car ils se sont enrichis en collaborant avec l’occupant romain. On connaît l’un d’eux Zachée. Ils viennent pourtant eux aussi recevoir le baptême. On imagine sans mal la réaction des autres, les regards soupçonneux… Jean les accueille et prend leur question au sérieux. Il les appelle à être honnêtes. Il n’y a pas de métier honteux. Le collecteur d’impôts comme le soldat peut vivre de son activité à condition que ce soit sous le regard de Dieu.

La morale naturelle
Les principes de vie prêchés par le Baptiste sont les préceptes de la morale naturelle (elle est celle du bon sens, celle qui oriente l’être humain vers son vrai bonheur). Cela reprend la règle d’or que reprendra Jésus : « Tout ce que vous voulez que les gens fassent pour vous, vous aussi, faites-le pour les autres ». Jean le Baptiste annonce celui qui vient : Le Messie. Le peuple était dans l’attente. Comme Syméon attendait la consolation d’Israël dans le temple de Jérusalem, comme Anne aussi. Lorsque les humains sont dans l’attente, ils ont le regard éveillé, le cœur disponible et naturellement se posent la question : Jean s’annonce-t-il lui-même ? Serait-ce lui le Messie tant attendu ? Jean montre ici sa lucidité. Il dit clairement à ses interlocuteurs qu’il n’est pas le Christ. Il est celui qui annonce un autre, plus puissant que lui. Jean se présente comme un véritable prophète faisant preuve de discernement et d’une grande humilité.

Que dit-il de Jésus ?
La particularité de Jésus est qu’il baptisera dans l’Esprit Saint et le feu. L’Esprit évoque une relation directe avec Dieu et le feu est un symbole de jugement ou de purification. Enfin, le Christ est présenté ici comme un vanneur qui jette en l’air le blé battu en se servant d’une pelle. Cette image évoque deux réalités :
– La séparation des justes et des injustes, c’est ainsi que le comprend Jean.
– La séparation entre le juste et l’injuste qui se partagent notre vie. Ainsi, le jugement devient la purification pour ne laisser subsister que le meilleur de nous-mêmes. Ainsi, le grenier est une image du Royaume qui ne recueillera que le meilleur de notre vie.

Pour actualiser…
Jean est la figure du disciple, de l’ami, du prophète qui sait rester à sa place et qui donne le goût à une connaissance profonde du Christ. Un beau programme pour chacun d’entre nous.

Didier Rocca

Le mot du jour : Gaudete
Gaudete signifie la joie. Il s’agit durant cette célébration de se réjouir dans le Seigneur. Cela nous rappelle la joie de l’Église dans l’attente de l’avènement du Chris.

2021-11-23T09:24:53+01:00

Édito novembre 2021 > Église constituée de pêcheurs

Le rapport de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église vient d’être rendu public, et nous sommes tous profondément marqués par ce qu’il contient. Les chiffres et tout ce qu’ils représentent de souffrance pour les victimes sont au-delà de tout ce que nous pouvions imaginer. La sidération et l’horreur sont immenses, tout comme la tristesse et la honte pour tous ceux qui sont engagés dans l’Église. Car nous ne pouvons nous désolidariser de l’institution au prétexte que nous ne sommes pas coupables ou que les faits sont anciens. Nous avons été aveugles, maladroits, peut-être même complaisants, sans jamais cautionner les crimes commis mais sans trop chercher à savoir… Je le dis d’autant plus volontiers que notre propre communauté, notre famille de l’Œuvre, n’est pas épargnée par ce fléau. Nous sommes de la même pâte humaine que les coupables désignés et reconnus, et, soyons lucides, il n’en faut parfois pas beaucoup pour basculer dans l’aveuglement qui empêche de considérer la dignité de la personne qui est à côté de nous. Nous sommes aussi de la même pâte humaine que les victimes qui sont rongées par la souffrance et, malheureusement, par la honte.

Pardon
Nous demandons pardon à toutes les personnes qui ont été blessées, de près ou de loin, par ces dérives criminelles. Il y a quelques années nous avons envoyé une lettre aux familles et aux anciens de l’Œuvre suite à des révélations de faits anciens commis dans une de nos maisons mais qui ont des répercussions toujours actuelles et douloureuses. Nous sommes désolés que des jeunes et des familles aient été profondément et durablement blessés dans le cadre de nos Œuvres alors que notre mission est d’accompagner la croissance des jeunes dans un cadre bienveillant, sécurisant et encourageant. Nous n’avons de cesse de parler d’un Dieu d’amour qui accueille et qui relève, et pourtant nous sommes capables de blesser et de détruire. Il nous faut en être conscients, non pour nous complaire dans la médiocrité, mais pour lutter contre ce qui peut nous faire trahir notre mission. Nous ne pouvons plus ignorer que les blessures et traumatismes ne s’effacent pas et restent présents dans l’existence des victimes tout au long de leur vie. Nous savons aussi que l’expression de ces souffrances par les victimes, et la reconnaissance des agressions de la part des responsables, sont des moyens d’apaisement indispensables. Parfois les agresseurs ne sont plus là ou ne sont pas capables, enfermés dans leur perversion, de reconnaître leur responsabilité et leurs crimes, mais en leur noms et comme responsables de l’institution dans laquelle ils ont sévi, nous voulons demander pardon. Pardon si nous n’avons pas mis en place des garde-fous contre l’emprise spirituelle et l’emprise affective qui sont à la source des abus physiques. Pardon aussi si nous n’avons pas eu conscience de la gravité des blessures et des répercussions sur toute une vie et son entourage. Oui, nous avons failli. Nous avons oublié que l’Église est d’abord le Peuple de Dieu, pas une structure, une hiérarchie, avec ses privilèges et ses passe-droits. Nous avons oublié que nous cheminions ensemble. Nous avons oublié que le silence que l’Église a opposé aux victimes fut un silence qui les a enfermées dans leur solitude, leur détresse, leur souffrance. Le contexte et les connaissances actuelles nous éclairent sur les moyens à mettre en œuvre pour lutter contre ces dérives criminelles et les aveuglements complices.

Humilité
Cette prise de conscience peut être prophétique : ce n’est pas parce que nous sommes animateurs, adultes, éducateurs, religieux, prêtres, directeurs de colo, que nous sommes au-dessus des autres. Nous avons une mission, nous avons une parole à transmettre, mais nous n’en sommes pas les propriétaires ni les auteurs, nous en sommes les premiers destinataires. Quand nous donnons des conseils, lorsque nous indiquons un idéal, c’est d’abord à nous-mêmes que nous les adressons. L’Église, lorsqu’elle parle par la voie des prêtres, des diacres, des évêques, du pape ou des chrétiens engagés, ne donne pas des leçons de haut mais se parle à elle-même et transmet une parole dont elle est la première destinataire. Sinon elle risque de tomber dans le jugement et la condamnation, ce qui est une perversion de sa mission. Je me permets une réflexion personnelle : comme prêtre, je peux refuser de donner un sacrement, je peux interdire à une personne de communier, je peux culpabiliser les gens sur leurs choix de vie, leurs orientations sexuelles ou leurs actes passés… Mais quand je fais cela, je me prends pour Dieu ! Comment puis-je justifier une telle attitude alors que celui que j’essaye de suivre, le Christ, Dieu fait homme, ne s’est jamais permis d’enfermer une personne dans son pêché mais lui a toujours offert le pardon et le relèvement. Nous ne sommes pas ministres de la condamnation mais du pardon, et nous sommes nous-mêmes des pêcheurs pardonnés. Le Christ n’a eu des paroles dures que contre les responsables religieux de son époque qui se permettaient de juger et de condamner les autres en instrumentalisant la loi de Dieu. Tout ceci nous invite à œuvrer avec une extrême humilité, tout en veillant à transmettre sans trop la trahir la Bonne Nouvelle de l’amour de Dieu offert à tous. Ce n’est pas parce que les porte-parole sont médiocres et décevants que la parole qu’ils ont la charge de transmettre doit être dévalorisée et rejetée.

Vérité
Nous sommes ravis les jeunes et les familles à continuer à nous faire confiance. Nous mettons en place depuis quelques année, pour les grands jeunes et adultes impliqués dans l’animation des enfants, des sessions de formation destinées à éclairer sur la question des abus et des agressions sexuelles, et nous veillons à ce que chacune des personnes qui a en charge des enfants soit vigilante sur les dérives possibles. Il ne s’agit pas de tomber dans la suspicion continuelle, mais de savoir ne pas accepter tout sans discernement. Les paroles de vérité, même douloureuses, nous font grandir, nous offrent la possibilité d’être de meilleurs éducateurs, et nous permettent de mieux remplir notre mission !

Olivier

2022-01-15T11:23:29+01:00

L’Évangile du mois de novembre 2021

Le dimanche 14 novembre, nous prierons pour nos défunts et nous lirons un Évangile pour le moins bizarre.

Évangile de Jésus-Christ selon saint Marc

En ces jours-là, après une pareille détresse, le soleil s’obscurcira et la lune ne donnera plus sa clarté ; les étoiles tomberont du ciel, et les puissances célestes seront ébranlées. Alors on verra le Fils de l’homme venir dans les nuées avec grande puissance et avec gloire. Il enverra les anges pour rassembler les élus des quatre coins du monde, depuis l’extrémité de la terre jusqu’à l’extrémité du ciel. Laissez-vous instruire par la comparaison du figuier : dès que ses branches deviennent tendres et que sortent les feuilles, vous savez que l’été est proche. De même, vous aussi, lorsque vous verrez arriver cela, sachez que le Fils de l’homme est proche, à votre porte. Amen, je vous le dis : cette génération ne passera pas avant que tout cela n’arrive. Le ciel et la terre passeront, mes paroles ne passeront pas. Quant à ce jour et à cette heure-là, nul ne les connaît, pas même les anges dans le ciel, pas même le Fils, mais seulement le Père.

Le contexte
Avant d’achever son Évangile en racontant la Passion et la résurrection de Jésus, Marc nous propose un récit étonnant sur la thématique de la venue du Fils de l’Homme. De quoi s’agit-il ?

Apocalypse now ?
L’obscurcissement du Soleil et de la Lune ainsi que la chute des étoiles sont des signes apocalyptiques. Pris au sens littéral, ils évoquent la fin du monde mais ce texte peut s’interpréter autrement en se souvenant que le Soleil et la Lune peuvent être des idoles devant lesquelles on s’incline. Ainsi, l’obscurcissement de ces astres signifie la fin de l’idolâtrie. Ainsi, est suggérée non pas la fin du monde mais l’émergence d’un monde nouveau.

La venue du Fils de l’Homme
Cette venue du Fils de l’Homme ne se fera pas en catimini puisqu’elle sera accompagnée de puissance et de gloire. Remarquons que le Nouveau Testament ne parle pas du retour du Christ mais de sa venue. Parler de retour laisserait penser que le Christ est parti. Or, le Christ est vivant par son Esprit. Il est là même s’il est invisible à nos yeux de chair. Bref, le Seigneur est venu, il vient et il reviendra à la fin des temps.

Rassembler les élus
Cela évoque la réconciliation finale après la grande persécution. Il faut avoir en tête que la communauté à laquelle Marc appartient écrit depuis Rome à la fin des années 60 et que la communauté chrétienne est en proie aux persécutions.

La parabole du figuier
Le figuier suggère la fin de l’hiver et la venue du printemps. Demandez à Jean-Marie, il pourra vous le confirmer. Ainsi, l’image suggère qu’après le temps de la persécution, le temps de l’épreuve vient le temps des beaux jours, de la renaissance.

Mes paroles ne passeront pas
De fait, l’Évangile a parlé aux humains de toutes les époques et de toutes les cultures depuis 2000 ans. La Parole est éternelle. Pour chaque génération, elle ne passera pas avant que tout ne soit accompli.

Pour actualiser
La fin des temps ne peut pas être fixée par avance sur notre calendrier. La fin des temps, c’est le Christ crucifié qui, dans la puissance de sa résurrection, vient tout rassembler. Saint Jean-Paul II disait : « Tout ce qui arrivera, jusqu’à la fin du monde, ne sera qu’une expansion et une explicitation de ce qui est arrivé le jour où le corps martyrisé du Crucifié est ressuscité par la puissance de l’Esprit Saint ».
La fin des temps, c’est donc une Bonne Nouvelle ! Difficile à imaginer, ce sera la résurrection générale de tout le cosmos et de chacun d’entre nous.

Et le message concret dans ce passage ?
C’est qu’à travers les vicissitudes de l’Histoire, au terme, il y a la Rencontre avec le Ressuscité pour rentrer dans son Règne.
La règle pour y entrer, le croire tout simplement.
Le rôle des croyants consiste à être porteurs aujourd’hui de cette espérance dans leur quotidien.

Didier Rocca

Le mot du jour : Apocalypse
Ce mot vient du grec « apocalypsis » et signifie « révélation ». Ce genre littéraire apparaît en contexte de crise, surtout au iie siècle avant Jésus-Christ. Il donne naissance à des textes dans l’Ancien Testament et le Nouveau. Ces écrits veulent soutenir la foi et l’espérance des croyants qui passent par l’épreuve de la persécution sous diverses formes. Mais la littérature apocalyptique insiste sur le fait que, si le serviteur n’est pas au-dessus de son maître, il n’est pas au-dessous non plus ! Ainsi, les croyants de l’Apocalypse actualisent dans leur propre destin celui du Christ.

2021-10-18T21:51:13+02:00

Édito octobre 2021 > La gloire et le croix

Il existe une fête chrétienne de la « croix glorieuse ». Étrange idée que d’associer la gloire, qui renvoie à des notions positives, joyeuses et belles, à la croix, qui, avant d’être le signe de reconnaissance des chrétiens, est un violent instrument de torture et de mort. Le fondateur de l’Œuvre, Jean-Joseph Allemand, avait une grande dévotion envers la croix et insistait sur l’attachement des jeunes à la croix du Christ. Est-ce un attrait pour la souffrance et le côté morbide ? Je ne le pense pas, car les chrétiens sont appelés à comprendre que Dieu nous veut du bien et qu’il vient lutter contre la mal et ce qui défigure l’humanité. Jésus n’a jamais accepté ni justifié la souffrance ; il l’a toujours combattue. Mais alors pourquoi associer la gloire et la croix ?

Les deux croix
La croix, si elle est un instrument de torture inventé par les hommes, est aussi un symbole qui associe la verticalité et l’horizontalité. Un homme debout et les bras écartés forme une croix. Le Christ, durant toute sa vie terrestre, a été un homme debout, en marche, les pieds bien sur terre et la tête orientée vers le ciel, signe de la dignité de l’humanité. Ses bras écartés pour rassembler largement toute personne, pour accueillir toute l’humanité, signifient ce désir de Dieu d’être en relation avec chaque personne sans exclusion ni préférence. Les hommes ont été capables de caricaturer ce symbole pour en faire un instrument de violence et de mort, mais il y a un combat entre ces deux croix, celle de la haine et de la torture contre celle de la dignité et de l’amour. Le Christ, au moment de sa passion, a été cloué sur une croix de haine et a lutté contre cette violence en prenant d’autres armes que celles des hommes : il n’est pas entré dans l’escalade mortifère de la vengeance et de la violence, mais il s’est désarmé pour répondre à la haine par l’amour et le pardon. Folie pour les hommes qui, par instinct, combattent le mal par le mal, mais sagesse pour Dieu qui nous aide à comprendre que pour détruire la haine il faut en prendre le contre-pied et s’engager dans la voie de l’amour. Chemin autrement plus difficile et courageux, mais seul moyen de combattre le mal à la racine.

L’amour / la haine
Si les chrétiens parlent de gloire au sujet de la croix du Christ, c’est pour signifier qu’ils reconnaissent cette victoire de l’amour face à la haine. Sur la croix nous adorons l’amour suprême qui est vainqueur du mal et de la mort. Nous sommes tous habités par ces deux croix : le combat a lieu dans notre propre existence. Nous sommes capables d’être des hommes debout pour avancer et les bras écartés pour accueillir les autres, mais nous sommes aussi capables de nous replier sur nous-mêmes, de blesser les autres par haine et par violence, et de les clouer sur une croix. S’attacher à la croix du Christ, cela signifie s’engager dans la voie de l’amour contre la haine, de l’accueil contre le rejet de l’autre, de la dignité contre le repli identitaire.

Attachement à la loi d’amour
Nous avons des formules parfois maladroites ou incompréhensibles pour exprimer cela en langage religieux. Par exemple : « C’est par ses souffrances que le Christ atteint la perfection ». Prise au pied de la lettre cette phrase est révoltante. Qui accepterait de prier un Dieu se satisfaisant de voir l’humanité souffrir et la récompensant à la hauteur de sa capacité à encaisser le mal ? C’est à l’opposé de tout ce que le Christ est venu vivre avec les personnes en souffrance qu’il a rencontrées : jamais il ne leur a dit d’accepter leur souffrance, il n’a jamais valorisé le mal, mais au contraire il a combattu la souffrance, il a guéri les malades, il a relevé les handicapés, il a libéré les possédés… Ce n’est pas la souffrance du Christ qui nous sauve ou qui le rend glorieux, mais c’est son amour donné, même lorsqu’il est confronté au mal. C’est l’obéissance du Christ au projet d’amour absolu de Dieu qui nous sauve : au cœur de la souffrance physique et psychologique que le Christ subit au moment de sa passion, il répond par l’amour et le pardon, il met en œuvre le projet de Dieu et le pousse à la perfection. Il semble anéanti par la haine, il meurt sur la croix de torture des hommes, mais trois jours après il ressuscite, symbole de la victoire totale de l’amour face au mal absolu qu’est la mort physique. Aimer ceux qui nous aiment, vouloir du bien à ceux avec qui tout se passe bien, c’est facile. Prendre soin des personnes en souffrance ou être bienveillant vis-à-vis des étrangers qui ne nous dérangent pas trop, c’est bien vu. Mais aimer nos ennemis, accueillir ceux qui nous dérangent, soigner ceux qui nous semblent responsables de leurs malheurs, prendre soin de ceux qui ont fait du mal, c’est une autre affaire. C’est pourtant à cette perfection de l’amour que nous sommes invités. Cela est souvent au-dessus de nos forces, c’est bien pour cette raison que nous avons besoin de nous laisser habiter par l’amour même de Dieu pour en devenir les porteurs et incarner dans le monde d’aujourd’hui la bonne nouvelle chrétienne. D’un autre point de vue cette compréhension de l’amour absolu de Dieu nous renvoie à notre propre condition humaine : même si nous nous considérons comme indignes de l’amour de Dieu, lui nous dit qu’il nous aime sans condition et qu’il compte sur nous.

Olivier

2021-10-18T21:52:54+02:00

L’Évangile du mois d’octobre 2021

Nous entendrons cet Évangile le 24 octobre, journée de la mission universelle de l’Église.

Évangile de Jésus-Christ selon saint Marc

Jésus et ses disciples arrivent à Jéricho. Puis, comme il sort de la ville avec ses disciples et bon nombre de gens, un mendiant est là assis au bord du chemin ; c’est Bartimée, le fils de Timée, et il est aveugle. Quand il apprend que c’est Jésus de Nazareth, il se met à crier : « Jésus, fils de David, aie pitié de moi ! » Beaucoup le sermonnent pour le faire taire, mais il crie encore plus fort : « Fils de David, aie pitié de moi ! » Jésus s’arrête et dit : « Appelez-le ». On appelle l’aveugle et on lui dit : « Courage, lève-toi, il t’appelle ». L’aveugle laisse son manteau, et d’un bond il est près de Jésus. Jésus lui dit : « Que veux-tu que je fasse pour toi ? » L’aveugle répond : « Rabbouni, que je voie ! » Alors Jésus lui dit : « Va ! ta foi t’a sauvé ! » À l’instant même cet homme voit ; et il se met à suivre Jésus sur le chemin.

La foule
Bartimée dérange la visite bien préparée par quelques disciples dans la ville de Jéricho (voir mot du mois). Cette foule agglutinée autour de Jésus a un rôle paradoxal puisque, dans un premier temps, elle empêche Bartimée de voir Jésus et de lui parler puis, à la demande du maître, cette foule fait venir Bartimée à Jésus. Cela renvoie au rôle de l’Église dont une des missions est de se faire l’écho des misères des plus petits et d’être au plus près de ces blessés de la vie. Parfois, hélas, l’Église peut être un obstacle et commettre de regrettables contre-témoignages. Le plus souvent, elle est la porte-parole des sans voix comme avec Bartimée.

Confiance, lève-toi, il t’appelle !
Trois actions correspondent aux trois paroles :

  1. « Confiance » et il se débarrasse de ses sécurités, de ses seules richesses. Il lâche alors son manteau. Ce geste ne paraissait pas nécessaire. On peut l’interpréter comme un désir de se dépouiller pour aller au plus vite vers Jésus.
  2. « Lève-toi », ce verbe qui renvoie à la résurrection. Bartimée fait bien davantage que de se mettre debout, il bondit. Cela lui permettra d’être à la même hauteur que Jésus. Un regard pourra être échangé. Voici Bartimée relevé !
  3. « Il t’appelle ». Bartimée répond à un appel de Jésus. Cet appel est indirect puisqu’il est effectué par un des disciples. Une fois encore est signifiée la mission de l’Église, mettre en contact le Christ avec les plus petits, ceux qui sont ou se croient éloignés de Dieu.

Que veux-tu que je fasse pour toi ?
Bartimée est aveugle et mendiant. De plus, il est assis, au bord du chemin. Il est le prototype de celui qui semble avoir été oublié par Dieu. Que va-t-il demander ? Quel est son profond désir ? De l’argent, la vue ? Un chien d’aveugle ? Sa réponse est claire : il veut voir. Marc joue avec ce verbe qui peut avoir deux sens. S’agit-il d’être soigné de son aveuglement physique ou de sa cécité spirituelle ? Le texte ne le dit pas.

Va ! Ta foi t’a sauvé !
La foi a sauvé Bartimée, elle ne l’a pas seulement guéri. Bartimée est guéri corps et âme à la mesure de sa foi simple et profonde. Jésus ajoute le « va » et non « viens ». Il met l’aveugle dans une situation dynamique. Le terme « sauver » montre qu’il a fait un chemin de disciple. Aussitôt, il obtient la vue. La requête est juste, elle est exaucée. Remarquons que Bartimée suit Jésus sur le chemin, manière de dire que sa mission de disciple est d’emprunter le même chemin que son maître, chemin d’humiliation qui le mènera jusqu’à la croix. Qu’est devenu Bartimée ? On ne le sait pas mais il n’est pas interdit de penser qu’il a fait partie des premiers membres de la communauté chrétienne après l’événement pascal.

Bartimée
Le personnage de Bartimée synthétise les traits du disciple modèle. C’est la seule personne guérie par Jésus qui devient son disciple. La guérison n’est pas décrite en tant que telle. C’est sa transformation intérieure qui devient centrale. La réaction de Bartimée après sa guérison est notable. Il conforme ses gestes à la volonté du Christ.

Didier Rocca

Le mot du jour : Jéricho

Cette ville au bord de la mer Morte est à 400m au-dessous du niveau de la mer. C’est la ville la plus basse du monde. L’ambiance y est insurrectionnelle. Jéricho abrite le palais du roi Hérode.

2021-09-22T13:46:44+02:00

Édito septembre 2021 > La vie chrétienne

En ce temps de rentrée, je vous propose de résumer en quelques lignes ce que c’est qu’être chrétien. Ce sera l’occasion de nous donner quelques repères pour cette nouvelle année qui démarre.

Dieu nous aime
Avant tout, être chrétien, c’est ce reconnaître aimé. C’est bien ce qui se révèle dans toute l’histoire biblique de la relation de Dieu avec le peuple hébreu, et tout particulièrement dans son incarnation en Jésus Christ : il n’exclu personne, se fait proche des plus démunis, s’identifie aux pauvres. Il vient nous dire qu’il aime tout le monde sans frontière est sans limite.
Être chrétien, c’est entendre Dieu qui nous dit que nous avons du prix à ses yeux, que nous comptons pour lui, personnellement. Nous sommes tous uniques et Dieu nous aime chacun pour ce que nous sommes, avec ce que nous sommes, comme une mère ou un père aime chacun de ses enfants d’une manière unique et absolue.

Dieu nous envoie
Être chrétien, c’est entendre que Dieu nous dit qu’il compte sur nous pour assumer sa mission, qui consiste à incarner l’amour au cœur du monde. Nous n’avons pas d’autre vocation que d’aimer, comme Dieu aime, sans compromission avec les forces du mal et sans replis identitaire. Aimer, c’est accompagner, encourager, relever. Ce n’est pas juger ou rejeter, c’est croire en l’homme et en sa capacité de changement. Aimer c’est aussi savoir se révolter face à l’injustice et agir pour transformer le monde de l’intérieur.
Pour accomplir cette mission, nous avons, en premier lieu, besoin de reconnaître l’amour bienveillant de Dieu : nous ne sommes pas meilleurs que les autres, nous ne sommes pas supérieurs, nous sommes tous de la même pâte humaine, nous sommes fragiles, capables du pire et du meilleur, pêcheurs pardonnés. Et c’est seulement si nous expérimentons dans nos existences cet amour qui relève, encourage et pardonne que nous pourrons l’annoncer.

Communion en Église
Pour assumer cette mission, nous ne sommes pas seuls, nous sommes encouragés à vivre notre vocation en Église, avec d’autres, en découvrant la richesse et la fécondité de la différence. Cette diversité nous ouvre à la communion, qui est une invitation à comprendre que si la mission chrétienne est unique et universelle, les manières de la mettre en œuvre sont multiples, que les sensibilités et les différences ne sont pas des obstacles mais des trésors, que nous devrions nous émerveiller que d’autres assument la mission d’une autre façon que la notre, qu’il n’y a pas concurrence mais coopération avec ceux qui agissent différemment pour atteindre le même objectif.

Priorité aux pauvres
Cette mission à vivre en communion dans l’Église sera d’autant plus conforme au désir de Dieu qu’elle sera orientée vers les plus pauvres et les plus petits. Les chrétiens doivent être capables de discerner les injustices et de mettre en œuvre la solidarité et la fraternité. Ça a été la priorité du Christ, ce doit être celle de tous les croyants. La primauté aux pauvres peut être un critère de discernement pour l’Église et pour tous les croyants. Avant de prendre des décisions, nous pouvons nous demander en quoi cela sera au service de plus de justice et de fraternité.

Catholicité de l’Église
La mission chrétienne n’est pas limitée à une élite ou à un public cible, elle est universelle, c’est le sens du mot « catholique ». Il ne s’agit pas de faire nombre ou de viser la rentabilité, il s’agit d’annoncer que l’amour de Dieu est pour tous, que chaque personne compte pour lui et qu’il compte sur chacun de nous pour que notre vie soit un signe et un moyen de l’incarnation de son amour dans le monde. Le pape François nous invite à briser les murs et à construire des ponts entre les hommes, parce que c’est le projet de Dieu : nous accompagner pour accomplir notre vocation à la fraternité.
Nous sommes particulièrement invités, en ces temps bouleversés par la pandémie, par les incertitudes sur l’avenir de notre planète et par les crises sociales, économiques et migratoires qui sont à craindre, à prendre notre part et à découvrir que nous avons quelque chose à faire pour que le projet de Dieu s’accomplisse.

Olivier

2021-08-24T18:40:25+02:00

L’Évangile du mois de septembre 2021

L’Évangile de ce mois sera le 26e dimanche du temps ordinaire et la journée du migrant et du réfugié.

Évangile de Jésus-Christ selon saint Marc

« Maître, nous avons vu quelqu’un qui se servait de ton nom pour chasser les démons, et nous l’avons empêché car il n’est pas disciple avec nous ». Jésus lui répond : « Ne l’empêchez pas ! Car personne ne peut faire un miracle en mon nom et aussitôt après parler mal de moi. Celui qui n’est pas contre nous est pour nous. Celui qui vous donne un verre d’eau parce que vous êtes disciples du Christ, je vous dis qu’il ne perdra pas sa récompense.
Si ton œil te fait pécher, arrache-le.
Si quelqu’un devait faire chuter l’un de ces petits qui croient, mieux vaudrait pour lui qu’on lui attache au cou une meule de moulin et qu’on le jette dans la mer.
Si ta main doit te faire chuter, coupe-la ! Mieux vaut pour toi entrer dans la vie avec une seule main, que t’en aller avec tes deux mains à la géhenne, au feu qui ne s’éteint pas.
Et si ton pied doit te faire chuter, coupe-le ! Mieux vaut pour toi entrer dans la vie avec un seul pied, qu’être jeté avec tes deux pieds dans la géhenne.
Si ton œil doit te faire chuter, jette-le loin de toi ! Mieux vaut pour toi entrer dans le Royaume de Dieu avec un seul œil que d’en avoir deux et d’être jeté dans la géhenne, où le ver ne meurt pas et où le feu ne s’éteint pas. »

Le contexte
Au cœur de l’Évangile selon saint Marc, cet extrait clôt un dialogue avec ses disciples. Il fait suite à la deuxième annonce de sa Passion et sa Résurrection.

Qui n’est pas contre nous est pour nous.
Les disciples imaginent être les seuls à pouvoir parler de leur maitre. Or, annoncer Jésus même de façon maladroite est toujours un bien. L’expérience missionnaire est le lieu par lequel nous allons apprendre à le connaitre, à l’aimer. Au fond, tant que je ne contredis pas le Credo, même si je n’ai pas les mots bien justes, je ne dois pas avoir de scrupules pour annoncer l’Évangile. Le but de l’Église n’est pas d’empêcher les autres mais de proclamer et vivre le royaume. Suis-je capable de me réjouir de ceux qui sont différents de moi, qui confessent leur foi avec d’autres mots, avec un autre style ? Cette attitude d’ouverture différencie l’Église d’une secte.

Qui donnera un verre d’eau…
On trouve à l’extérieur de l’Église des personnes qui font preuve de compassion. C’est bien évident. Même s’ils ne sont pas disciples, ils recevront leur récompense. Ce verset fait l’écho à la parabole du jugement dernier dans l’évangile de Matthieu : « J’ai eu soif et vous m’avez donné à boire ».

Arrache-le !
Si nous devions prendre ces paroles du Christ au pied de la lettre, il y aurait beaucoup de borgnes, de manchots parmi nous, en commençant par nous-mêmes. Ces paroles doivent être entendues par chacun d’entre nous avec gravité mais aussi par nos communautés. Un chrétien, une Église se juge à la façon dont elle traite les petits. Il s’agit de ne pas les faire chuter, de ne pas les scandaliser. C’est malheureusement d’actualité…
L’Eglise des débuts se sentait menacée par l’hostilité du monde et par la persécution. Jésus lui dit qu’elle est surtout menacée par le manque d’amour fraternel. Que les difficultés vis-à-vis de ceux qui ne confessent notre foi ne doivent pas nous faire perdre de vue le péché qui est au-dedans de nous, au-dedans de l’Église.
On peut aussi entendre dans ces sérieux avertissements adressés par Jésus comme un appel à ce que nos mains, nos pieds ou nos yeux ne soient pas des obstacles à notre fidélité à l’Évangile. Est-ce que nous laissons dicter tous nos gestes, nos paroles, nos pensées par l’espérance du monde à venir ?

Pour actualiser
Tout d’abord, un appel à l’humilité, ne pas croire que ceux qui sont « du dehors » sont mauvais. Comme chrétiens, nous ne sommes pas le centre du monde, seulement et c’est déjà beaucoup un signe et un moyen par lequel Dieu est annoncé.
Surtout, Jésus exige de nous que nous ne soyons pas source de scandale ! Il ne s’agit pas de se couper un œil, une jambe ou une main mais de se couper de certaines situations, certaines images ou certaines postures. Au travail !

Didier Rocca

Le mot du jour : géhenne

La géhenne est le synonyme des enfers. Ce mot renvoie à une vallée au sud de la ville de Jérusalem, où des Ammonites, une ethnie cananéenne, offraient des enfants en sacrifice au dieu Moloch. On y jetait les détritus qui étaient brûlés et mangés par les vers. Une vie qui fait chuter est une abomination qui relève de la géhenne, elle doit être brulée comme un détritus.

2021-08-24T18:43:50+02:00